Dans le cadre du suivi de sa campagne #STOP490, lancée le 3 février dernier pour la dépénalisation des relations sexuelles hors mariage, le collectif Hors la Loi, co-fondé par Sonia Terrab et Leïla Slimani en septembre 2019, a diffusé un communiqué de presse ce lundi 22 février. Celui-ci lance un appel direct aux différents partis politiques, à l’approche des élections législatives, à se positionner publiquement pour ou contre l’abrogation de l’article 490.
Selon le communiqué, cette initiative répondrait à une demande de la jeunesse : “A l’approche des élections législatives, nous sommes souvent interrogé.e.s par les nombreux jeunes qui nous suivent et soutiennent : quels sont les partis politiques qui sont favorables à l’abrogation de l’article 490 ?”
Deux questions
En tant qu’organisation indépendante et apolitique, le collectif a procédé à l’envoi d’une lettre à chaque parti politique, contenant deux questions : “Votre parti est-il pour ou contre l’abrogation de l’article 490 du code pénal ?” et “Si vous avez répondu ‘pour’ à la précédente question, envisagez-vous d’inclure ce point dans votre programme électoral ?”. Le communiqué du collectif précise également que “les réponses, ou le cas échéant, l’indication de l’absence de réponse, seront publiées sur nos pages dans un mois”.
Hormis une éventuelle volonté de communiquer sur le débat autour de l’article 490, les partis politiques ne sont absolument pas tenus par la loi, ni d’aucune autre manière, de répondre à l’appel du collectif 490. Pour autant, le collectif considère que “l’absence de réponse est une réponse en soi”, comme le déclare Sonia Terrab à TelQuel. Et d’ajouter : “On sait aujourd’hui le manque de foi qu’ont les jeunes dans les partis politiques. Ils ne votent pas, les chiffres parlent d’eux-mêmes”.
Quant à la démarche du collectif, elle se veut avant tout citoyenne : “Nous voulons également faire comprendre à ces partis politiques, qui veulent que les jeunes votent et s’engagent, que cette jeunesse doit être écoutée. Il faut entendre ses revendications, et celle de l’abrogation de l’article 490 en fait partie”, conclut Sonia Terrab, estimant que les jeunes sont prêts à s’engager… sur les sujets qui leur importent.
Qu’en dit l’hémicycle ?
En marge de l’affaire de vengeance sexuelle pour laquelle Hanaa, surnommée Moulat El Khimar, a écopé en janvier d’un mois de prison ferme en vertu de l’article 490 du code pénal, le collectif Hors la loi a lancé une campagne massive de soutien à la jeune femme, mais aussi à toutes les personnes vivant sous le joug de cet article de loi, sous le signe du hashtag #STOP490. Sur les réseaux sociaux, nombreux artistes, intellectuels et personnalités publiques influentes n’ont pas hésité à se mobiliser.
Lors d’un précédent article, TelQuel a interrogé quatre députés des partis PPS, USFP, PI et PAM sur la question de l’abrogation de l’article 490. Parmi leurs réponses, aucun « non » catégorique, mais beaucoup de conditions. Pour Ibtissam Azzaoui par exemple (PAM), « tout sujet mérite d’être débattu, mais au bon moment. Les articles de loi doivent suivre l’évolution de la société. On doit d’abord définir le système de valeurs qui régit la société marocaine d’aujourd’hui, le reste en découlera ». Pour Fatima-Zahra Barrassat (PPS), « le travail qui doit être fait au niveau de cette loi passe par la notion de vie privée et d’espace public ». Le parti du livre serait contre une abrogation de l’article, mais pour une modification du texte qui disposerait que les relations sexuelles hors mariage dans un cadre privé doivent être protégées.
Pour Fatiha Saddas (USFP), « beaucoup d’articles du code pénal posent problème, et on ne peut pas les prendre un par un en demandant à les changer séparément« . Autrement dit, le parti de la rose se dit pour la dépénalisation des relations sexuelles hors mariage, mais contre l’abrogation d’un seul article du code pénal. « Si on veut faire du lobbying, il faut que ce soit une approche globale, et non pas une réaction à une affaire en particulier » poursuivait la députée.
Enfin, seul un député de l’Istiqlal a répondu favorablement à une abrogation totale de l’article 490 : « A partir du moment où il y a l’article 483 qui pénalise “l’outrage public à la pudeur”, l’article 490, à mon sens, n’a plus sa place » déclarait Abdelmajid Fassi Fihri à TelQuel. Reste à savoir si les mêmes positions seront conservées haut et fort au Parlement, si la question se pose.