Saad Eddine El Othmani s’est prêté au jeu de la grande interview télévisée, en direct sur les deux chaînes nationales Al Oula et 2M dans la soirée du 1er juillet, lors d’une émission spéciale consacrée en très grande partie à la crise d’Al Hoceima.
Interrogé par les journalistes Fatima El Baroudi, Abdellah Tourabi, et Samir Chaouki, le chef du gouvernement était comme à son habitude technique, prudent, mais il a (enfin) livré la position de son gouvernement sur les manifestations du Hirak qui secouent le Rif depuis près de sept mois.
Lors de cet entretien qui a duré près d’une heure et demie, Saad Eddine El Othmani a fait un important aveu: le gouvernement n’aurait pas dû accuser les protestataires du Rif de séparatisme. Interpellé par Abdellah Tourabi sur une réunion des partis de la majorité où ces accusations avaient été portées, El Othmani a d’abord rappelé que le communiqué officiel publié à l’issue de cette rencontre – qui avait été tenue à l’appel du ministre de l’Intérieur – ne contient pas ces accusations. Ces dernières ont été portées par « des dirigeants de partis politiques« , a-t-il nuancé .
« Je pense que cela n’aurait pas dû être dit. Cette page a été tournée et il ne faut plus y revenir », a ajouté El Othmani. Devant l’insistance d’Abdellah Tourabi qui lui répète le terme « erreur« , le chef du gouvernement finit par concéder qu’il y en avait bien eu.
Apaisement
Que compte faire le gouvernement pour rattraper cette erreur? Samir Chaouki a notamment interpellé El Othmani sur le sort des détenus du Hirak. « Personne ne veut que son frère soit arrêté et jugé« , commence par dire le chef du gouvernement. Il explique toutefois que le pouvoir exécutif ne peut pas empiéter sur la bonne marche de la justice. « Nous n’intervenons pas dans le travail de l’appareil judiciaire, en principe je ne dois pas parler de cela, mais je dis que si les conditions de l’apaisement sont réunies, peut-être que cela va aider. Mais ce n’est pas entre les mains du gouvernement ».
El Othmani rappelle un point: le respect des garanties pour un procès équitable. À ce titre, il évoque les instructions royales pour enquêter sur toute allégation de torture et la préparation d’un rapport du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) qui fera le point sur la situation.
Il assure aussi que la commission d’enquête mise en place sur ordre royal sanctionnera de manière ferme les officiels responsables des retards dans la mise en œuvre des chantiers de développement.
Le chef du gouvernement a également reconnu le caractère pacifique de la plupart des manifestations qui se sont déroulées à Al Hoceima. Il en a à la fois crédité les protestataires et les forces de l’ordre: « Je salue les gens qui ont protesté pendant plusieurs mois et qui sont restés globalement pacifiques (…), mais on doit aussi saluer les forces de sécurité, qui dormaient sous les tentes et prenaient le ftour dans les fourgons. Ils ont fait preuve de patriotisme et de retenue ».
Refusant de commenter spécifiquement les violences survenues à Al Hoceima le jour de l’Aïd, Saad Eddine El Othmani a évoqué plus globalement les échauffourées de ces derniers mois dans la région. Sans dresser un véritable bilan, il a tenu à présenter la situation de manière équilibrée: « Je dis que des manifestants ont été frappés, mais aussi des policiers. Il y a deux policiers qui sont dans le coma, en soins intensifs« .
Saad Eddine El Othmani a voulu pendant cette émission spéciale adresser un message d’apaisement: « Je fais un appel aux citoyens d’Al Hoceima. Je leur dis que le gouvernement prend les choses très au sérieux. Il y a une accélération des chantiers qui ont commencé« . Le chef du gouvernement a annoncé que son équipe tiendra désormais une réunion hebdomadaire consacrée à l’état d’avancement des projets dans la région. « Il y a des ministres qui ont visité quatre fois la province ces derniers temps. Cet intérêt va continuer« , a-t-il promis.
https://www.youtube.com/watch?v=Su-czD84vCg
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