Smyet bak ?
Ahmed.
Smyet mok ?
Aïcha.
Nimirou d’la carte ?
Heureusement, je l’ai perdue.
Nimirou d’l’passeport ?
Je l’ai perdu aussi, vous l’avez compris. Pour TelQuel, je perds tous mes papiers avant d’atterrir au Maroc.
Comment toutoupelle ?
Si j’ai bien compris, moi je parle en français et vous avec l’accent portugais. Ça me va. Alors, je m’appelle Jalal, de mon vrai nom patrimonial.
De Jalal à D’jal…
C’est le diminutif qu’on m’a donné dans le quartier. Fallait trouver un nom d’artiste, j’ai mis D’jal avec une apostrophe, mais pas attaché pour ne pas qu’il y ait de problème religieux là-dessus. Donc, D’jal est mon nom de scène. Marocain pour mon plus grand bonheur.
Ça sonne un peu comme D’jamel. Vous êtes décidément sur les pas debbouziens ?
Exactement. On me disait souvent que Jalal ressemble à D’jamel. Il fallait que je me détache, donc D’jal. Au moins, on ne peut pas dire que c’est du D’jamel ou quoi que ce soit.
Vous dites pourtant que c’est votre père spirituel…
Oui, c’est mon père spirituel. C’est mon pote, mon ami, mon frère. Je lui dois beaucoup. C’est plus que mon père spirituel, c’est une belle personne. Faut que les Marocains le sachent, même si parfois il fait des erreurs comme tous les grands artistes. C’est une belle, très belle personne.
Pour votre tournée internationale, vous sillonnez les villes françaises, suisses, anglaises… Vos déplacements, vous les faites en Houloucouptère ?
Non, pas en Houloucouptère (référence à son célèbre sketch, ndlr). Je l’ai déjà fait, mais c’était à La Réunion. Je me déplace en avion, en train, à la nage s’il le faut. Partout où on m’appelle, je réponds présent pour exercer mon métier, en l’occurrence faire rire les gens.
Epilogue de la tournée, un spectacle à Casablanca. Vous êtes à la recherche de la baraka ?
(Rires) Evidemment, je cherche à Casablanca et au Maroc la baraka, l’amour, le retour aux sources, mon peuple, mes origines et, surtout, rire avec les Marocains. Car c’est toujours bon de rire avec eux, les Casaouis en particulier.
C’est facile de faire rire les Marocains ?
En fait, ce n’est pas évident. Mais quand vous y arrivez, c’est extrêmement agréable. Jouissif. Un réel plaisir.
Votre casquette noire, vous comptez l’enlever un jour ?
Bien sûr, je compte la retirer. Je l’enlève tous les jours avant de me laver (rires). A vrai dire, je la mets pour qu’on puisse me reconnaître, c’est un signe distinctif. Pour garder mon identité finalement. Parce que si je voulais me faire faire une perruque ou poser des implants, ça m’aurait coûté un bras. Une casquette noire, c’était beaucoup moins cher.
Vous en avez combien ?
Un bon paquet. Là où je vais, on m’offre une casquette. Vous voyez, on me reconnaît et le choix vestimentaire forge mon identité auprès du public.
Antillais chef de bord du Titanic, pigeon parisien désabusé… pour ne citer qu’eux. Dans vos sketchs, vous vous emparez souvent des accents pour faire rire. Un talent exploité ou un manque d’inspiration ?
Mon quartier, c’était les Nations Unies. Il y avait des Antillais, des Indiens, des Chinois, des Pakistanais, des Vietnamiens, des Espagnols… Je passais mon temps à imiter tout le monde. Je m’inspire de mon quotidien, de la vie, des gens, de tout ce que je peux entendre, voir, ressentir…
On évoque pourtant un racisme caché…
Non, pas du tout. C’est l’intégration qu’il faut dire, redire et redire en France, surtout avec ce qui se passe en ce moment. Et puis les accents… Moi ma culture, elle est française. Je suis français d’origine marocaine. J’ai vécu dans un quartier où il y avait des Antillais, des gens des Balkans… C’est pour rendre hommage à cette France multiculturelle que je m’empare des accents. Comme on peut le voir ces derniers temps, le racisme se propage et est monté très haut lors des dernières élections. Donc voilà, je le fais, comme d’autres humoristes évidemment, pour dire que ce sont toutes ces patries, toutes ces cultures qui font la force de la France.
De mauvaises réactions sur vos sketchs, vous en avez eu ?
Mes parents étaient les premières personnes que j’ai caricaturées. Je le fais pour rire avec les gens. Le reste n’est que le fruit d’une mauvaise interprétation de mes propos. En fait, je n’ai jamais eu de problèmes avec des communautés, pas même avec les Portugais. On ne m’a jamais taxé de racisme car je me suis moqué de tel ou tel accent. A chaque fois que les gens me regardent, ils me disent que je suis leur porte-drapeau. C’est étrange comment j’ai été adopté par les Portugais.
Justement, caricaturer l’accent du braqueur portugais, votre personnage fétiche, c’est suffisant pour nous qualifier au deuxième tour du Mondial selon vous ?
(Rires) Vous savez, j’ai assisté à la finale de l’Euro 2016 à Paris qui opposait la France au Portugal. J’étais dans les tribunes avec les Portugais. J’avais même fêté la victoire avec eux car ils m’avaient adopté. J’étais un peu triste quand même de voir mon équipe de France perdre, je connais même certains joueurs des Bleus. Mais j’étais heureux parce que je vis une belle aventure grâce à la communauté portugaise. Et aussi grâce à ma communauté marocaine. Au fond, j’ai la chance de jouer au Québec, au Liban, aux Etats-Unis, partout dans le monde. Je pense que je suis international, un enfant du monde.
On l’a compris. Mais concrètement, le Maroc pourrait-il se qualifier pour le deuxième tour dans un groupe qualifié de “groupe de la mort”, où il a hérité de l’Espagne, du Portugal et de l’Iran ?
Il ne faut surtout pas qu’ils aillent dans les bars. Parce qu’un Marocain qui rentre dans un bar, on sait à quelle heure il rentre mais on ne sait pas à quelle heure il en sort. Ne pas consommer de vodka et tout ira bien, inchallah. Je supporterai les Lions de l’Atlas. Et quand ils affronteront les Portugais, je serai avec les Russes (rires).
Après Jamel Debbouze, Teddy Riner, Maître Gim’s… Un café parisien avec Mohammed VI, c’est pour bientôt ?
J’ai failli rencontrer Mohammed VI. Jamel Debbouze m’avait invité un jour. J’étais au Liban et lui au Gabon. Il m’a dit qu’il y avait une tournée et que j’allais rencontrer le roi. Ça a failli se faire. Malheureusement, je ne pouvais pas me déplacer, j’avais un spectacle au Liban. Voir le roi, c’est une fierté. Ça veut dire qu’il s’intéresse à tout. Les Marocains lui doivent beaucoup. Je le dis d’autant plus que je suis toujours en déplacement, je joue en Afrique subsaharienne, au Moyen-Orient… Je me rends compte de la chance qu’on a au Maroc. Bien sûr, il y a plein de choses à changer, plein de combats à mener, des inégalités flagrantes à éradiquer. Mais, disons-le, les Marocains ne se rendent pas compte de la chance de vivre dans un pays comme le nôtre.
ANTÉCÉDENTS
1977 : Voit le jour à Champigny-sur-Marne (France)
2006 : Intègre le Jamel Comedy Club
2007 : Joue son premier spectacle D’jal, one man groove
2013 : Participe au Marrakech du Rire
2015 : Joue son deuxième one man show Just D’jal
2017 : Clôture sa tournée internationale au Mégarama de Casablanca.
Le PV
C’est à Casablanca que l’humoriste français d’origine marocaine, Jalal de son vrai nom, a décidé de clôturer sa tournée internationale avec son spectacle Just D’jal. Deux heures avant son très attendu one man show au Mégarama, l’humoriste révélé au Jamel Comedy Club (JCC) nous reçoit dans ses loges. Avec sa caquette noire vissée sur la tête, difficile de ne pas reconnaître le comédien éclectique aux multiples personnages hilarants. Un choix vestimentaire assumé par celui qui espère ainsi garder au chaud ses idées désopilantes. Vannes, anecdotes, caricatures d’accents… D’jal se livre au jeu de l’interro sans détours et avec un humour délirant. A l’image de son spectacle à l’univers improbable et déjanté. Comme quoi, le JCC n’arrête pas de faire des petits.
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