Le Boualem veut fériériser l'année

Par Réda Allali

Salut à vous, les amis. C’est avec une immense émotion que le Boualem vous adresse ses vœux pour la nouvelle année amazighe, juste après ceux de la bonne année miladiya il y a deux semaines. Il en profite pour signaler que, selon un ami à lui qui sait de quoi il parle, il y a deux types de Marocains : les Amazighs et ceux qui pensent qu’ils ne le sont pas. Mais l’heure n’est pas aux pénibles questionnements identitaires, non, pas du tout.

Il faut au contraire se remonter un peu le moral et célébrer, ensemble, un nouveau jour férié, c’est très beau. Ainsi, nous avançons main dans la main, unis, vers le grand objectif de notre paisible contrée : fériériser l’ensemble du calendrier. Entendons-nous bien, encore une fois, l’idée n’est pas de mettre en cause la légitimité de cette nouvelle date, à la symbolique émouvante, loin de là. Nous sommes ici dans une discussion technique, et nous nous posons la question de savoir dans combien de temps nous pourrons enfin passer une année entière à nous reposer, car telle est la cible que nous visons, et le Boualem s’en réjouit sans complexe.

“Cette semaine, le Guercifi se penche sur les jours fériés au Maroc. Il a dû consulter Google car c’est un des effets pervers de cette profusion de fêtes : on ne sait jamais très bien ce qu’on célèbre”

Réda Allali

Prenons la lutte contre le protectorat français, par exemple. Nous célébrons le 11 janvier le Manifeste de l’indépendance, le 20 août la Révolution du roi et du peuple, et le 18 novembre la Fête de l’indépendance. Pour réaliser cette petite liste, le Boualem a dû consulter Google car c’est un des effets pervers de cette profusion de fêtes : on ne sait jamais très bien ce qu’on célèbre exactement.

Trois jours, donc, consacrés à cet épisode de notre histoire, ce n’est pas rien, au moment où de nombreux autres pays se contentent d’un seul pour un évènement similaire. Encore plus perturbant, ces pays qui ne festoient qu’une seule journée pour leur indépendance ont souvent une histoire qui démarre précisément ce même jour. Avant cette fameuse indépendance, ils n’existaient pas vraiment comme États. Chez nous, en posant trois jours pour se réjouir du départ des colons, on donne l’impression que rien de brillant ne s’était passé avant leur arrivée, ce qui constitue une terrible méprise, à l’évidence. Peut-être en faisons-nous un peu trop, c’est possible, mais il est encore plus probable que le Guercifi se lance dans des sujets qui le dépassent.

Il faut revenir à l’objectif de base : couvrir le calendrier de jours fériés. Ainsi, pour le Sahara, nous festoyons deux jours, celui de la Marche verte et aussi celui de la récupération d’Oued Eddahab. Nous avons aussi la Fête du trône et celle de la jeunesse, celle du travail, les deux nouveaux ans dont il est question plus tôt, et quatre fêtes religieuses, dont les deux principales, l’aïd le petit et l’aïd le grand, impliquent deux jours chômés, hamdoullah. On peut aussi y ajouter deux mois plus ou moins fériés de manière parfaitement informelle mais incontestable. Le premier s’appelle chez nous le mois huit et l’autre le ramadan. Pendant ces deux mois, l’essentiel des efforts est consacré à ne rien faire de productif, c’est une règle tacite.

« À ceux qui répondent qu’on ne peut pas créer de richesse en travaillant aussi peu, Zakaria Boualem répond qu’autour de lui, les gens les plus riches sont aussi ceux qui travaillent le moins“

Réda Allali

Mais, au goût du Guercifi, nous travaillons encore trop, surtout au regard de nos salaires. Il propose donc d’y ajouter la commémoration de la tête de Moulay Youssef En-Nesyri, qui coïncide avec le jour du bisou d’ElYamiq et de la qualification à la demi-finale de la Coupe du Monde. On peut aussi penser à fériériser le jour de l’obtention de l’organisation à la Coupe du Monde 2030, et aussi la semaine d’avant l’aïd le grand, puisqu’on ne fait rien de bien glorieux à part organiser le boulfaf. Tout cela ne constitue qu’une première étape. Et à ceux qui répondent qu’on ne peut pas créer de richesse en travaillant aussi peu, Zakaria Boualem répond qu’autour de lui, les gens les plus riches sont aussi ceux qui travaillent le moins. Voilà, c’est tout pour la semaine, et merci.