On creuse, on creuse. Driss Jettou — heureusement que la Cour des comptes est là — révèle ce que beaucoup savaient déjà. Les finances publiques de notre pays sont dirigées par des gens qui, au mieux, ne savent pas compter et, au pire, usent d’artifices pour présenter un bilan meilleur que la réalité. Une autre hypothèse, plus clémente, serait que ces fonctionnaires zélés éviteraient ainsi au Maroc les remontrances des institutions financières internationales.
Nous aurions préféré que, pour éviter ces remontrances, ils travaillent plutôt à améliorer réellement les finances publiques, en suggérant une stratégie ou ne serait-ce qu’en alertant. Mais nous espérons trop.
Un responsable public nous confiait avoir bien alerté notre argentier : “Ton rôle n’est pas d’embel- lir la mariée, au contraire, tu te dois d’être plus pessimiste que la réalité.” En vain. Mohamed Boussaïd est un optimiste chevronné ou un exécutant résilient. A ce stade, nous ne savons plus quoi choisir, et pour être juste, Mohamed Boussaïd n’est pas le problème.
On creuse toujours. Bientôt trois mois que le Maroc —dont le système éducatif est en panne — n’a pas de responsable pour ce secteur. L’Education, sur laquelle repose l’avenir de tous les Marocains et du Maroc, est privée de timonier, sans que l’on sache vraiment pourquoi. Idem pour la santé. On creuse encore. La rente atteint des niveaux inquiétants pendant que les crises sociales se multiplient, et sans que des intentions de changement ne soient formulées. Ceux qui amassent des milliards dans le Maroc d’aujourd’hui ne font rien de plus qu’acheter, revendre et prendre leur marge au passage. Du pur négoce, ou encore de l’immobilier, qui ne tirent pas le pays vers le haut alors même que nous avons besoin d’initiatives dans l’industrie (lire dossier « Made in Morocco dans les kiosques du 12 au 18 janvier 2018). Qu’un pouvoir veuille enrichir des personnes, même artificiellement, car elles peuvent lui être utiles, ça s’est vu partout, même dans les Etats les plus démocratiques, à une période de leur histoire. Mais ces fortunes ne peuvent pas se contenter de traire la bête, il faut contribuer à la création de valeur et de richesses pour les autres habitants de ce pays.
Il suffirait d’un peu d’espoir. La Coupe du monde ne peut pas être le seul événement qui va mobiliser les Marocains. Deux ou trois mesures fortes, rien de plus. En faveur de la jeunesse, pour lui permettre d’envisager plus sereinement son avenir. Une initiative prouvant à tous les Marocains qu’ils sont importants. Au moins une volonté. Quelques fous s’égosillent encore à appeler le gouvernement à l’action— sans grande conviction —, et le Palais surtout. Le degré d’inertie est alarmant, sans qu’aucune raison objective ne puisse la justifier. A moins que les Marocains soient punis, mis au piquet par leurs dirigeants. Qu’avons- nous donc fait pour mériter autant de désintérêt