Pour la DIDH, les positions de cette organisation exprimées dans son rapport annuel publié fin mars “procèdent d’une politique systématique, en ce sens qu’elle ne prend pas le recul nécessaire vis-à-vis du conflit du Sahara marocain, traité dans le cadre du Conseil de sécurité de l’ONU, s’immisce dans les affaires de la justice et se trouve dans l’incapacité d’apporter des preuves concernant ses allégations”.
La DIDH précise, à cet égard, que le rapport d’AI a “évoqué abusivement la liberté d’expression dans des affaires soumises à la justice, sans présenter de données relatives à l’atteinte à ladite liberté. Aucun argument n’a été présenté aussi concernant la question de la liberté d’association, abordée également de manière abusive dans le même texte”.
Procès d’Omar Radi
Les reproches d’AI concernent notamment le procès mené à l’encontre du journaliste Omar Radi, condamné à six ans de prison ferme pour espionnage et viol. L’ONG critique “un procès qui n’était pas conforme aux normes internationales d’équité”, notant que Radi “n’a pas pu exercer son droit de prendre connaissance de tous les éléments présentés contre lui et de les contester éventuellement”.
“Cet exemple précisément, avait fait l’objet de conclusions préliminaires relatives à une observation du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH), qui avait conclu, dans un rapport, entre autres, que la condition de publicité du procès avait été respectée”, se défend la DIDH.
Pour la Délégation, “la position d’Amnesty International n’est rien d’autre qu’une ingérence politique dans une action qui relève de la souveraineté nationale et qui la place en contradiction avec ce que stipule cette même organisation, depuis près d’un quart de siècle, dans son manuel d’observation du procès équitable”.
“Dans ce manuel, AI affirme que “l’évaluation de l’équité d’un procès est un processus complexe dans lequel entrent en jeu de nombreux paramètres. Chaque cas est singulier et doit être examiné sur le fond et de manière globale. En général, il s’agit de déterminer si la procédure judiciaire se déroule conformément à la législation nationale””, ajoute l’instance nationale.
Liberté de réunion
Selon AI, les autorités marocaines auraient également réprimé “à quatre reprises au moins, des manifestations pacifiques organisées par des personnes qui réclamaient une amélioration de leurs conditions de travail, et invoqué le décret-loi sur l’état d’urgence sanitaire pour rejeter les revendications de travailleuses et de travailleurs”.
“En avril, la police a arrêté arbitrairement 33 enseignant·e·s qui manifestaient pacifiquement à Rabat contre des mesures en matière d’éducation qu’ils jugeaient néfastes pour l’enseignement public. Les forces de police ont dispersé par la force les manifestant·e·s alors que ceux-ci respectaient les mesures de sécurité liées à la pandémie de Covid-19, comme la distanciation physique. Les enseignant·e·s ont été remis en liberté provisoire au bout de 48 heures, mais ils restaient inculpés d’incitation à un attroupement non armé sans autorisation, de violation de l’état d’urgence sanitaire et d’outrage envers des fonctionnaires”, poursuit le rapport de l’organisation internationale.
D’après la DIDH, ce rapport a “ignoré qu’une catégorie des professionnels de l’enseignement a organisé des rassemblements et manifesté des dizaines de fois, depuis plus de deux années, durant l’état d’urgence sanitaire”, ajoutant qu’“en évoquant la dispersion par la force des manifestants, le document ne présente même pas un élément sur la manière, le cadre et les dégâts de cette action, tout en essayant, en même temps, de renier le droit légitime des autorités compétentes en matière de préservation de l’ordre public, selon les normes internationales, (…) la Délégation note que la même logique encadrant ce rapport est appliquée à la question de l’arrestation des manifestants et leur présentation à la justice, comme s’il s’agissait d’une violation flagrante, alors que le document reconnaît ouvertement qu’ils ont été remis en liberté provisoire au bout de 48 heures”.
Torture et autres mauvais traitements
“Des personnes ont été détenues dans des conditions extrêmement dures, notamment avec un placement à l’isolement prolongé et pour une durée indéterminée, en violation de l’interdiction de la torture et des autres mauvais traitements”, souligne le rapport d’AI.
La DIDH a qualifié ces propos d’“allégation contestable”, indiquant que “le rapport ne précise pas la source de ces informations et les moyens de leur obtention, ainsi que le nombre de cas recensés”.
Pour la Délégation interministérielle, “les auteurs du rapport étaient censés prendre connaissance de l’action du Mécanisme national de prévention de la torture, des rapports de la plupart des organisations des droits humains à ce sujet et dont la majorité représentent des partenaires essentiels dans les projets de promotion des droits des détenus”.
Droit au respect de la vie privée
Selon le rapport d’Amnesty International, les autorités marocaines auraient aussi “largement fait usage du logiciel espion de surveillance Pegasus mis au point par l’entreprise NSO Group. L’outil de surveillance a été utilisé contre des journalistes, des militants·e·s et des personnalités politiques de nationalité française et marocaine”.
La Délégation de Benyoub a, quant à elle, rejeté les accusations de l’ONG internationale. “La DIDH ne peut que constater la contradiction existant entre les allégations d’AI et sa méthodologie en matière de mener des enquêtes de “manière systématique et neutre” et “de révélation des violations des droits humains avec précision, célérité et détermination”, comme elle le stipule dans ses Statuts amendés en 2019”, a-t-elle dénoncé.
Situation au Sahara
Dans son rapport, Amnesty International s’est alignée en faveur de certains séparatistes du Polisario, résidant au Maroc, notamment l’“activiste et militante” Sultana Khaya.
Pour AI, “des membres des forces de sécurité ont fait irruption à trois reprises au moins en 2021 au domicile de Sultana Khaya. Le 15 novembre, des membres des forces de sécurité se sont introduits chez elle, l’ont violée et ont agressé sexuellement ses deux sœurs et sa mère âgée de 80 ans”.
De son côté, la DIDH a voulu clarifier que “la Commission régionale des droits de l’Homme avait tenté, à 17 reprises entre décembre 2020 et juillet 2021, d’auditionner cette femme”, Khaya n’ayant réagi qu’une seule fois à ces demandes.
“Il n’a fallu que peu de temps pour mettre un terme au discours trompeur de la prétendue “activiste sahraouie”, après s’être assuré de son adhésion évidente au polisario, avec sa tenue militaire”, conclut la même source.
(avec MAP)