Ce qu’il faut retenir du rapport annuel du CNDH sur les droits de l’Homme au Maroc

Le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) a rendu public le 14 avril son rapport annuel sur la situation des droits de l’Homme au Maroc pour l’année 2019.

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Amina Bouayach, présidente du CNDH, et Mounir Bensalah, secrétaire général. Crédit: Rachid Tniouni/TELQUEL

Dans ce rapport long de 82 pages (dans sa version arabe), l’instance présidée par Amina Bouayach fait état de l’émergence des réseaux sociaux comme “un nouveau défi pour les droits de l’Homme”, prenant pour exemple “la généralisation des fausses informations et des fake news, la faiblesse de la culture de la vérification des informations et la régression de la confiance dans les médias traditionnels et les institutions”.

Le CNDH regrette dès l’incipit du rapport “la faiblesse de la dimension des droits d’Homme dans les politiques publiques dans les domaines économique, social, culturel et environnemental”, estimant que cela constitue “l’une des causes principales de l’accélération des formes de manifestation, dans leurs formes traditionnelles et nouvelles, dans de nombreuses régions victimes de la distribution inégalitaire des fruits de la croissance économique”.

Peine de mort

Le CNDH a dénombré, sur l’année 2019, 11 condamnations à mort en première instance et 11 autres en appel, et ce malgré l’arrêt de l’exécution de la peine depuis 1982 — à l’exception du commissaire Tabit en 1993 —, portant ainsi le nombre de condamnés à la peine capitale actuellement à 70 personnes, dont une seule femme.

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Le conseil relève également qu’entre 2009 et 2019, 119 condamnés à mort ont été graciés par le roi, dont 36 sur la seule année 2019. À ce sujet, le CNDH recommande tout simplement “l’abrogation de la peine de mort de son exécution”, ainsi que “le vote en faveur de la résolution onusienne pour un moratoire universel sur la peine de mort”.

Grève de la faim

Des carences en mesures concernant la grève de la faim dans les prisons” et “une aggravation du phénomène” ont été relevées par le CNDH lors des dernières années. Pour y remédier, l’instance affirme “préparer un guide déterminant les rôles de tout un chacun, afin de mieux gérer ces situations” et appelle à “pallier urgemment le manque de personnel médical et sanitaire dans les établissements pénitentiaires”.

Torture

Le CNDH a recensé 20 plaintes pour “torture” et 58 autres pour “maltraitance et traitement humiliant”. D’après le rapport, “la plupart de ces plaintes” ne peuvent, “après investigations” être considérées comme des cas de torture ou de maltraitance. “Certains plaintifs sont revenus sur leurs propos et ont estimé que ce qui avait été déclaré par leurs parents ne correspondait pas à ce qui avait été exprimé lors de leur visite”, précisent les auteurs du rapport à la page 13, citant l’exemple d’El Mortada Iamrachen, activiste rifain condamné à cinq ans de prison ferme pour “apologie du terrorisme”.

Sit-in d’Imider

Pour le CNDH, la poursuite pendant plus de huit ans de ce sit-in — levé en septembre 2019 — “questionne tous les acteurs sur la qualité et l’efficacité de leurs interventions, particulièrement en raison de leur impact sur les droits essentiels tel que le droit à l’éducation, les élèves ayant décroché de leurs études afin de participer aux manifestations”.

Le sit-in d’Imider ouvre, aux yeux du CNDH, la problématique de “la responsabilité des entreprises et leurs répercussions négatives sur les droits de l’Homme”.

Liberté de conscience

Le Conseil recommande “l’abrogation de l’alinéa 2 de l’article 220 du Code pénal”. Celui-ci prévoit un emprisonnement de six mois à trois ans pour “quiconque emploie des moyens de séduction dans le but d’ébranler la foi d’un musulman ou de le convertir à une autre religion”.

Le CNDH appelle également à la suppression de l’article 222 du même Code, qui dispose une peine de prison d’un à six mois pour “celui qui, notoirement connu pour son appartenance à la religion musulmane, rompt ostensiblement le jeûne dans un lieu public pendant le temps du ramadan, sans motif admis par cette religion”.