Le PPS dépose une proposition de loi pour mettre fin au mariage des mineures

Le groupement parlementaire du PPS a déposé une proposition de loi le 22 janvier au Parlement, visant à abroger les articles 20, 21 et 22 du Code pénal, afin de mettre fin au mariage des mineurs.

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MAP

Vendredi 22 janvier, le groupement parlementaire du Parti du progrès et du socialisme (PPS) a déposé une proposition de loi visant à abroger les articles 20, 21 et 22 du Code de la famille, afin de mettre fin au mariage des mineurs.

L’exception devenue règle

Réformé en 2004, l’article 20 du Code de la famille présente les cas exceptionnels pour lesquels un juge peut autoriser le mariage de mineurs. En effet, celui-ci dispose que “le juge de la famille chargé du mariage peut autoriser le mariage du garçon et de la fille avant l’âge de la capacité matrimoniale prévu à l’article 19, par décision motivée précisant l’intérêt et les motifs justifiant ce mariage”. Pour cela, le juge devra avoir fait procéder au préalable « à une expertise médicale ou à une enquête sociale”.

En 2018, 25.000 mineures ont été mariées, ce qui représente environ 9,9 % des mariages cette année-là

Or, les chiffres présentés par le ministère de la Justice tendent plutôt à montrer que l’exception accordée par l’article 20 du Code de la famille est devenue la règle : en 2018, 25.000 mineures ont été mariées, ce qui représente environ 9,9 % des mariages cette année-là.

Pour Touria Skalli, membre du groupement parlementaire du PPS contactée par TelQuel, cela s’explique entre autres par la flexibilité du texte de loi : “On se cache derrière les mots. Dans la plupart des cas, les représentants légaux présentent un examen médical pour prouver que la jeune fille est pubère, qui est utilisé par le juge afin d’autoriser le mariage.”

Selon la députée du parti du livre, l’abolition du mariage des mineurs est impérative à la construction d’un modèle de développement solide. “Si nous voulons construire un Maroc avancé, où chacun peut jouer son rôle de développement social et économique, nous avons besoin de toutes nos compétences : hommes et femmes compris. Or, un mariage précoce entraîne un arrêt de scolarité”, avance Touria Skalli, qui souligne par ailleurs que le mariage des mineurs concerne principalement les jeunes filles.

“Une question urgente et essentielle”

L’article 19 fixe pourtant la règle, en disposant que “la capacité matrimoniale s’acquiert, pour le garçon et la fille jouissant de leurs facultés mentales, à dix-huit ans grégoriens révolus

En 2019, le président du ministère public, Mohamed Abdennabaoui, qualifiait d’“inquiétante” la hausse des mariages de mineurs, et tirait la sonnette d’alarme lors d’un colloque organisé autour de ces thématiques, les 29 et 30 octobre de la même année à Marrakech. Le président du parquet avait également profité de cet événement pour appeler les magistrats à plus de responsabilité face aux requêtes qui s’élevaient en 2019 à 33.686 dossiers.

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Quelques mois auparavant, une circulaire émanant du ministère public datée du 29 mars 2018 appelait les magistrats à “s’opposer aux demandes de mariage qui ne tiennent pas compte de l’intérêt supérieur du mineur”, invoquant l’article 32 de la Constitution qui assure “une égale protection juridique et une égale considération sociale et morale à tous les enfants, abstraction faite de leur situation familiale”. 

De son côté, la présidente du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) Amina Bouayach s’était également exprimée sur la question, à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes en mars 2019 : “La problématique est que, de 2004 à aujourd’hui, le nombre des mariages de mineurs n’a fait qu’augmenter, et le nombre des drames humains et des violations de l’intégrité physique à l’égard des filles avec. (…) Il est temps d’ouvrir le débat sur une question qui est urgente et essentielle”, expliquait-elle.

Le même mois, le CNDH lançait une campagne de sensibilisation à ce sujet, principalement menée par les Commissions régionales des droits de l’Homme (CRDH), durant laquelle des témoignages de victimes du mariage de mineurs ont été présentés, et des films documentaires projetés dans plusieurs villes du royaume.