La guerre des blonds a tout chamboulé, les amis. Zakaria Boualem la suit avec un mélange d’effroi et de fascination, assommé par la masse extraordinaire de réflexions contradictoires qu’elle produit dans son sinistre sillage. Avant que le Tsar de toutes les Russies ne décide d’attaquer ses voisins, les choses étaient claires. Il y avait l’empire de l’Ouest, tout-puissant, qui faisait à peu près ce qu’il voulait de la planète, en prenant toutefois le soin de s’en prendre uniquement aux barbares. Et il y avait les autres, placés sur le globe terrestre dans le seul but de servir de réceptacle aux ambitions voraces de l’empire.
L’empire était en roue libre, il prenait de moins en moins soin de fournir des justifications à ses agressions, la vie était belle hamdoullah. Pour lui et ses représentants, bien sûr. Les autres, figurez-vous, les barbares, étaient présentés comme des menaces pour sa qualité de vie, surtout quand il leur prenait l’étrange envie de migrer vers l’Ouest pour profiter de ses bienfaits ou pour échapper à ses bombes.
Et voilà qu’un blond, un vrai, est venu bousiller ce bel équilibre. Entendons-nous, les amis : le Guercifi ne nourrit aucune espèce de sympathie pour ce personnage. Le fait qu’il ait mis, par son initiative spectaculaire, l’Occident devant ses contradictions ne suffit pas, désolé. A la limite, il veut bien lui reconnaître le mérite d’avoir mis fin au Covid, c’est vrai. Mais pour le reste, non merci. Pour Zakaria Boualem, les injustices ne s’annulent pas, elles s’additionnent.
Il faut ajouter qu’il ne ressent aucun besoin de prendre position ou de s’exciter à coup de statuts pour partager ses émois. L’impérialisme le dégoûte, voilà la vérité. Il est d’ailleurs bien dommage que ce vocable soit passé de mode, car c’est bien ce qu’on voit devant nous : la lutte des impérialismes. S’il était parfaitement honnête, Zakaria Boualem vous dirait même ce qu’il pense des nations, mais il a un peu peur de vous faire fuir tant ce concept, pourtant récent et grand producteur de catastrophes, s’est imposé avec force.
Il a acquis le statut d’évidence, il va donc éviter de le commenter sous peine de choquer tout le monde. Par contre, il va s’offrir le plaisir de ricaner un moment sur la confusion qui s’est emparée de ces braves hommes politiques de l’empire, à commencer par Monsieur Zemmour, que Dieu le précipite dans les ténèbres de l’oubli. Voilà un type qui explique, depuis des années et devant toutes les caméras, que les musulmans, les Arabes, les bruns, choisissez le terme, étaient le plus grand danger qui menaçait la civilisation occidentale.
“Le Zemmour était sur le point d’être grand remplacé, et il se proposait avec courage de se dresser entre son pays et les barbares. Et voilà que, soudain, le plus blond de tous les chefs d’état du monde le menace…”
Le bougre était sur le point d’être grand remplacé, et il se proposait avec courage de se dresser entre son pays et les barbares, dans un élan de bravoure extraordinaire. Et voilà que, soudain, le plus blond de tous les chefs d’état du monde le menace, c’est cocasse. On ne parle pas d’une cantine halal ou de la mixité d’une piscine municipale le jeudi matin, là, il est question de danger atomique. Des chars, des missiles, tout l’arsenal est sorti, à deux pas de centrales nucléaires. La guerre du saucisson et la bataille des prénoms, à côté de ce que propose le tsar, ressemblent à une aimable chamaillerie de cour de récré.
Oui, depuis des années, “l’olivier” s’acharne sur de pauvres dames pour des considérations textiles, et soudain, dans son dos, son soi-disant allié culturel lui déglingue son argumentaire et le place très officiellement dans la liste des ennemis de son pays. Vous connaissez le Boualem, il est incapable de résister à l’ironie de cette situation. C’est tout pour la semaine, mais ce n’est que le début, et merci.