En juillet, le Chef du gouvernement avait entamé un nouveau round de « consultations » pour sortir le Conseil de la concurrence de sa léthargie. Une lueur d’espoir vite éteinte. Puisque la nomination de ses membres, dont le mandat est arrivé à terme en 2013, semble toujours bloquée. « Il n’y a rien de nouveau. Tout ce qu’il y a de nouveau date d’avant le mois d’août dans la mesure où je sais que le Chef du gouvernement faisait des consultations pour la nomination des membres », nous confie Abdelali Benamour, président du Conseil de la concurrence.
Paralysée depuis cinq ans, cette institution constitutionnelle est ainsi dans l’impossibilité de remplir son rôle, ne pouvant être saisie ni s’autosaisir. Et ce à un moment où l’ancien patron des patrons, Hassan Chami, avait dénoncé l’évolution de certains secteurs sans garde-fous. Ce blocage intervient également alors qu’une quarantaine d’intellectuels et de militants ont appelé à une réactivation du Conseil dans une pétition appelant à la suspension du boycott de Centrale Danone, diffusée au mois de juillet.
« Quand le Conseil était opérationnel, la loi était inique et ne nous permettait pas de travailler. Aujourd’hui alors que nous avons un texte législatif, un des meilleurs au monde, nous n’avons pas de Conseil de la concurrence parce que ses membres n’ont pas encore été nommés », regrettait Benamour dans nos colonnes en 2016. Aucune explication officielle n’a été donnée par le gouvernement pour justifier ce « retard ».
Pourtant, comme l’indique la loi régissant le fonctionnement de l’institution – parue au bulletin officiel en 2014 -, il s’agit d’une procédure ordinaire : douze membres sont nommés par décret, sur proposition de l’autorité gouvernementale concernée et du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire « en ce qui concerne les deux membres magistrats », tandis que le président est nommé par le roi.
Dans le programme du gouvernement, présenté en avril 2017, Saâdeddine El Othmani avait pourtant évoqué le rôle du Conseil de la concurrence, promettant de le sortir de sa paralysie afin qu’il « remplisse son rôle en garantissant une concurrence libre ». « Si le conseil était là, il aurait pu jouer son rôle de régulateur. L’économie de marché est une excellente chose, mais l’économie de marché a besoin de régulation. Or, le Maroc fonctionne sans régulation depuis le début de ce millénaire », regrette son président qui attribue le retard de sa mise en place à des lobbys qu’il ne nomme pas.
« On nous soutenait dans les discours. Mais dans la réalité, on agissait à travers les lobbys pour bloquer notre action », affirmait-il en 2016 et à nouveau en 2018. « Chacun défend ses intérêts. Ils croient qu’en maintenant leurs positions, ils vont gagner plus. Ils ne voient pas tout ce que peut apporter la concurrence de positif. »
Une source au gouvernement nous apprend que l’ancien Exécutif avait également tenté de débloquer la situation, sans succès. « Le gouvernement avait fait ce qu’il avait à faire », nous dit notre source, sans expliquer où se situe le blocage. Le Conseil de la concurrence est-il ainsi condamné à rester inactif ?
En tout cas, pour Benamour il n’y a encore rien de nouveau sous le soleil. « Pour la présidence comme pour les membres, rien n’est fait jusqu’à présent », nous dit-il, dépité.
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