Pierre-Henri Dumont : “Jean-Luc Mélenchon profite de l’opportunité créée par l’attitude de la France”

À la veille de la visite de Jean-Luc Mélenchon au Maroc, les députés de la majorité ainsi que de la droite française expriment leur agacement concernant ce qu’ils estiment être de “l’opportunisme” de la part du chef de file des Insoumis. C’est le cas de Pierre-Henri Dumont, secrétaire général adjoint du parti Les Républicains et député du Pas-de-Calais, qui appelle à “désamorcer les tensions entre les deux pays”.

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Pour l'élu Les Républicains (LR) Pierre-Henri Dumont, “il est temps de prendre des engagements fermes concernant la marocanité du Sahara”. Crédit: AFP

TelQuel : On a l’impression que la visite de Jean-Luc Mélenchon au Maroc, prévue le 4 octobre, fait grincer des dents au sein de la majorité et de la droite françaises…

Pierre-Henri Dumont : Écoutez, chaque individu a le droit de voyager à l’étranger. La plupart du temps, ces voyages ne suscitent pas d’attention particulière. Cependant, si je ne me trompe pas, des rencontres devraient avoir lieu avec des membres de l’Exécutif, des députés, des membres du groupe d’Amitié Maroc-France… alors que la personne en question n’occupe aucune fonction parlementaire. Jean-Luc Mélenchon n’est ni député ni sénateur, et il n’est même pas chef de parti politique. Il est simplement un ancien candidat à la présidentielle.

Jean-Luc Mélenchon à Toulouse, le 3 avril 2022.

En accueillant l’un des principaux opposants au président de la République, le royaume cherche peut-être à exprimer une fois de plus son mécontentement à l’égard de la position de la France. Cependant, il est essentiel, à mon avis, de ne pas tout confondre. La position des Insoumis et de la gauche en France, par exemple, est fortement favorable au Front Polisario en ce qui concerne la question du Sahara.

Y a-t-il une inquiétude au sein de votre parti quant aux conséquences de cette visite sur les relations Maroc-France déjà très tendues ?

Je plaide en faveur d’un cessez-le-feu. Il est temps de désamorcer les tensions entre les deux pays. Nous devons rétablir une relation normale et équilibrée. Aujourd’hui, Jean-Luc Mélenchon profite de l’opportunité créée par l’attitude de la France.

Je pense aussi que la France doit faire des efforts en premier lieu. Il ne s’agit pas de se soumettre complètement aux enjeux, mais plutôt de rééquilibrer nos relations avec l’Algérie et de cesser de courir constamment derrière elle. Il est temps de prendre des engagements fermes concernant la marocanité du Sahara. Ce sont actuellement les deux axes prioritaires à mes yeux.

“Jean-Luc Mélenchon fait partie d’un groupe qui s’oppose aux accords d’Abraham et qui conteste la marocanité du Sahara. Il est donc surprenant qu’il participe à des rencontres de haut niveau”

Pierre-Henri Dumont

Il est clair que Jean-Luc Mélenchon profite de la détérioration des relations entre l’Élysée et le Palais pour avancer dans ses objectifs. De plus, il semble utiliser un prisme qui est étonnant, car à deux reprises, le discours du Trône a clairement énoncé que la reconnaissance de la marocanité du Sahara était un élément central dans les relations internationales du Maroc. Jean-Luc Mélenchon fait partie d’un groupe qui s’oppose aux accords d’Abraham et qui conteste la marocanité du Sahara. Il est donc surprenant qu’il participe à des rencontres de haut niveau.

Il ne s’est pourtant jamais exprimé clairement sur la question…

Oui, mais son parti est extrêmement clair. À un moment donné, il ne peut pas se délier de la position de son parti.

Une visite du groupe d’amitié France-Maroc dont vous êtes l’un des vice-présidents est-elle prévue dans les prochains mois ?

Cela dépendra du rythme de travail du groupe. Mais il est certain que la visite de Jean-Luc Mélenchon, en tenant compte de ses liens entre le président du groupe d’amitié ici à l’Assemblée nationale (le député NUPES de la 9e circonscription Karim Bencheikh), pourrait tendre un peu les relations, y compris au sein du groupe d’amitié. Nous n’avons pas encore discuté de cela au sein du groupe, mais entre membres, nous avons eu des discussions à ce sujet. Par exemple, les élus de La République en Marche (LREM) ne sont pas très satisfaits.

Pour être très clair, cela ne semble pas contribuer à apaiser les relations entre la France et le Maroc, ce qui est regrettable. Il est temps que chacun comprenne qu’il est dans l’intérêt de tous de maintenir des relations normales et de ne pas perturber la coopération. L’objectif est que les relations entre nos deux pays fonctionnent.

Le message a été très clair : il y a deux jours, Sa Majesté a reçu les lettres de créance de certains ambassadeurs, mais pas de l’ambassadeur de France. Maintenant que le message a été entendu, il est temps d’apaiser les choses, car la France ne peut pas se passer du Maroc.

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