John Wells signe une réflexion pointue sur la solidarité et le vivre-ensemble. Dans l’Amérique profonde et puritaine, dans les vastes prairies de l’Oklahoma, le décès du père oblige la famille à se réunir autour d’une mère (Meryl Streep, plus vraie que nature) autoritaire, aigrie par la maladie et mauvaise par nécessité. Le repas des funérailles est une bonne occasion pour elle de tout déballer devant ses trois filles, d’afficher sa méchanceté et de se venger du père à titre posthume, parti sans prévenir. L’aînée des filles (Julia Roberts, sublime et inoubliable, loin de Pretty Woman) essaie de jouer son rôle de substitut à une mère tantôt dépressive, tantôt négligée, face à deux sœurs, l’une légère mais pas débile, l’autre que tout le monde prend pour une attardée mais qui finira par se révolter. L’aînée, abandonnée par son mari pour une plus jeune, destinée à devenir comme sa mère, est autoritaire avec ses sœurs, avec toute la famille…au point d’en perdre tous ses repères.
La famille en question
Ici, la notion de famille à l’américaine prend un sacré coup. Si on se réunit c’est pour se dire ses quatre vérités, et déguerpir aussitôt arrivés. Il reste la vieille, que tous détestent et dont personne ne veut plus s’occuper. Il faut dire qu’elle a l’art de faire le vide autour d’elle avec ses confessions déchirantes. Elle finira par tomber entre les bras de l’employée de maison, seule rescapée de la débandade. Est-ce un rappel aux Américains que le noyau familial est le socle de la société ? Traité de façon négative, le sujet est abordé de façon inverse : agir comme cette famille, c’est agir contre la morale.
Si la définition d’un suspense est de vous tenir cloué à votre fauteuil tout au long de la projection, eh bien Un été à Osage County est un suspense, même s’il n’y a ni meurtre ni flic. Au point qu’on s’assoit presque à la table du repas avec cette famille que le destin a réunie, mais dont les membres se déchirent. Et on se déchire avec eux. Un grand film dont les images magnifiques rappellent celles de Nestor Almendros (Les moissons du ciel) ou Sven Nykvist (tous les Bergman).
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