Dans un mémorandum revendicatif, ce collectif de dix associations a souligné “la nécessité d’adopter une politique ou stratégie nationale globale pour éliminer le mariage des mineures au Maroc, qui englobe tous les secteurs concernés, et faire de l’âge de 18 ans un acquis irréversible”. Cela passerait par la suppression des articles 20, 21 et 22 du Code de la famille qui permettent au juge d’autoriser le mariage des garçons et filles qui n’ont pas l’âge légal fixé à 18 années révolues, conformément à l’article 19 de la même loi.
Présenté lors d’une conférence de presse à l’occasion du lancement officiel des actions du Collectif Dounia et dans le cadre des 16 jours d’activisme contre la violence basée sur le genre, qui se tiennent du 25 novembre au 10 décembre de chaque année, le mémorandum met l’accent sur l’importance de la contribution de l’État et de ses institutions à l’éducation de la société aux dangers qui peuvent résulter de la continuité du phénomène du mariage des mineures et ce, notamment par la gratuité de l’enseignement et de la formation professionnelle obligatoire jusqu’à l’âge de 18 ans, “ce qui permettra aux enfants de continuer à progresser et à développer les compétences avec lesquelles ils feront face à leur avenir économique et social”.
Il s’agit, également, de mettre en place “une nouvelle approche holistique” qui prend en compte les aspects sociaux et économiques des familles dans diverses régions du Maroc, particulièrement dans les zones rurales et celles enclavées, et au sein des familles pauvres des zones urbaines.
Près de 320.000 mariages de mineurs entre 2009 et 2018
Dans une présentation du mémorandum revendicatif, le président de l’association Ennakhil, Raji Lhoucine, a indiqué que d’après l’étude nationale sur le mariage des mineures au Maroc, réalisée par l’association Droits et Justice en 2019, le mariage des mineures avec la Fatiha (sans passer par l’acte écrit) représente 10,79 %, indépendamment de toute reconnaissance légale, ajoutant que selon les données du ministère de la Justice, 319.177 autorisations de mariage de mineurs ont été accordées entre 2009 et 2018.
“Le mariage des enfants en général et des mineures en particulier a des effets et des conséquences désastreux tels que le décrochage scolaire, les grossesses précoces, ainsi que les violences conjugales et les mortalités infantiles”
“Selon une étude réalisée par la Banque mondiale en 2015, le mariage des enfants en général et des mineures en particulier a des effets et des conséquences désastreux tels que le décrochage scolaire, les grossesses précoces, ainsi que les violences conjugales et les mortalités infantiles”, a-t-il déploré. Raji Lhoucine a, dans ce sens, fait savoir que les mariages de mineures ou l’autorisation de leur mariage étaient considérés comme “des pratiques traditionnelles néfastes qui doivent être abandonnées, car incompatibles avec les conventions internationales, en particulier la convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant”.
“Un fléau”
De son côté, la présidente de l’association Mains libres, et membre du Collectif Dounia pour l’interdiction du mariage des fillettes, Leila Amili, a indiqué que le mariage des enfants constituait un fléau malheureusement toujours existant, en dépit des efforts consentis pour y mettre fin, ajoutant qu’il s’inscrit dans le cadre des violences faites aux femmes. “Tous les enfants doivent jouir de l’ensemble de leurs droits sans discrimination, notamment le droit à l’éducation et à la santé. C’est pour cela que nous insistons sur la suppression des articles 20, 21 et 22 du Code de la famille”, a-t-elle dit dans une déclaration à la presse.
Le Collectif Dounia s’engage dans la lutte contre le mariage des filles de moins de 18 ans par la suppression des articles 20, 21 et 22 du Code de la famille et pour l’harmonisation de la législation nationale avec la Convention internationale des droits de l’enfant. Dans ce but, le collectif dit adopter une approche fondée sur les droits et axée sur les valeurs fondamentales de dignité, de liberté, d’égalité et de justice dans le cadre des droits humains en général, et des droits de l’enfant en particulier.
Ce collectif compte dix associations de différentes régions du royaume, œuvrant pour la protection de l’enfance et contre le mariage des mineures, à savoir Droits et Justice, Aspirations féminines, Mains libres, Voix de la femme amazighe, Ennakhil, Tawaza pour le plaidoyer de la femme, Afoulki pour femme, le Collectif civil pour la défense des droits des femmes et l’association Tildat, et Les Citoyens.
(avec MAP)