Concours international de musique du Maroc : talent, rigueur et diversité

Oreille aiguisée, doigts de fée, posture impeccable... les six demi-finalistes 
de la 19e édition du Concours international de musique de l’Orchestre philharmonique du Maroc ont livré des prestations remarquables lors des 
demi-finales qui ont eu lieu les 14 et 15 mars au Théâtre Mohammed VI de Casablanca, et pendant la finale, le 17 mars au Théâtre Mohammed V de Rabat.

Par

OPM

Véritable tremplin pour les jeunes mélomanes, le concours a pour objectif d’offrir un appui aux jeunes musiciens dans leur cheminement artistique, tout en proposant au public une compétition inclusive où seul le talent est jugé, indépendamment du pays d’origine. Les six candidats retenus pour les deux demi-finales venaient ainsi de Chine, du Canada ou de l’Arménie.

Des maîtres incontestés du clavier

Pour les départager, l’Orchestre philharmonique du Maroc (OPM) a sollicité un jury de haut niveau. À sa tête, Anne Queffélec, une pianiste de renommée internationale qui a été décorée en 2011 du grade de commandeur de l’Ordre national de la Légion d’honneur (France) pour sa contribution à la musique. “Je recherche leur amour de la musique, ce qu’ils vont communiquer au public, comment ils vont servir ces œuvres et l’émotion qu’ils vont transmettre. Ce que nous attendons, ce sont des personnalités et des présences musicales, donc il n’y a pas de critère précis. En art, c’est impossible.”

“Ce que nous attendons, ce sont des personnalités musicales, il n’y a pas de critère précis”

Anne Queffélec

Parmi les membres du jury se trouvait aussi le célèbre compositeur marocain Ahmed Essyad, gagnant du Grand prix national de la musique en 1994, ainsi que que l’Italien Giuseppe Andaloro, ancien lauréat du concours en 2002 ou Jean-Claude Vanden Eynden, membre du jury du prestigieux Concours Reine Elisabeth en Belgique.

Des concertos audacieux

Consacrée au piano, cette édition a donné l’opportunité aux candidats de jouer les concertos de leur choix. A cette fin, les 80 musiciens de l’OPM ont répété 25 concertos. Lors de la première demi-finale qui a eu lieu mardi 14 mars, le Hongkongais Aristo Sham a ouvert le bal avec le Concerto pour piano n° 23 en la majeur de Mozart, suivi par Eva Gevorgyan, pianiste d’origine arménienne, qui a interprété le Concerto pour piano n° 1 en ut majeur de Beethoven. L’ultime prétendant de la soirée, le Chinois Xiaolu Zang, a choisi d’interpréter le même concerto que Sham.

La seconde demi-finale a été l’occasion de voir les trois candidats restants à l’œuvre. Hyojin Shin, originaire de Corée du Sud, a ouvert la marche avec le Concerto pour piano n° 23 en la majeur de Mozart, concerto également choisi par le Canadien Jonathan Mak. Enfin, l’Israélien Lior Lifshitz a interprété le Concerto pour piano n° 20 en ré mineur de Mozart. En plus de ces épreuves, les candidats ont interprété un programme en récital pour piano seul, afin de montrer au jury l’étendue de leur talent.

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Durant les épreuves, l’OPM a été dirigé pour la seconde fois de la saison par une femme. Après Dina Bensaïd en octobre 2022, la jeune cheffe d’orchestre polonaise Anna Sułkowska-Migoń a pris les commandes. Elle évoque les avantages que procure le fait de jouer avec un orchestre pour un candidat : “Le plus important n’est pas de remporter la compétition, car ils peuvent aussi vivre une nouvelle expérience. Durant la compétition, il est intéressant que les candidats puissent jouer avec l’orchestre. À la maison, vous n’avez pas d’orchestre, vous devez répéter et pratiquer par vous-même. Vous pouvez imaginer le son et le temps de l’orchestre, mais en réalité, le processus est différent. Je pense que le fait de répéter et de jouer en concert avec l’orchestre est une réelle opportunité pour tous les candidats. Cela leur sera utile pour l’avenir.”

Une finale de titans

Et ce sont Aristo, Eva et Xiaolu qui ont été retenus pour la finale qui s’est déroulée le 17 mars au Théâtre Mohammed V de Rabat. Les trois concurrents ont joué des concertos différents, interprétant les œuvres de Grieg, Brahms et Tchaïkovski. Suite aux performances, les membres du jury se sont retirés pour délibérer. Après une dizaine de minutes, le fondateur et président de l’OPM Farid Bensaïd a rejoint la scène.

Devant une salle comble et dans un silence presque solennel, il a révélé le contenu de l’enveloppe qu’il tenait fermement dans ses mains : Eva a remporté le troisième Grand prix du Jury, Xiaolu s’est vu attribuer le deuxième Grand prix, tandis que le premier Grand prix a été décerné à Aristo. Quant au Prix du public et celui de l’orchestre, ils reviennent tous deux à Xiaolu.

L’écoute, clé de la compréhension

En amont des épreuves, des ateliers dédiés à l’écoute ont pris place au balcon des théâtres. Dispensés par Dina Bensaïd, directrice générale de la Fondation Ténor pour la Culture, ces workshops avaient pour objectif de rendre la musique plus accessible, permettant au public de mieux comprendre et apprécier les performances des musiciens : “Depuis quelque temps à l’Orchestre, on fait des avant-scènes. Ce sont des ateliers avant les concerts pour préparer à l’écoute les personnes qui viennent et qui ne savent pas forcément à quoi s’attendre. On y décrypte les œuvres. Là, en l’occurrence, on a expliqué ce qu’est un concours, comment ça marche à travers le monde, comment fonctionne celui-là, quelle est sa spécificité, ce que le jury attend des candidats pour pouvoir les départager…

Organisé sous l’égide de l’Académie du Royaume du Maroc, ce concours est le premier d’une série d’événements culturels qui bénéficieront du soutien de l’institution. En effet, un partenariat a été signé, en octobre dernier, entre l’Académie et la Fondation Ténor qui prévoit l’organisation de la Morocco Dance Competition en juin prochain, suivi du Concours national de musique du Maroc en juillet.