Retenir la nuit, et l'insouciance

Par Fatym Layachi

Entre les mariages, les festivals et les soirées électro, tu as un emploi du temps hyper chargé. Tu es hyper occupée à célébrer en ce moment. Il y a un truc de festif dans l’air. Pas nécessairement joyeux. Il ne s’agit pas d’être heureux, il s’agit de faire la fête. Un peu comme une injonction à la légèreté. C’est de saison ! Et là, en ce week-end ensoleillé, pas de raison de déroger à cette règle. L’insouciance est une affaire sérieuse.

Samedi soir. Tu viens d’arriver à cette soirée où va mixer ce DJ dont tout Instagram raffole. Avec tes potes, vous avez prévu ça depuis des semaines. Pris vos billets, booké un hôtel et organisé un brunch pour le lendemain. Ton vernis à ongles brille, tes cheveux sont lâchés, le champ des possibles semble festif, lui aussi. Tu es avec tes amis. Tu reconnais des visages familiers et des robes colorées.

Cette soirée s’annonce bien. Jardin magnifique. Ciel de feu. Soleil qui se couche. Nuit qui arrive. Lumières qui commencent à s’agiter. La soirée commence bien. Musique exactement comme il faut. Assez entraînante. Pas trop. Juste comme il faut. Tout est comme il faut.

En fait, tout est beau autour de toi. Ou plutôt tout est fait de manière à ce que tu trouves tout beau. Et ça marche. Tu trouves tout beau. En vrai, tu ne sais pas trop à quoi ressemble cet endroit. Tu ne sais même pas exactement où se trouve cet endroit. Tu y es, et ça te va. Tu te sens bien. Tu es détendue. Un sourire sur les lèvres, un sac en bandoulière, un verre à la main et les yeux qui commencent à briller.

La nuit est tombée. Les palmiers semblent tutoyer les étoiles. La musique s’intensifie. Les lumières embrasent la nuit. Les battements de ton cœur se mettent au rythme de la musique. Tu es avec toute ta bande de potes sur cette piste de danse à ciel ouvert. Vos corps se déhanchent. Autour de toi, plein de gens, plein de visages, des sourires, une joie contagieuse, un kaléidoscope de couleurs et de mouvements.

“Il plante son regard dans le tien. Un truc se tend en toi. Le désir te fait sourire”

Fatym Layachi

Le DJ est sur une estrade. Le DJ est comme un astre vers lequel les regards et les corps sont dirigés. Les bras se lèvent. Une prière païenne. Des paradis artificiels. Ta perception est ralentie. Tes yeux brillent ; ils croisent ceux d’un garçon qui danse, pas très loin. Vous vous souriez. Il plante son regard dans le tien. Un truc se tend en toi. Le désir te fait sourire.

Il s’approche. Ses lèvres bougent. Tu n’entends pas de mots. La musique est trop forte. Ça couvre le silence des conversations qu’on n’aura pas. Il n’a rien à dire. Ça tombe bien. Tu n’aurais rien à lui répondre. La musique accélère encore. Les battements de ton cœur aussi. Les heures passent. Les verres s’enchaînent. Tu es bien. Tu vas bien.

Vos lèvres s’effleurent. La soirée continue. La nuit avance. Les baisers s’enflamment. Les mains s’échauffent, de plus en plus baladeuses. L’excitation monte. La musique tourbillonne. Les heures passent. Tu es bien. Les premières lueurs du jour commencent à poindre. Tu veux retenir la nuit. Être encore maintenant.

Ne pas être demain. Pas encore. Pas déjà. Le garçon te propose de le suivre. Tu suis cette main dans laquelle s’est glissée la tienne. Tu veux découvrir ce que les dernières bribes de nuit peuvent t’offrir comme surprise. En vrai, il n’y aura rien de très surprenant. C’était juste un samedi soir sur terre. Et demain sera juste aussi “triste qu’un lendemain de fête”. Le romantisme de Musset en moins. Une gueule de bois en béton armé en plus.