Torture: vers un mécanisme national de prévention

Le Maroc a déposé, à la veille du Forum mondial sur les droits de l’Homme de Marrakech, les instruments de ratification du protocole facultatif à la torture.

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En matière de lutte contre la torture, le Maroc s’apprête enfin à passer de la théorie à la pratique. Trois jours avant l’ouverture, ce jeudi 27 novembre à Marrakech, du Forum mondial des droits de l’Homme, le royaume a déposé les instruments de ratification du Protocole facultatif à la Convention internationale de lutte contre la torture ou traitements inhumains et dégradants. Un protocole facultatif adopté par le gouvernement en 2011. Il ne restait plus qu’à déposer les instruments de ratification.

Ce dépôt avait été recommandé en 2012 par le Centre national pour les droits humains (CNDH) suite à son rapport sur l’état des pénitenciers marocains. Il sera accompagné, par la création, d’ici fin 2015, d’un Mécanisme national de prévention (MNP), selon Driss El Yazami, président du CNDH.

Ce mécanisme est censé procéder au suivi de l’application de la convention, et permettre d’effectuer des visites régulières − et impromptues − sur les lieux de détention, l’un des moyens « les plus efficaces pour prévenir la torture et autres formes de mauvais traitements », selon l’Association de prévention de torture (APT).

« La création de telles structures, existant dans 53 pays, contribue à la réduction de 90 % des cas de torture et autres peines de traitements cruels », confirme El Yazami à la MAP. Et d’ajouter que « ce mécanisme sera habilité à effectuer des visites dans tous les établissements de privation de liberté et à élaborer sur l’état des droits de l’Homme ».

Le Maroc parmi « les pays prioritaires » selon Amnesty

Une étape de franchie, donc, à point nommé. Juste avant l’ouverture du Forum mondial des droits humains à Marrakech, qui est boycotté par plusieurs associations marocaines, et quelques mois après le lancement (le 13 mai) de la campagne « Stop Torture » d’Amnesty International qui classait le Maroc parmi « les pays prioritaires ». L’ONG avait même publié à cette occasion une synthèse dans laquelle elle affirmait qu’elle « continue de recevoir des informations faisant état d’actes de tortures ou d’autres mauvais traitements, en particulier durant les gardes à vue et pendant les interrogatoires après l’arrestation de suspects par la police ou la gendarmerie ».

Dans sa synthèse, l’ONG avait également reproché au Maroc son inaction judiciaire face à la torture et avait mis l’accent sur les cas de 18 personnes arrêtées lors d’une manifestation en décembre 2012 au quartier Sidi Ben Youssef à Marrakech, qui auraient été torturées. Un autre cas soulevé par Amnesty International est celui d’Ali Aarrass, qui aurait été torturé dans une prison à Salé.

Des conclusions contestées par le gouvernement qui a affirmé que « les rapports que publient les ONG au sujet de la torture contiennent des résultats injustes dans la mesure où elles ne prennent pas en considération les réformes et les avancées que connait le Maroc sur le terrain ». Et de préciser « que les deux cas cités par Amnesty International sont des affaires qui sont encore dans les mains de la justice et qu’aucune preuve de torture à l’encontre de ces personnes n’existe ».

Dans un autre contexte, le comité contre la torture de l’Organisation des Nations unies avait donné, au mois de mai, 90 jours au Maroc pour ouvrir une enquête « impartiale » et « approfondie » sur les allégations du Belgo-marocain Ali Aarrass. Suite à cela, le ministre de la Justice avait ordonné d’ouvrir des enquêtes approfondies sur les cas de torture au Maroc et avait affirmé que « toute personne impliqué dans ces affaires sera sévèrement sanctionnée. » 

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