Dans le cadre d’une série de rencontres d’information, le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSE) a organisé, le 23 mai à Rabat, une rencontre consacrée à la présentation d’un projet d’avis sur “l’enseignement des personnes en situation de handicap : vers une éducation inclusive, équitable et efficiente”. Ce projet vise à identifier des dysfonctionnements et des difficultés, élaborer des recommandations pour la consolidation d’une éducation équitable et de qualité pour les personnes en situation de handicap. Il entend aussi contribuer au changement des représentations sociales négatives, et promouvoir une culture de pilotage et de conduite de changement dans le système d’éducation.
D’emblée, le projet d’avis présenté par Abdelrhafor El Allame, membre de la commission permanente des curricula, programmes, formations et outils didactiques, a mis en avant les efforts déployés par le gouvernement pour améliorer la situation des personnes en situation de handicap. Dans la lignée des réalisations du gouvernement, le membre de la CSE a évoqué la publication de la loi-cadre 97.13 relative à la protection et à la promotion des droits des personnes en situation de handicap, la mise en place d’une politique publique inclusive pour la promotion des droits des personnes en situation de handicap, ainsi que le cadre référentiel de l’ingénierie curriculaire pour les enfants en situation de handicap lancée par le ministère de l’Éducation nationale en 2017.
Un diagnostic alarmant
En dépit des efforts déployés par les différents départements du gouvernement, le diagnostic du Conseil est alarmant. Les personnes en situation de handicap bénéficient moins des services d’éducation et de formation, rapporte le projet d’avis du CSE. À l’origine de ce diagnostic, une étude datant de 2014 sur l’accessibilité à la scolarisation et à la formation des personnes en situation de handicap. Celle-ci révèle que 66,1% des personnes en situation de handicap sont non scolarisées, dont 66,6% de filles, 50,6% se situent dans le milieu urbain et 49,4 % dans le milieu rural. En plus, seul 1,8% des personnes disposent d’un niveau d’enseignement supérieur, 9,5% d’un niveau d’enseignement secondaire et 15% d’un niveau d’enseignement primaire.
Selon le Conseil, les personnes en situation de handicap souffrent également d’une double discrimination puisqu’elles sont confrontées à des obstacles généraux liés à la scolarisation (tels que les problèmes rencontrés par les enfants en milieu rural, les problèmes de scolarisation des filles, etc.) auxquels s’ajoutent des difficultés particulières liées au handicap (perceptions sociales, accessibilité et faible niveau de formation des ressources humaines, etc.).
Le Conseil a également relevé l’existence des disparités au sein du groupe de personnes en situation de handicap en fonction du type et du statut du handicap. Par exemple, les enfants ayant une déficience motrice ont plus de chances de fréquenter l’école par rapport aux enfants atteints d’autisme ou de déficiences mentales qui doivent être inscrits dans des centres spécialisés.
Le projet d’avis pointe également des difficultés en matière d’institutionnalisation des parcours d’études, la faible qualité de l’enseignement destiné aux apprenants, le manque de coordination entre les personnes intervenant dans l’éducation et la formation des personnes en situation de handicap, et au sein même des mécanismes chargés de leur scolarisation. S’ajoute à cela le manque de collaboration entre les professionnels et les familles, et la faible communication entre l’école et les parents d’enfants en situation de handicap.
Quid de l’avenir
Le CSE a établi une liste de recommandations avec l’ambition de parvenir à un système éducatif inclusif au profit des personnes en situation de handicap. Pour les membres du Conseil, ce nouveau système doit être en adéquation avec les politiques de coordination, de durabilité, d’adéquation et de participation. Il doit également être équitable garantissant le droit d’accès à une éducation de qualité pour tous, notamment à travers la mise en place des curricula, programmes adaptés et outils diversifiés d’encadrement éducatif, et un encadrement culturel, sportif et une réhabilitation conforme aux critères de qualité.
Les membres du Conseil appellent également au renforcement global et durable des capacités des acteurs éducatifs et des intervenants en éducation des personnes en situation de handicap. L’objectif est de soutenir la continuité d’un service éducatif inclusif fondé sur la coordination et la complémentarité entre enseignants, éducateurs et intervenants. Le CSE prône également la création d’une culture positive vis-à-vis du handicap et des personnes en situation de handicap permettant d’assurer une éducation de qualité qui réhabilite et promeut leurs potentialités.
La promotion de l’individu et son inclusion sociale et professionnelle constituent également un autre point sur lequel le gouvernement doit se pencher pour le Conseil. D’autant que le taux d’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap en âge d’activité ne dépasse pas 13,6%, dont 9% des femmes. Suivant la vision du CSE, cette promotion passe par le renforcement de la confiance en soi et la participation sociale comme l’une des formes de la promotion de l’individu.
Le Conseil suggère également la mise en place des plans de sensibilisation ciblant les différentes parties prenantes (les personnes en situation de handicap, les parents, les acteurs éducatifs, etc.), ainsi que des dispositions pour une conduite efficiente du changement.