Pour nous, l’égalité des genres ne se résume pas à des slogans pour le 8 mars, mais est une réalité reflétée dans les politiques et lois de nos pays qui affectent toutes les sphères de la société, telles que la représentation politique, l’éducation, le marché du travail et la vie familiale.
Dans cet article qui coïncide avec la Journée internationale des droits des femmes, nous voulons partager ce que l’on pense être des catalyseurs importants de la forte participation des femmes dans l’économie de nos pays : le système de congé parental et l’engagement réussi des hommes dans la sphère domestique.
Dans nos pays, près de trois femmes sur quatre ont un emploi rémunéré. Cela fait de nous non seulement la région la plus égalitaire au monde en matière de genre, mais aussi la 12e puissance économique mondiale, avec une population de près de 27 millions de personnes et un Produit national brut combiné qui avoisine les 1366 milliards de dollars.
Le succès des pays nordiques est étroitement lié à l’amélioration du statut des femmes et à l’égalité des genres. Les efforts systématiques déployés par les pays nordiques pour permettre la pleine participation des hommes et des femmes à l’économie ont accru la richesse et le bien-être de tous.
Cela n’a pas toujours été facile, mais aujourd’hui, grâce aux politiques de répartition des congés familiaux entre les parents, aux mesures visant à concilier vie professionnelle et vie familiale, ainsi qu’aux services de garde d’enfants qui sont abordables et de qualité, le rôle économique et social des femmes dans nos sociétés a considérablement évolué.
Pionniers du congé parental
Il existe une grande convergence des politiques nordiques concernant l’égalité des genres. La Suède a été pionnière au niveau mondial en instaurant, dès 1974, un régime de congé parental pour les mères et les pères. Ce système donne l’opportunité aux parents de profiter amplement de l’arrivée de leur enfant, bénéficier de moments privilégiés avec eux et partager les responsabilités résultant de la naissance d’un nouveau-né.
Le but est également de promouvoir l’implication des parents dans l’éducation des enfants et de protéger l’égalité professionnelle hommes-femmes. De fait, pères et mères en Suède se partagent équitablement un congé parental pour la première année après naissance de l’enfant. De plus, si jusqu’à l’âge d’un an les enfants sont généralement gardés par un parent, grâce à ce dispositif, environ 97 % des petits entre 4 et 5 ans fréquentent des centres d’accueil préscolaires.
Au Danemark, le congé maternel date de 1901. Les deux parents ont vu leur droit du travail protégé en bénéficiant du régime de congé parental en 1984. Les mères ont eu droit à 18 semaines de congés payés, les pères à deux semaines, et 32 semaines à partager entre eux. L’objectif de ces lois est non seulement de protéger la mère et l’enfant, mais aussi de créer une égalité au travail et renforcer les liens entre enfants et pères.
Cette année, une nouvelle législation sur le congé parental avec 24 semaines payées pour les deux parents entre en vigueur au Danemark. Les politiques de famille au Danemark sont également très positives envers les femmes et leur permettent en premier lieu d’accéder au marché du travail au même titre que les hommes, et d’autre part de développer une carrière en accord avec leurs aspirations, et tout cela, en parallèle d’une vie de famille épanouie. Ce bien-être est confirmé par l’index de confiance, très élevé pour les Danois.
Maman travaille
Un ensemble de conditions sont mises en place pour réaliser l’égalité de genre permettant aux femmes d’être aussi présentes que les hommes sur le marché de l’emploi. Plus de 80 % des mères dont les enfants ont entre 0 et 14 ans travaillent, plaçant ainsi le Danemark parmi les pays où le taux de mères en emploi est le plus haut. Les politiques d’accueil préscolaire des jeunes enfants font partie intégrante du modèle universel de protection sociale dans tous les pays nordiques.
En Finlande, dès 1917, dans certaines professions, les femmes bénéficiaient déjà de quatre semaines de congé de maternité remplacé par un régime de congé parental à partir des années 1970. Ce système de congé parental a connu en 2022 une énième réforme pour augmenter la durée totale du congé parental à 14 mois, le répartir plus équitablement entre les deux parents, et mieux prendre en compte les différents types de familles.
Le pays a aussi mis en place depuis les années 1970 des lois permettant à toutes les familles d’avoir accès à des services de garde abordables. De nos jours, l’accès à la garde d’enfant journalière est également compris comme le droit des enfants à recevoir une éducation précoce de qualité. Depuis plus de 70 ans, la Finlande offre des repas scolaires gratuits à tous les élèves, à l’école comme à la garderie, contribuant ainsi positivement à la santé, aux résultats scolaires et à l’égalité des enfants.
En Norvège, les parents ont accès à un congé parental rémunéré jusqu’à 100 % de salaire pendant 12 mois. Un tiers du congé est pris par la mère, un tiers par le père, et le dernier tiers est partagé
En Norvège, les parents ont accès à un congé parental rémunéré jusqu’à 100 % de salaire pendant 12 mois. Un tiers du congé est pris par la mère, un tiers par le père, et le dernier tiers est partagé entre les deux parents. Lorsque le bébé a environ un an, les deux parents peuvent retourner au travail, car ils ont accès à des services de garde. La crèche/jardin d’enfants d’un à six ans n’est pas gratuite, mais reste très abordable pour les parents. L’enseignement primaire, secondaire et supérieur est fondamentalement gratuit. De cette manière, les deux parents contribuent à l’économie familiale et à la société, et la famille est protégée en cas de problème, de décès ou d’incapacité de l’un des parents.
Il faut noter que ces réalisations positives pour l’égalité des genres dans les pays nordiques se sont développées parallèlement à l’augmentation constante de la représentation politique des femmes. Aujourd’hui, nous voyons souvent une Première ministre dans l’un ou l’ensemble de ces pays, en plus d’un pourcentage de femmes parlementaires très élevé.
Des études montrent que la représentation politique accrue des femmes (plus de 30 % dans les organes décisionnels) a conduit les parlements à approuver des lois plus égalitaires entre les genres. Il est également avéré dans nos pays que ces politiques bénéficient d’un large soutien, tant chez les hommes que chez les femmes. La combinaison de la présence de mesures juridiques, avec la participation active des organisations féministes et des mouvements syndicaux, a conduit à la pleine et équitable participation de la plupart des femmes et des hommes au marché du travail, ainsi qu’à une vie familiale équilibrée.
Plusieurs recherches académiques ont démontré qu’une forte présence des femmes dans le marché du travail renforce l’économie nationale et protège le revenu familial. Les dernières estimations parlent de 28 trillions de dollars de gains pour l’économie mondiale avec un marché de l’emploi égalitaire.
Étendre le congé parental aux deux parents permet aux femmes de réintégrer le marché du travail tout en gardant les mêmes chances de développement de carrières que celles des hommes. Cela donne à ces derniers aussi l’opportunité de contribuer à la vie de l’enfant durant l’âge d’enfance critique. Les enfants grandissent donc dans un environnement où ils voient les deux parents participer sur un pied d’égalité dans tous les aspects de la vie.
Même si les pays nordiques sont très avancés en termes d’égalité des genres, nous sommes toujours confrontés à des problèmes de discrimination, tels que l’inégalité de rémunération et les barrières d’accès aux positions de leadership dans certains domaines, en plus de la violence basée sur le genre. Ceci fait de l’égalité des genres un droit fondamental qu’il faut continuellement promouvoir et protéger.
Les politiques qui promeuvent l’égalité des genres sont bénéfiques aux enfants, aux femmes — ainsi qu’aux hommes. De plus, ces politiques ont un effet positif sur le développement économique du pays. Les pays nordiques en sont la preuve.
Cette tribune est signée par Anne Höglund, Jesper Kammersgaard, Pekka Hyvönen et Sjur Larsen, respectivement ambassadrice de Suède, et ambassadeurs du Danemark, de Finlande et de Norvège au Maroc.