Dans les années 80, alors que Zakaria Boualem n’était qu’un gamin écervelé torturant les portes des garages de Guercif à coups de reprises de volée dévissées, l’idée la plus communément admise était que la politique était une source de problèmes. Dans la famille, le mot même de siyassa était prononcé à voix basse, et généralement pour signifier qu’il fallait s’éloigner de cette malédiction avant qu’une pluie mauvaise ne s’abatte sur les têtes. Rien d’étonnant dans ces conditions à constater que la carrière d’électeur de Zakaria Boualem ait débuté par une série retentissante d’actes d’abstention. En parallèle et moyennant finances, notre héros s’est fait une spécialité de geindre en public sur sa situation de locataire du plus beau pays du monde. Rappelons qu’un locataire est un individu qui s’acquitte de ses impôts sans espérer de service public en retour – seule l’occupation du sol est facturée – et menacé d’expulsion au moindre grognement jugé antipatriotique. Ces réflexions n’avaient rien de politique (l’art du possible et tout le baratin), c’était juste l’application d’un minimum de logique. Mais en 2011, la situation a bien changé, et après la hamla hystérico-patriotique de juillet, blad skyzo vous propose fièrement la zerda burlesque et sans pitié de novembre. Ils reviennent, c’est effrayant… Ne pas voter, ce n’est plus s’abstenir, c’est boycotter et ça change tout. Nous sommes un pays où ne rien faire est devenu un acte d’engagement louche. Ya Salam… Au lieu de s’estimer heureux qu’on supporte leurs pénibles contorsions depuis des années, ils nous reprochent de ne pas y participer.
Ce début de campagne est marqué par une série de vidéos diversement saugrenues implorant sur tous les tons Zakaria Boualem de participer aux élections (il est devenu important soudain). Encore une fois mûs par la conviction de devoir sauver la patrie en péril, les cyberpatriotes sont tous sortis de leur boîte en même temps pour dire la même chose, c’est impressionnant. En général, vous pouvez faire le contraire de ce qu’ils proposent sans trop réfléchir, c’est un truc qui marche assez bien… Mais cette page ne doit pas être comprise comme un appel au boycott, hacha. Zakaria Boualem se propose au contraire de vous éclairer dans votre choix, en commençant par vous expliquer qu’il règne une terrible méprise sur la nature du terme parti politique. Il ne s’agit pas d’un nom mais d’un participe passé désignant ceux qui sont partis, qui ont abandonné, déguerpi, moralement, déserté…. En arabe, il ne faudrait pas traduire les partis par al a7zab mais par li mchaw, évidemment. C’est Amine Bennis, l’ami de Zakaria Boualem, qui lui a précisé ce point dans un extraordinaire instant de lucidité. Du coup, tout devient plus logique. Une simple question comme “fine machi” devient un programme politique, une réponse du genre “ma machi fine” vous propulse dans le camp des nihilistes tandis que “el ghadi b3id” de Lemchaheb est visiblement un manifeste extrémiste. Le même Amine Bennis, décidément très inspiré, a décidé de fonder un parti politique pour concurrencer les anciens sur leur terrain de prédilection. Le Parti Ultra Vide, c’est de lui qu’il s’agit, n’a pas de programme, pas de vision, pas de stratégie. Il ne propose rien et ne mettra rien en œuvre pour y parvenir. Quand il n’applique pas à la lettre la politique de la chaise vide, le PUV se réunit à huis clos pour exclure les illuminés qui tenteraient de faire quelque chose. Zakaria Boualem est formel : ce parti est le plus honnête de tous. Mieux encore, il est le seul à même d’atteindre l’intégralité de ses objectifs. Voilà, c’est dit. C’est tout pour cette semaine, désolé pour cette chronique vide de sens, et merci.