Jouahri appelle à revoir le modèle de développement du Maroc

Abdellatif Jouahri a présenté, le 29 juillet, son rapport annuel 2015 à Mohammed VI. Il y dépeint un pays qui a réalisé des avancées, mais dont le rythme de progrès est en baisse. Détails.

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Le Maroc doit revoir son modèle de développement. C’est par cette phrase que Abdellatif Jouahri résume la situation actuelle du royaume, le 29 juillet au palais royal de Tétouan lors de la présentation du rapport annuel de la banque centrale sur la situation économique, monétaire et financière au titre de l’exercice 2015. Le pays a « besoin de réexaminer son modèle de développement et la manière avec laquelle sont conçues et mises en œuvre ses politiques publiques », explique-t-il. Et pour cause, Jouahri dépeint un Maroc qui a certes enregistré de grandes avancées, mais dont le rythme de progrès est en baisse.

Des finances au beau fixe… sauf pour l’endettement

En 2015, la croissance globale est ressortie à 4,5%, portée par une production céréalière record. C’est ce qui a sauvé une année marquée, comme avancé à plusieurs reprises, par la poursuite de l’atonie des secteurs non agricoles, dont la valeur ajoutée a progressé timidement (2,1% depuis 2013, contre une moyenne de 4,7% entre 2003 et 2012). Cela a eu un impact sur le marché du travail. « Après une création de 129 000 postes en moyenne entre 2003 et 2014, l’économie nationale n’a généré que 33 000 emplois en 2015 », relève le gouverneur de Bank Al-Maghrib. Ce dernier revient également sur les équilibres macro-économiques, dont le redressement observé depuis 2013 s’est consolidé avec un allègement du déficit budgétaire à 4,4% du PIB en raison de l’amélioration des recettes fiscales, mais surtout l’allègement de plus de la moitié de la charge de compensation. Le déficit du compte courant a poursuivi, lui aussi, son atténuation, revenant à 1,9% du PIB après avoir atteint 9,5% en 2012. Cependant, l’endettement public a, quant à lui, enregistré une envolée inquiétante. Le ratio de la dette du Trésor au PIB ayant augmenté à 64,1% et celui de la dette publique à 80,4%.

Pour un nouveau modèle de développement

« Ces réalisations sont, certes, des acquis précieux qui gagneraient à être consolidées, mais force est de constater cependant que le rythme du progrès s’est inscrit ces dernières années dans une tendance baissière », note-il sans détour. Et d’ajouter : « Malgré la conjonction de plusieurs facteurs favorables aussi bien internes qu’externes, l’atonie des activités non agricoles et de l’emploi se poursuit, notre tissu productif se fragilise et les progrès sur le plan du développement humain restent en deçà des attentes et faibles en comparaison internationale ». Ce qui pousse le gouverneur de la banque centrale à s’interroger sur les politiques, les stratégies et sur la capacité du modèle de développement actuel à continuer à répondre aux attentes et aspirations des marocains. Jouahri tranche en avançant que « le modèle basé sur la demande intérieure comme moteur de la croissance qui a prévalu jusqu’à présent a montré ses limites. »  Le problème posé, le Wali propose de provoquer une série de ruptures au niveau de la conception et de la mise en œuvre des politiques publiques. « Nous estimons que pour un meilleur encadrement du développement économique et social de notre pays, la mise en place d’une planification stratégique serait appropriée. Celle-ci permettrait de mieux répondre aux exigences d’une vision globalisée et cohérente, avec une priorisation des objectifs et une optimisation dans l’utilisation des ressources. »

Jouahri ne manque pas l’occasion de rappeler que les rivalités politiques ne doivent pas être prioritaires sur le développement du pays. « Les enjeux les plus stratégiques pour le pays doivent être placés au-dessus des considérations d’ordre politique ou catégoriel », conclut-il.

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