Cette semaine, hélas, le Boualem n’a rien de bien brillant à vous raconter. Il a tout d’abord songé à vous parler des élections en France, car il lui semblait bien qu’il tenait là un sujet plein de passion. Il a donc plongé dans ce thème avec le sérieux qu’on lui connaît et il en est revenu un peu sonné, le bougre.
“Le Boualem a plongé dans les élections en France et il en est revenu un peu sonné, le bougre. Il aurait peut-être dû s’équiper d’une sorte de scaphandre numérique pour se protéger de la masse spectaculaire de boue charriée”
Un rapide tour de la question a eu pour effet immédiat une poussée de désespoir envers la nature humaine. Peut-être qu’il aurait dû s’équiper d’une sorte de scaphandre numérique pour se protéger un peu de la masse spectaculaire de boue charriée par cette campagne affreuse. La violence des débats, la partialité unanime des médias, les manipulations, tout cela l’a tellement dégoûté qu’il en est même arrivé à regretter nos campagnes électorales à nous, avec nos petites icônes Windows 97, nos casquettes de pétanque, nos vidéos lunaires et nos festins.
Au moins, ici, on rigole à gorge déployée, voilà une réalité incontestable. Là-bas, c’est sinistre, les amis. Les réseaux sociaux sont le théâtre d’une bataille rangée dont on a du mal à imaginer qu’elle puisse rester numérique. Les races, les musulmans, les étrangers, la protection de l’identité et des frontières, voici les obsessions de ce qu’on ne peut même plus qualifier de débats. Voilà pour Internet. Mais sur les chaînes télé, c’est encore pire, le grand matraquage, et même nos référendums à nous, contiennent plus de pluralité que les plateaux des émissions.
Zakaria Boualem a donc décidé d’oublier ce sujet, car il dispose de cette liberté, tout simplement. Il s’est ensuite connecté au noble site du Matin du Sahara, haut lieu d’une sorte de patriotisme journalistique qui, à ce moment précis de sa journée, l’a comblé de félicité. Loin des débats ignobles de la politique française, ce journal baigne dans une ambiance surannée aussi rassurante que l’épaule d’une maman ou un biscuit Henry’s trempé dans du thé.
Il suffit de prendre une phrase, au hasard, pour sentir les bienfaits d’une anesthésie bienfaitrice dans ce monde en fusion. La voilà, sans plus attendre : “Aziz Akhannouch a affirmé, à cet égard, que le gouvernement ne ménagera aucun effort pour assurer les moyens du plein succès de cette opération d’envergure nationale et son organisation dans les délais impartis, conformément aux Hautes Instructions Royales. Il a souligné l’importance des résultats du prochain recensement pour l’élaboration des politiques publiques pertinentes et l’harmonisation des différents programmes avec les besoins des citoyens”.
Cette précision étant apportée, il n’en demeure pas moins que le Boualem ne dispose toujours pas de sujet pour sa page, et c’est un vrai problème. Il aurait pu vous entretenir de la victoire des invincibles verts en Botola, l’incontestable exploit de l’année, mais il ne reste pas assez de place (il pense d’ailleurs que ce journal aurait dû y consacrer un numéro spécial). Du coup, il ne reste plus grand-chose comme news dans cette période ténébreuse.
Sinon ce très sérieux projet visant à faire revivre le mammouth à poils longs, disparu depuis quatre mille ans. Mais ses glorieux chercheurs font face à un problème de taille, celui de devoir créer un utérus artificiel, actuellement en phase de test avec des embryons de souris. Savoir qu’il existe, quelque part sur la planète, des gens qui réfléchissent à utiliser des utérus de souris pour faire revivre des mammouths remplit le Boualem de félicité, c’est tout pour la semaine, et merci.