La révolution verte est en marche. Trois ans après l’adoption de la loi 13.21 qui régit l’usage licite du cannabis, notamment dans les domaines du textile et de la pharmacologie, les bases d’un écosystème pérenne se mettent rapidement mais sûrement en place.
Les premières tonnes de cannabis légal sont sorties de terre, et le Maroc dispose depuis quelques semaines d’un label cannabis, tandis que les industriels sont sur le pied de guerre. Mieux encore, tous les acteurs de ce secteur, de l’ANRAC (le régulateur) au ministère de la Santé en passant par l’Intérieur et les services de sécurité, sont pleinement impliqués dans la réussite du projet.
Et pour cause. Selon les projections, le business du cannabis marocain devrait générer plus de 2 milliards de dirhams durant la seule année 2024. Une manne qui peut paraître énorme, mais qu’il faut vite relativiser au vu des potentialités offertes par la plante. Car, désormais, une partie de notre production locale sert à concevoir des compléments alimentaires ou des médicaments pouvant traiter les lésions cérébrales, la dépression, le diabète ou encore l’arthrite. Au lieu d’être transformée en résine, la plante peut aussi servir à la fabrication de tissus pour les vêtements.
Cette aubaine devrait faire le bonheur des cultivateurs. Auparavant, la culture du cannabis était associée à l’illégalité, l’argent rapide mais surtout la prison. Aujourd’hui, nombreux sont les cultivateurs à adhérer au projet de l’État et qui est appelé à décupler leurs revenus. “Les agriculteurs sont de plus en plus intéressés. Ils ont vu que c’est rentable et qu’ils n’avaient plus de raison de rester dans l’illégalité”, note l’une de nos sources citées dans notre dossier de la semaine.
Au-delà du bénéfice financier pour les agriculteurs, cette légalisation devrait instaurer une certaine paix sociale. Dans le nord du pays, les arrestations sont de moins en moins fréquentes et les prisons se vident peu à peu. La réforme consolide davantage la réconciliation de l’État avec une région qui a longtemps été ignorée – c’est un euphémisme – lors du précédent règne.
“La légalisation de l’usage récréatif de la plante permettrait de mettre en place des standards de qualité et limiter l’introduction de produits néfastes”
S’il reste un bémol, c’est l’absence d’avancées quant à l’usage récréatif de la plante. La consommation de cannabis est mauvaise pour la santé physique et mentale, notamment chez les jeunes. C’est un fait. Mais la légalisation de l’usage récréatif de la plante permettrait de mettre en place des standards de qualité et limiter l’introduction de produits néfastes. Elle devrait assurer à l’État de nouvelles ressources financières qui pourraient être utilisées pour des programmes de lutte contre les addictions. Cette légalisation permettrait aussi aux autorités de se concentrer sur d’autres trafics de drogues bien plus dangereuses.