Qui est vraiment Oum Keltoum Boufarès ?

Oum Keltoum Boufarès, un quart de siècle et des poussières, la crinière châtain cuivré, a créé l’émoi et le buzz juste après l’annonce de son mariage avec Moulay Rachid. Portrait d’une princesse plutôt discrète.

Par et

Photo : DR

Elle est belle, jeune, bien éduquée, et tout cela n’aurait pas eu autant d’intérêt si la jeune femme n’était pas devenue l’épouse du prince Moulay Rachid. La nouvelle est tombée dimanche 15 juin en fin d’après-midi par voie de communiqué officiel et a fait l’effet d’une bombe dans les médias, faisant de cette jeune fille sans histoire la femme la plus scrutée du royaume.

Une moue mystérieuse. Un caftan vert émeraude. Un port de tête princier, évidemment. Et une silhouette frêle mais pas juvénile, encadrée par les deux hommes les plus puissants du Maroc. Le (nouveau) portrait de famille a de quoi en jeter.

Pour elle, un début d’empathie, et surtout de curiosité de la part du pays tout entier. En quelques heures, son nom enregistre un nombre record de recherches sur Google. Sans résultats. Et la même et sempiternelle question brûle toutes les lèvres : qui se cache derrière celle qui a su ravir le cœur du célibataire le plus convoité du royaume ?

Du sang royal de père en fille

Inconnue du grand public, Oum Keltoum Boufarès n’est pourtant pas une parfaite anonyme. Fille de Moulay Mamoun Boufarès, fils de Lalla Khadija, sœur du sultan Mohammed V, “La Oum”, comme on la surnomme en privé, possède un arbre généalogique auréolé d’ascendance royale. Une chrifa, une vraie.

De là à séduire son cousin éloigné de mari ? Et le convaincre, à 44 ans, de sauter – enfin – le pas ? Dans l’entourage, on confirme que sa famille a toujours été très proche du sérail. Si la mère, Latifa, n’a pas de sang royal, elle n’en demeure pas moins une figure incontournable de Dar Al Makhzen. À en croire certains, « le mariage entre l’une de ses filles avec un membre de la famille royale était un rêve de longue date »

D’ailleurs, selon des proches de la mariée, dont les langues commencent timidement à se délier, ses parents l’auraient toujours traitée “comme une petite princesse, et ce depuis sa plus tendre enfance”. Epouser une altesse royale serait un rêve qu’Oum Keltoum aurait, elle aussi, nourri depuis longtemps en secret.

Une éducation de jeune fille rangée

Née le 3 février 1987, Oum Keltoum est la benjamine de la famille Boufarès. De ses deux grandes sœurs, Abla (qui porte le nom de la mère de Hassan II) et Oum El Ghait, on ne sait pas grand-chose, si ce n’est qu’elles sont déjà mariées et habitent toutes les deux à Rabat.

Incarnation parfaite de la jolie jeune fille rangée, Oum Keltoum passe une enfance dorée à Marrakech, dans la maison de fonction de son père, située face à la Koutoubia, depuis sa nomination au poste de gouverneur de Marrakech Médina en 1994. Primaire à l’école Auguste Renoir, lycée Victor Hugo, cette fille de haut fonctionnaire suit le parcours scolaire classique des jeunes filles marrakchies aisées.

À l’école, elle se fait plutôt réservée, autant sur les bancs de la classe que dans la cour de récréation. De l’aveu de l’une de ses anciennes camarades, « ce n’était pas le genre de fille à faire de vagues, même si elle s’est toujours distinguée des autres en étant un vrai modèle de bonne éducation ».

À part quelques après-midi à la maison entre amies, on ne sait rien de ses occupations, ni même de ses passions. Pas d’alcool, pas de cigarettes, Oum Keltoum n’est pas de ces adolescentes qui ont besoin de transgresser les interdits pour devenir qui elles sont. Quand on compte Lalla Soukaina, la petite-fille préférée de Hassan II,  parmi ses amies intimes, on apprend très jeune à soigner sa (bonne) réputation, et à cultiver le goût de la discrétion.

« Moi qui l’ai longtemps côtoyée à l’adolescence, je ne lui ai jamais connu de compte Facebook ni de présence particulière sur les réseaux sociaux », confie l’un de ses anciens amis.  De quoi faire taire les mauvaises langues qui prétendent que sa vie digitale aurait été « nettoyée » peu avant son union. De là à imaginer qu’elle savait au fond d’elle qu’elle serait un jour vouée à l’exposition ? Elle seule le sait.

Une étudiante comme les autres

Côté scolarité, idem. « C’était une élève normale, nous confie-t-on, de celles qui réussissent plutôt bien sans pour autant avoir besoin d’attirer l’attention ». Ce qui lui vaut un parcours académique tout ce qu’il y a de plus classique, sanctionné par un baccalauréat économique et social décroché vraisemblablement en 2006.

Vous avez dit banal ? A une époque où la normalité est une valeur à la mode, Oum Keltoum a, au contraire, tout pour plaire. Peu de temps après sa majorité, la jeune fille quitte pour la première fois son Marrakech natal, direction Paris. À l’instar de ses sœurs, qui ont elles aussi étudié dans la capitale française, la petite fille sage, désormais émancipée, élit domicile dans les beaux quartiers de la rive droite.

En femme moderne, elle fait le choix de vivre seule, dans l’intérieur feutré d’un appartement de l’avenue Pierre-Ier-de-Serbie dans le 8e arrondissement. Objectif : être le plus proche possible de l’European Business School (EBS), située à quelques encablures de là, où elle s’inscrit en tant qu’étudiante.

C’est dans cette école spécialisée dans l’enseignement des métiers du management qu’Oum Keltoum effectue la totalité de ses études supérieures. Comme la plupart de ses camarades, elle suit un programme généraliste sur 5 ans et opte, en fin de cycle, pour un master spécialisation marketing et communication. Là encore, un parcours sans fausse note. De quoi enchanter la famille royale.

Une officialisation soudaine

Du haut de ses 27 ans et de son 1m65, Oum Keltoum est décrite par ses amis (qui préfèrent rester anonymes) comme « une jeune femme très douce, indiscutablement gentille mais plutôt secrète, presque rêveuse. »Une nature discrète qui se prête idéalement à la tradition monarchique et au protocole.

Allure svelte, chevelure longue et ondulée, regard perçant… physiquement aussi, cette jeune femme que l’on dit très coquette a plus d’un atout pour séduire. Une multitude de qualités qui ont conduit le prince à succomber au charme de cette jeune femme « presque parfaite ».

Si personne ne connaît vraiment la date exacte de leur rencontre, le début de leur romance remonterait à 2012. Juste assez de temps pour apprendre à se connaître… et franchir le cap de l’officialisation. L’année dernière, presque à la même époque, la rumeur se répand : Moulay Rachid serait décidé à la demander en mariage. Même s’il n’en est rien, la nouvelle fait grand bruit, surtout dans la ville ocre.

Une longue année d’attente pour Oum Keltoum, puis tout s’accélère. En quelques semaines, la demande est faite et un communiqué diffusé par le ministère de la Maison royale, du Protocole et de la Chancellerie le 15 juin dernier vient officialiser leur union. Le tout ponctué par une cérémonie organisée dans la plus grande discrétion.

Contacté par TelQuel, le père d’Oum Keltoum précise que la conclusion de l’acte de mariage « n’était pas une décision prise de longue date, tout s’est fait très vite. » Passé les formules de remerciement de rigueur à nos longues félicitations, Moulay Mamoun laisse enfin exprimer sa joie.

À la question « Êtes-vous heureux ? », l’ancien wali de Marrakech répond avec émotion : « Evidemment ! Quel père ne serait pas heureux de marier sa fille ! C’est un très grand honneur pour moi et pour toute la famille. » Une famille déjà très unie, qui entre désormais dans l’histoire, en attendant le mariage princier qui, dit-on, devrait avoir lieu à Marrakech, peu après ramadan.

Profession de Moulay Rachid : frère du roi

C’est une semaine bien remplie pour Moulay Rachid. Le prince s’est marié le 15 juin et a fêté son 44e anniversaire le 20. Mais qui est-il et que pèse-t-il dans le royaume de son frère ?

Moulay Rachid n’a pas de statut particulier, et la Constitution ne le mentionne nulle part. Son pouvoir et ses missions, il les tient de son frère, qui peut le mandater pour le représenter au Maroc comme à l’étranger. C’est ce qu’il explique lui-même dans la seule et unique interview qu’il ait jamais accordée à un média.

« Je suis au service de Sa Majesté, à sa disposition à tout moment pour accomplir n’importe quelle mission qu’elle pourrait me confier. C’est ma mission fondamentale auprès de Sa Majesté, et toutes les autres occupations restent secondaires par rapport à elle”, confie-t-il au magazine saoudien Arrajoul (L’Homme) en juillet 2001.

On l’aura compris, frère du roi, c’est un job à plein temps : missions diplomatiques à l’étranger, accueils de délégations étrangères, visites de têtes couronnées en convalescence, funérailles de chefs d’Etat, porte-étendard du Maroc auprès de la FIFA pour défendre la candidature du Maroc pour la Coupe du Monde 2010…

Le prince fait dans les public relations. “Mohammed VI a été formé pour être roi et assumer des responsabilités, Moulay Rachid pour être une figure publique et représenter la monarchie”, analyse un ancien camarade de collège du roi.

Moulay Rachid est aussi d’une loyauté absolue envers sa famille. “Il est fasciné par Hassan II et considère son père comme un héros à l’instar de n’importe quel fils”, nous confiait, pour les besoins d’un précédent dossier, le journaliste Khalid Jamaï, qui a longuement côtoyé le prince. Tout comme le défunt roi, son fils rend des visites de courtoisie régulières à tous les membres de la famille royale, tantes, sœurs, cousins et cousines. Il va même jusqu’à demander de leurs nouvelles lorsqu’ils sont à l’étranger.

Dans le civil, Moulay Rachid est féru de golf, d’équitation et de chasse. Il a pris en main, entre autres, les rênes du Trophée Hassan II de golf de Dar Essalam. Il maîtrise l’anglais et l’espagnol, en plus du français et de l’arabe, est proche des émirs du Golfe, ainsi que de plusieurs personnalités politiques mondiales. Il a aussi forgé une solide amitié avec le nouveau roi d’Espagne. Autant de critères qui ont fait de lui la voix de son frère.

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Mamoun Boufares, le beau-père du prince

Mamoun Boufarès fait partie de la famille des Alaouites.  
Il est aussi un pur produit du ministère de l’Intérieur, 
qui a fait le plus clair de sa carrière à Marrakech.

A Marrakech, on continue encore à l’appeler Moulay Mamoun. C’est que l’homme est un notable de la ville ocre où il a vu le jour et grandi, avant de la quitter brièvement pour des études et d’y retourner en tant qu’agent d’autorité pendant près de quatre décennies.

La famille Boufarès est très connue dans la ville. Moulay Ahmed, son père, y était Nadhir (administrateur) des Habous. Sa mère, Lalla Khadija, n’est autre que la sœur de Mohammed V. Il est leur seul enfant. “C’est un ami d’enfance. Nous nous sommes séparés pour nous retrouver plus tard, et sommes toujours en contact”, témoigne Omar Jazouli, ancien maire de Marrakech.

Au moment où notre interlocuteur opte pour des études d’expert comptable en France, Mamoun Boufarès choisit de faire carrière dans l’administration. Son bac en poche, il intègre l’école des cadres de l’Intérieur à Meknès. Après sa formation, il est nommé caïd à Marrakech et gravit les échelons pour atteindre le grade de gouverneur en 1994, puis wali dès 2005.

Hassan II m’a dit…

Le défunt roi avait beaucoup d’estime pour son cousin Moulay Mamoun. “Quand tu ne seras plus là, on dira du bien et du mal de toi. Mais n’oublie jamais de prendre soin de ta ville et de ses habitants”, lui aurait dit Hassan II en guise de testament, comme le rappelle l’un de ses plus anciens amis.

Celui qui allait devenir le beau-père de Moulay Rachid ne se le fait pas répéter deux fois. “Il est affable, sérieux, très droit et proche des démunis”, affirme Omar Jazouli, qui a travaillé à ses côtés pendant très longtemps.

Moulay Mamoun quitte Marrakech en 2003, lorsqu’il est nommé gouverneur rattaché au cabinet du ministre de l’Intérieur. Mais il ne coupe pas pour autant le cordon ombilical avec sa ville natale. Même quand il est promu, en 2005, wali rattaché à l’administration centrale. “La médina l’obsède et il a tout fait pour la valoriser. C’est à lui, en grande partie, qu’on doit le réaménagement de la place Jamaâ El Fna”, nous explique un journaliste marrakchi.

Moulay Mamoun, c’est aussi un homme qui s’est beaucoup impliqué dans le rayonnement sportif de la ville, en assurant, entre autres, la présidence exécutive du Kawkab, le club local de football, secondant ainsi un certain Mohamed Médiouri. “C’était un as de la gestion qui traitait bien son monde, mais qui était très ferme”, se souvient un journaliste sportif. D’ailleurs, c’est sous sa direction que le Kawkab a remporté, dans les années 1990, ses plus prestigieux titres.

L’Intérieur version old school

“C’est toujours le même homme généreux, que l’on peut aisément retrouver, des après-midi durant, dans le bazar de l’un de ses amis à Guéliz”, affirme Abdellatif Abouricha, journaliste à Marrakech. Parmi les qualités que l’on reconnaît à Mamoun Boufarès, son sens de l’amitié. “Il s’est récemment rendu aux funérailles de l’épouse d’un journaliste”, affirme une source sur place, qui doute que ses nouveaux liens avec la famille royale lui montent à la tête.

Mais Moulay Mamoun ne fait pas l’unanimité chez les Marrakchis. “A l’image de la vieille garde de l’Intérieur, ce n’est pas une éminence grise. C’est d’abord un homme d’autorité doublé d’un ould dar El Makhzen pur jus”, réagit un homme d’affaires.

Moulay Mamoun n’aurait pas fait non plus que des heureux lors de son passage, en tant que wali, à l’administration centrale de l’Intérieur (2005-2007). A cette époque, il était chargé de préparer les visites de Mohammed VI dans différentes villes du pays. “Il s’emportait pour le moindre petit détail et pouvait devenir sans pitié pour la plus petite faute”, se souvient un cadre du ministère de l’Intérieur. Et à Marrakech, il lui arrivait tout simplement de chasser, pour un oui ou pour un non, n’importe quel délégué de ministère.

A la retraite depuis 2007, Moulay Mamoun passe désormais son temps entre Marrakech et Rabat où résident ses deux filles, Oum El Ghait et Abla. Avec le mariage unissant sa cadette à Moulay Rachid, il sera sûrement plus présent dans la capitale.

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