France : le parquet antiterroriste demande un procès pour 16 membres d'un groupe anti-musulmans

Empoisonner de la nourriture halal ou "tuer 200 imams radicalisés"... Le Parquet national antiterroriste (Pnat) a requis un procès devant le tribunal correctionnel pour treize hommes et trois femmes soupçonnés d'avoir préparé des actions violentes visant les musulmans en France.

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Une salle a été construite spécialement au Palais de justice de Paris pour accueillir le procès des attentats du 13-Novembre. Crédit: Thomas Coex / AFP

Dans ses réquisitions datant de mardi, dont l’AFP a eu connaissance, le Pnat a proposé une requalification des faits, initialement considérés comme criminels, en faits délictuels, ce qui fait encourir une peine moins longue.

« En dépit de la gravité des projets proposés », le Pnat a expliqué à l’AFP avoir requis ce procès en correctionnelle après avoir appliqué sa « politique pénale habituelle (…) lorsque les projets d’action violente ne sont pas pleinement finalisés ». La décision finale appartient au juge d’instruction.

Ces seize membres du groupe clandestin Action des forces opérationnelles (AFO) sont principalement soupçonnés d’association de malfaiteurs terroriste.

Il leur est reproché d’avoir, à des degrés divers, cherché des armes, planifié d’utiliser les femmes du groupe, dissimulées sous des niqabs, pour empoisonner de la nourriture halal en supermarché avec un composant de la mort-aux-rats.

Parmi les nombreuses cibles évoquées dans des projets parfois à peine déclaratifs: « tuer 200 imams radicalisés », viser le rappeur Médine ou encore le prédicateur Tariq Ramadan.

Dans un document, la cellule francilienne d’AFO, particulièrement active, « évoquait clairement la prise d’assaut d’une mosquée » de Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine) dont la porte devait +exploser+ et qui pouvait être encerclée de +tireurs à longue distance+ », détaille le ministère public.

Nombre des mis en cause, âgés de 37 à 74 ans, ont un passé militaire ou ont décrit un attrait pour l’armée. Au gré des professions actuelles ou passées déclinées par ces personnes, on retrouve un antiquaire, un téléopérateur de nuit auprès des taxis G7, un consultant en ressources humaines, un restaurateur, un artisan, une comptable, un chômeur ou un enseignant en lycée…

Des armes à feu et des milliers de munitions avaient été trouvées lors de perquisitions, y compris des éléments entrant dans la fabrication d’explosif de type TATP.

Les membres les plus radicaux d’AFO agissaient sous pseudo: Phoenix, Attila, Flamme ou encore Richelieu pour le chef présumé du groupe, Guy S., 69 ans, retraité de la police nationale. « Il conteste fermement avoir nourri un quelconque projet d’action violente ainsi que plus généralement les faits de terrorisme qui lui sont reprochés », a réagi son avocate Me Lucile Collot.

Me Margaux Durand-Poincloud, qui défend un homme alors diplomate à l’ambassade de France au Salvador, a estimé que « la qualification criminelle des faits a toujours semblé audacieuse le concernant. Les réquisitions sont un retour à plus de modération. »

Les mis en cause ont « largement contesté avoir eu personnellement l’intention de mener des actions violentes », note le Pnat.

Ils ont décrit AFO comme un club de « formation au survivalisme, au plus comme une structure patriotique destinée à venir au soutien des forces de l’ordre en cas de délitement de la société ».

Mais pour le Pnat, ce « groupement structuré, hiérarchisé, clandestin » avait pour « finalités réelles (…) de préparer ses membres à l’affrontement avec la communauté d’origine arabo-musulmane (…) et d’autre part de préparer des attaques de nature terroriste à l’encontre de symboles ou membres de cette population ».

Le parquet antiterroriste affilie ce groupe à la thèse du « grand remplacement » et le place dans la tendance accélérationniste, qui vise à « précipiter un affrontement entre communautés », en l’espèce les musulmans, « désignés comme cibles ».

Plusieurs groupes affiliés à l’ultradroite ont été jugés récemment à Paris: près d’une dizaine de personnes affiliées au groupe Organisation des armées sociales, dont sa principale figure Logan Nisin, ont été condamnées fin 2021 à des peines allant jusqu’à neuf ans d’emprisonnement.

Concernant les Barjols, soupçonnés d’avoir fomenté un projet d’assassinat d’Emmanuel Macron en 2018, neuf des treize prévenus ont été relaxés en février à Paris. Un procès en appel est prévu.

Une instruction antiterroriste est toujours en cours concernant un autre groupe, Honneur et nation, autour du complotiste Rémy Daillet.

Enfin, quatre hommes appartenant à la mouvance néonazie seront jugés en juin par la cour d’assises des mineurs spéciale à Paris, une première.

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