Le nouveau secrétaire général du RNI, Aziz Akhannouch, parcourt le royaume, d’Agadir à Tanger en passant par Rabat. Objectif : rencontrer les militantes et militants du parti de la colombe afin de faire un état des lieux et mobiliser jeunes, femmes et professionnels. « C’est un homme de terrain. Malgré son agenda chargé, il met en place une véritable communication de proximité et adopte un discours direct pour expliquer son programme », observe Laïla Ouachi, experte en communication.
Les nombreux voyages du ministre de l’Agriculture et de la pêche ont pour objet de se rapprocher des membres du parti, grand perdant des élections législatives du 7 d’octobre avec seulement 37 sièges remportés. Désormais, il souhaite « récupérer la base du parti qui avait été laissée de côté par son prédécesseur Salaheddine Mezouar », conclut Ouachi. « C’est quelqu’un qui écoute beaucoup, c’est inhérent à sa personnalité », raconte, en off, un collaborateur proche du chef de parti.
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Mais pour Karim Douichi, qui avait contribué à la communication du RNI lors des élections de 2011, « Akhannouch n’arrive pourtant pas encore à trouver son style ». Et de déclarer : « Sur le plan de la communication, sa tournée n’est pas compréhensible ». Selon lui, elle aurait dû être réalisée avant les élections législatives du mois d’octobre et non maintenant.
Le style Akhannouch, c’est aussi le consensus et la communication non agressive. « Dans son discours, il met le pays avant le parti. Il n’est pas dans le militantisme idéologique », analyse toujours Laila Ouachi. Mais cette attitude pourrait ne pas suffire pour ce politicien de premier rang, qui doit faire face à des bêtes politiques comme Chabat ou Benkirane. « En le présentant comme l’homme fort incontournable, Benkirane met tout le poids du blocage politique sur Akhannouch », observe Karim Douichi qui estime qu’il est temps pour le patron arrivé à la tête du RNI de se défaire de son image de ministre technocrate.
Une communication de ministre, pas de leader politique
« Aziz Akhannouch a un potentiel énorme », concède Karim Douichi. Celui que l’on nomme « Si Aziz » ou « l’enfant de Souss » a réussi à construire un storytelling bien ficelé. Le natif de cette région amazighe du sud-ouest du Maroc s’est bâti une image d’homme politique sérieux et pragmatique, muni de son slogan sans cesse martelé « Agharass agharass »( droit devant, ndlr).
« Partout dans la presse et sur les réseaux sociaux, l’histoire d’Akhannouch se répand. Cette romance de l’homme d’affaires, produit de l’école publique, met en avant sa personnalité proche du citoyen », détaille Anouar Zyne, analyste en communication politique et ancien de l’UC (Union constitutionnelle). « Attention, tout cela n’est pas faux ! », prévient-il. Il précise que le storytelling est le fait de « mettre en avant » certains aspects. Par exemple, annoncer qu’il n’acceptait pas de salaire a été un geste très fort au moment où il a pris ses fonctions de ministre. Il faut dire que ce riche homme d’affaires de 55 ans possède une fortune de 1,7 milliard de dollars, selon le classement Forbes de 2015, ce qui le hisse à la 2e place des fortunes marocaines. Une richesse qu’il a construite grâce au groupe familial Akwa, qui chapeaute plus de soixante entreprises, dont deux sont cotées à la bourse de Casablanca.
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« Il ne faut pas oublier qu’Aziz Akhannouch est un homme d’affaires qui a l’habitude de travailler avec des résultats. Il gère ses dossiers comme s’il gère une entreprise », énonce Laila Ouachi. « Ce storytelling, largement répandu, est de l’acabit d’un ministre, et non pas d’un leader politique », ajoute Karim Douichi, pointant du doigt le fait qu’il ne donne aucune interview. « Il faut qu’il change de stature, car il est désormais chef de parti ».
Comme un air de campagne
Le parti et les proches d’Aziz Akhannouch se mettent en branle pour promouvoir son image politique. Ces derniers temps, toute son activité revêt l’aspect des « allures de campagne », analyse Anouar Zyne. Le RNI travaille son image sur les réseaux sociaux et il est très actif sur le digital alors que les élections sont déjà passées. En août 2015, le RNI avait lancé sa nouvelle stratégie digitale. Moncef Belkhayat, membre du bureau politique du parti et en charge du projet, avait précisé les objectifs de l’opération : atteindre la barre de 50 000 fans sur la page Facebook fin 2015 et 10 000 abonnés sur Twitter. Si ce dernier n’a pas décollé avec seulement 6 846 « followers » fin 2016, la page Facebook compte, elle, 96 826 « likes ». Régulièrement alimentée, cette page couvre de façon continue les activités du RNI et de ses responsables. « Ils ont une véritable écriture Web qui fonctionne », constate Anouar Zyne.
Alors que tout le paysage politique a retrouvé son calme après les élections, le RNI, porté par Aziz Akhannouch, redouble d’efforts. « On voit qu’il a une communication maîtrisée, contrôlée, mais il n’y a aucune spontanéité. Chaque mot et chaque image ont un sens », analyse Anouar Zyne.
L’ex-journaliste remarque que les matériaux sont soignés, les meetings maîtrisés et bien agencés. « C’est un travail de professionnels et non pas de militants », précise-t-il. « Il y a donc une nouvelle stratégie claire qui est en rupture avec celle de Mezouar qui avait une communication moins raisonnable et plus centrale », conclut Zyne.
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