Les détails de l'introduction en bourse de Mutandis

Après plusieurs années d’attente, Mutandis vient d’obtenir son visa de l’AMMC pour une introduction à la Bourse de Casablanca. Une opération de 400 millions de dirhams visant à financer la croissance du groupe qui affiche des ambitions africaines. Les détails.

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Adil Douiri, fondateur du groupe Mutandis.

C’est la mine réjouie qu’Adil Douiri, le fondateur du groupe spécialisé dans les biens de consommation quotidienne Mutandis, arrive le 16 novembre au siège de la Bourse de Casablanca. Et pour cause, l’ancien ministre du Tourisme appelait de longue date de ses vœux l’introduction en bourse de sa société créée en 2008, qui avait essuyé un premier refus en 2015 de la part du CDVM (ex-AMMC).

Interrogé sur les raisons de celui-ci, Adil Douiri avance que « Mutandis est innovante et atypique dans sa forme juridique, car il n’y a pas d’actionnaire majoritaire mais pour pouvoir fonctionner, il y a dans les statuts un actionnaire qui est le gérant ». Il précise qu’il a fallu faire évoluer les statuts sur la base de « benchmarks internationaux des best-practices », une étape achevée dès février 2018.

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Première cotation le 18 décembre

La valorisation, effectuée par la Société Générale et CFG Bank et basée sur une approche multicritère utilisant trois méthodes (DCF, multiples boursiers régionaux et références transactionnelles), a fixé le prix de l’action à 180 dirhams, soit une valorisation de 100% des fonds propres de 1,225 milliard de dirhams.

La période de souscription est fixée du 3 au 7 décembre, la première cotation aura lieu le 18 décembre et le règlement livraison le 21 décembre. Par ailleurs, les 50 premières actions sont acquises au prix de 170 dirhams.

S’agissant des dividendes, Adil Douiri estime qu’ils sont distribués « de façon confortable et généreuse » à 7,50 dirhams par action les années précédentes, et précise que « tous les nouveaux actionnaires qui souscriront en décembre toucheront le dividende complet, comme s’ils avaient été actionnaires toute l’année 2018 ».

Un actionnariat éclaté

L’opération porte sur un montant total de 400 millions de dirhams, dont une augmentation de capital de 215 millions de dirhams et une cession de parts de 185 millions de dirhams. Deux actionnaires actuels cèdent en effet leurs parts à cette occasion : premièrement, le fonds espagnol Inversiones Freira, qui détient 7,9% du capital, pour cause de liquidation du fonds, et d’autre part le Groupe Holmarcom, actionnaire à 7,3%, qui « était venu par amitié mais a vocation à prendre des participations majoritaires, ce qui ne correspond pas à la structure actionnariale de Mutandis, par nature très éclatée », explique Adil Douiri qui n’écarte pas la possibilité que les compagnies d’assurances d’Holmarcom (Atlanta, Sanad, CPA) se portent acquéreuses des nouvelles actions Mutandis.

Pour Adil Douiri, « Mutandis est faite pour n’appartenir à personnes, le capital a toujours été ouvert à tous ceux qui le souhaite, par volonté de grandir le plus vite possible. Il est actuellement composé d’environ 60 actionnaires mais nous espérons après l’IPO en avoir 1000, 2000, voire 4000 ». C’est la raison pour laquelle aucun minimum de souscription n’a été fixé.

Après l’introduction en bourse, 70% du capital sera flottant. Par ailleurs, BMCE Bank détiendra 10,4%, Amethis Magrheb Fund 7,5%, RMA Watanya 7,3%, Label Vie 3,1%, Chaabi Capital Investissement 5,9%, et Adil Douiri 8,1%.

7,2% de croissance annuelle du CA

Dans la note d’information de l’AMMC, les perspectives de croissance annuelle du chiffre d’affaires de Mutandis sont affichées à 7,2% par an, soit une prévision de chiffre d’affaire de 1,66 milliard de dirhams en 2021, contre 1,27 milliards selon les derniers résultats de l’exercice 2017. « Nous avons un chiffre d’affaires qui progresse avec une grande régularité, de manière prévisible », estime le fondateur de Mutandis. Le résultat net comptable devrait quant à lui afficher 70 millions de dirhams en 2018, contre 55 millions en 2017.

Par ailleurs, l’excédent brut d’exploitation connaîtrait une augmentation de l’ordre de 8,4% par an, soit une prévision de 225 millions de dirhams en 2021, contre 165 millions en 2017. Une EBE qui « grandit plus vite que le chiffre d’affaires, car une partie de nos charges sont fixes », précise le fondateur du Groupe, qui indique par ailleurs que ces prévisions de croissance sont « conservatrices, basées sur le même périmètre d’activité sans prendre en compte les développements futurs, et appuyées sur de taux de croissances déjà battus par le passé ».

Cap sur l’Afrique de l’Ouest

Pour convaincre les potentiels investisseurs, Adil Douiri met en avant les perspectives de développement de Mutandis basées sur plusieurs leviers de croissance. Il s’agit tout d’abord « d’élargir les gammes de produits », notamment dans le segment des produits de la mer, qui représente 36% du chiffre d’affaires, avec le lancement imminent de la marque de conserve haut de gamme « Marine » pour le marché marocain, là où historiquement les conserves de poissons du groupe étaient à destination des marchés africain et européen.

Adil Douiri espère par ailleurs « toucher les 70.000 épiceries du Maroc, en s’appuyant sur un système de forte de vente sur le terrain, car l’épicier est le principal client de Mutandis ». Les produits du groupe sont actuellement distribués dans un réseau de 35.000 épiciers, en plus des supermarchés et hypermarchés.

Mais Mutandis, qui exporte déjà en Afrique, mais aussi en Europe et au Moyen-Orient affiche ses ambitions d’implantation africaines. « Le succès marocain, on peut le rééditer en Afrique de l’Ouest sans difficultés », estime Adil Douiri. Le groupe, qui fait déjà de l’emballage avec des distributeurs partenaires au Ghana, en Guinée Conakry et bientôt au Mali, étudie désormais la possibilité de fabriquer localement des détergents et des bouteilles alimentaires, deux activités qui représentent respectivement 41% et 18% du chiffre d’affaires actuel. Adil Douiri confie devoir encore « finaliser le pays dans lequel Mutandis va s’installer ».

Là où, depuis sa création, le groupe avait mis en place une stratégie de rachat d’actifs existants (sociétés, marques, usines en difficultés financières où groupes familiaux ne disposant pas d’héritiers) pour « grossir le plus vite possible », Adil Douiri affirme maintenant que son groupe a « largement la taille pour construire des usines nouvelles ». Sur les 9 usines existantes, 2 ont déjà été construites par Mutandis.