N’éteignons pas la flamme

Par Fatym Layachi

Ces deux dernières semaines ont été très chargées. Et c’est bien peu de le dire. Il y a deux semaines, un séisme a fait trembler le royaume, dévastant des villages, décimant des familles, mettant à nu des disparités mais révélant aussi les immenses capacités humaines de ce pays.

Le Maroc pourrait donner des leçons de résilience, de générosité et de solidarité. Toi, devant ta télé, sur tous tes groupes WhatsApp et en scrollant ton écran d’iPhone, tu en as bouffé de l’image, de l’info factuelle et de l’analyse en tout genre. Entre les points de vue, les traits d’esprit plutôt bien sentis, les théories un peu vaseuses et les vidéos qui te foutent la chair de poule, tu as été traversée par tellement d’émotions. Parfois même contradictoires.

Tu as eu envie de chialer, de gerber, de faire des câlins à ta mère, de t’énerver très fort, de remercier le bon Dieu, de chialer encore et d’y croire encore plus fort. Et puis il y a aussi eu des polémiques. Que tu n’as pas toujours comprises, mais sur lesquelles tout le monde autour de toi semblait avoir un avis bien tranché. Et puis, au milieu de tout cette infobésité, tu es tombée sur un post sur Instagram. Juste quelques phrases sur les réseaux qui sonnent pour toi comme une révélation. Tu as trouvé ces quelques phrase fortes, justes et pleines de bon sens.

“Globalement, nous avons brillé par nos qualités humaines et avons ressenti une réelle fierté d’être marocains (…) mais maintenant que l’onde de choc est passée, il est important de faire preuve d’un peu d’autocritique…”

Alors tu les as “screenshootées” pour les retenir et pour les partager :Les jours qui viennent de s’écouler ont été riches en émotions, négatives et positives. Le bilan est clairement porteur d’espoir… Un peuple uni dans l’épreuve, un sens du devoir patriotique salutaire, une résilience exemplaire. Il y a eu des loupés, c’est normal, c’est humain, mais globalement, nous avons brillé par nos qualités humaines et avons ressenti une réelle fierté d’être marocains et à juste titre. En revanche, maintenant que l’onde de choc est passée, il est important de faire preuve d’un peu d’autocritique…

Les récits nationaux sont importants pour créer de la cohésion mais ne nous laissons pas leurrer par leur pouvoir à taire les vérités. Les dons récoltés sont faramineux, comment seront-ils gérés, à quel degré de transparence allons-nous avoir droit dans le suivi de leur distribution, qui sera en charge de superviser leur honnête application, à quelle instance pourrons-nous nous adresser pour demander des comptes ?

Cette incroyable mobilisation dont nous, citoyens et État, sommes capables pour venir en aide aux plus démunis, ne pouvons-nous pas la nourrir continuellement ? Ne pouvons-nous pas trouver des solutions pour éradiquer des fléaux auxquels nous nous sommes habitués, comme la précarité des enfants de la rue, la pauvreté extrême qui gangrène certaines régions, l’inégalité d’accès aux soins de santé et à une éducation de qualité, la corruption et ses effets pervers à tous les niveaux de notre société.

Et juste une dernière petite réflexion comme ça… Oui, les médias français ont le don d’attiser la haine et de créer en nous des réactions épidermiques suite à leurs polémiques stériles, oui le gouvernement français mène une politique étrangère qui nous prive de visas et qui menace notre intégrité territoriale… Mais partout où l’aide a été nécessaire après le séisme nous avons trouvé des Français à nos côtés prêts à nous aider.

Est-ce vraiment nécessaire de nourrir un sentiment anti-français pour nous rassembler ? Avons-nous réellement besoin d’un ennemi commun pour ne faire qu’un ? Avons-nous besoin de tomber dans les travers du nationalisme pour être solidaires ? Que faisons-nous de cette aide généreuse et spontanée qui nous vient d’un peuple avec lequel nous entretenons autant de liens certes complexes mais si forts?”.

Tu n’as rien à ajouter. Si ce n’est espérer avoir des réponses à toutes ces questions pertinentes.