Nos équipes n’ont pas de mots pour décrire la situation plus que catastrophique à laquelle les patients et les professionnels de santé restent confrontés”, a indiqué, en vidéo depuis Jérusalem, Richard Peeperkorn, représentant de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans la bande de Gaza et en Cisjordanie occupée.
Mercredi, une mission menée par l’agence onusienne a pu se rendre dans deux hôpitaux, Al-Chifa et Al-Ahli, dans le nord de la bande de Gaza, ravagée par les bombardements de l’armée israélienne, menés en représailles à une attaque sans précédent du mouvement palestinien Hamas sur le sol israélien le 7 octobre.
L’OMS avait déjà évoqué un “bain de sang” à l’hôpital Al-Chifa, le plus important de Gaza, visé le mois dernier par une longue opération de l’armée israélienne.
L’hôpital Al-Ahli était, depuis, le seul établissement du nord de la bande de Gaza où des interventions chirurgicales étaient possibles, mais son directeur a assuré mardi que plus aucune opération n’y était pratiquée depuis un raid israélien.
Selon la mission, l’établissement Al-Ahli, qui était il y a encore deux jours “débordé par des patients requérant des soins d’urgence”, est désormais une “coquille vide”, a assuré Peeperkorn, qui s’exprimait en vidéo devant des journalistes à Genève.
“Il n’y a plus aucun lieu d’opérations en raison du manque de carburant, d’électricité, de matériel médical et de personnels de santé (…). Ça a totalement cessé de fonctionner”, a-t-il ajouté.
Selon lui, seuls neuf des 36 hôpitaux de Gaza fonctionnent encore en partie et tous se situent dans le sud du territoire palestinien assiégé. “Il n’y a plus d’hôpital en état de marche dans le Nord”, a-t-il ajouté.
Les hôpitaux, en théorie protégés par le droit humanitaire international, ont été plusieurs fois visés par des frappes israéliennes depuis le 7 octobre.
L’armée israélienne accuse le Hamas d’avoir construit des tunnels sous les hôpitaux et d’utiliser les établissements de santé comme des centres de commande, une accusation rejetée par le Hamas. Interrogé sur ce point, Peeperkorn a assuré que l’OMS n’était pas “en mesure de vérifier la façon dont chaque hôpital était utilisé”.
Le but de la mission était de fournir du carburant, mais, faute de garanties sécuritaires, seuls des médicaments et du matériel médical ont pu être acheminés. “Sans carburant, sans équipes (…), les médicaments ne changeront rien et l’ensemble des patients mourront lentement et dans la douleur”, a prédit le représentant onusien.
L’hôpital Al-Ahli ne compte plus que 10 personnels de santé alors que 80 patients sont réfugiés dans une église située sur les terrains bordant l’établissement et dans l’unité d’orthopédie.
Sean Casey, un coordinateur de l’équipe d’urgence de l’OMS qui participait à la mission, a décrit des corps enveloppés dans des sacs de plastique s’entassant dans la cour de l’hôpital Al-Ahli, alors que retentissaient des détonations d’armes automatiques.
Dans l’église, “nous avons assisté à une scène vraiment insoutenable”, a-t-il ajouté en vidéo depuis Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, décrivant près de 30 patients, dont des enfants et des blessés graves, demandant de l’eau plutôt que des soins. “C’est un endroit où les gens attendent de mourir”, a-t-il assuré, réitérant les appels onusiens à un cessez-le-feu.
“Je pense que c’est trop tard”, a-t-il toutefois estimé. “Partout où nous allons, les gens nous demandent de la nourriture”, a déclaré Sean Casey. “Même dans les hôpitaux, des gens avec des fractures ouvertes et en sang nous demandent de la nourriture. Si ce n’est pas un signe de désespoir, je ne sais pas ce que c’est”, a-t-il ajouté.
Des tractations sont en cours jeudi pour tenter d’arracher une trêve dans la guerre entre Israël et le Hamas, provoquée par l’attaque du 7 octobre qui a fait environ 1140 morts selon un décompte de l’AFP basé sur le bilan israélien.
Jurant de détruire le mouvement islamiste, qui avait lancé son attaque depuis Gaza, Israël a bombardé sans relâche le territoire palestinien et mené une offensive terrestre d’envergure, provoquant la mort de plus de 20.000 personnes, majoritairement des civils, selon les chiffres du Hamas.