Salut à vous les amis, Zakaria Boualem vous souhaite la bienvenue et espère que tout va bien chez vous : le travail, la santé, les propriétaires de la maison, etc. Hamdoulillah, lui ça va. Ça a été une semaine un peu spéciale, il faut bien le dire. A moins que vous n’habitiez sous l’eau, vous savez que le WAC a été sacré champion d’Afrique samedi soir. Ce titre mérité a été célébré avec un enthousiasme légitime et spectaculaire, c’est un Rajaoui convaincu qui vous le dit. Notez bien que dans la phrase précédente, en quelques mots à peine, le Guercifi vient d’épuiser son crédit fair-play pour les deux prochaines années. Il ne faut donc pas que cette affaire se reproduise trop souvent, et merci.
Samedi prochain, ça risque d’être encore plus puissant*. Car, vous le savez, nous allons nous qualifier pour la Coupe du Monde en maîtrisant la Côte d’Ivoire sans trembler. Bien entendu, la possibilité d’une déroute existe, avec la terrifiante plongée dans les ténèbres qui l’accompagne. Mais ne venez pas déranger le Boualem avec ce pénible scénario, il essaye depuis plusieurs semaines de développer une pensée positive autour de ce match. Si on se plante, on aura tout le temps de gémir sur notre sort. Nous allons au contraire visualiser ensemble les étapes de la gloire, c’est une technique qu’il a lue sur Internet. Nous allons donc festoyer avec acharnement dès la fin du match, nous faire des bisous, et devenir soudain un pays joyeux et fraternel. Nous allons vivre sur un nuage pendant les huit mois qui nous séparent de la compétition, nous allons nous sentir importants. Et si jamais nous réalisons un exploit en Russie, nous pourrions bien fonder un empire sans le moindre complexe. Voilà. Il faut à présent se poser des questions sur cette étonnante capacité du football à déclencher ce genre de crise d’euphorie collective. Rien ne peut se comparer à la secousse tellurique qui parcourt une société comme la nôtre un soir de victoire. Par quel mystère de la psychologie collective en sommes-nous arrivés à considérer un simple jeu comme porteur d’une identité, comme une source de fierté ? Pourquoi avons nous donné au foot la télécommande de nos humeurs ? Essayez un peu sur les réseaux sociaux : vous pouvez insulter à peu près toutes les institutions sans déclencher de tsunami, mais si vous attaquez un club, vous trouverez une masse importante de gens raisonnables qui pètent un câble. Pourquoi ?
1. Peut-être que nous avons tous un peu besoin de nous retrouver ensemble, et que c’est le foot qui le propose finalement. Parce qu’il faut être clair, les amis : Le Matin du Sahara a beau évoquer régulièrement la “liesse populaire”, et “l’enthousiasme des habitants”, on n’a jamais vu des gens se réveiller en jubilant à cause d’une politique des barrages ou d’un virage écologique. On n’a jamais vu un type embrasser un policier sous l’émotion d’une réforme de l’éducation nationale.
2. Peut-être aussi que notre paisible contrée ne propose pas vraiment de projet collectif mobilisateur, et que finalement il n’y a que le foot qui sache nous dire où nous voulons aller (en Coupe du Monde). Et c’est tellement plus simple : il est plus probable d’aller en Coupe du Monde que de voir le Maroc Moderne achevé de notre vivant.
3. Peut-être enfin que nous avons besoin de fierté, comme tout le monde, et que les motifs ne courent pas les rues. Irriguer l’égo, c’est important. Attention, on parle de vraie fierté, de réalisation collective populaire, pas des évènements frelatés qu’on nous présente mécaniquement comme historiques. Pour toutes ces raisons, et sans doute d’autres qu’il a oubliées, le Boualem considère cette qualification à la Coupe du Monde comme très importante, elle pourrait transfigurer notre pays. C’est absurde, mais c’est comme ça. Voilà, le stress m’empêche d’aller plus loin, c’est donc tout pour la semaine, et merci.
*chronique rédigé avant la qualification du Maroc. Prémonitoire vous avez dit?