Durant cinq ans passés à la tête du ministère de la Santé, Houcein Louardi ne s’est pas fait que des amis. Il s’est notamment mis à dos une partie des étudiants médecins en voulant instaurer le service médical obligatoire, avant de faire machine arrière. Sans oublier qu’il s’est brouillé un moment avec les laboratoires pharmaceutiques. Son ministère vient de publier un document nommé « Principales réalisations ». Les différents accomplissements réalisés durant son mandat y sont énumérés, de la construction de nouvelles structures médicales à l’élargissement de la couverture médicale, en passant par la baisse des prix de médicaments. L’occasion pour Telquel.ma de faire le bilan de l’action de ce ministère, en comparant ses réalisations aux objectifs qu’il s’était fixés en 2012, sans oublier de passer au crible les sujets qui ne sont pas évoqués dans cette brochure.
Engagements tenus
Prix des médicaments : « Le développement d’une politique pharmaceutique nationale et la révision des prix des médicaments figurent également parmi les priorités de notre stratégie sectorielle », peut-on lire dans le document que nous utilisons comme référence. Or, c’est indéniable : Louardi a gagné son pari. Aujourd’hui, les prix des médicaments sont fixés par les autorités. Le prix du princeps (le médicament originel) est calculé selon un benchmark de six pays et celui du générique est forcément moins élevé (une grille tarifaire permet de le fixer). Quelque 2 600 médicaments ont été concernés par cette baisse.
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Couverture médicale : Le ministère de la Santé voulait étendre la couverture médicale de base à d’autres catégories de personnes ne bénéficiant pas de l’AMO (assurance maladie obligatoire). C’est chose faite. Les étudiants peuvent maintenant en profiter. Et les indépendants ne devraient pas tarder (le texte est actuellement discuté au Parlement), tout comme les parents des cotisants. Aussi, il était prévu d’élargir le panier de soins compris dans l’AMO. Là aussi, la promesse a été tenue. Les soins dentaires et des pathologies supplémentaires sont désormais couvertes, comme l’asthme et le cancer du sein, par exemple.
Augmentation des effectifs : La feuille de route prévoyait une augmentation des postes budgétaires. D’après le bilan avancé, quelque 14 000 personnes médecins et infirmiers ont été recrutés ces dernières années. En revanche, le document ne précise pas s’il s’agit uniquement de nouveaux postes budgétaires ou si ce nombre comprend le remplacement des départs à la retraite.
Il ne s’agissait pas d’un objectif édifié dans la stratégie sectorielle, mais le budget du ministère de la Santé a augmenté ces dernières années. Il a enregistré une hausse de 21 % entre 2012 et 2016.
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Les objectifs non réalisés
La mortalité maternelle : Le ministère avait élaboré, avec l’aide des Nations unies, un plan d’action pour réduire la mortalité maternelle. Visiblement, ses objectifs étaient trop ambitieux puisqu’il projetait de réduire le ratio à 50 pour 100 000 naissances vivantes (MMR) en 2016, soit diviser par deux le nombre de mères qui décèdent en accouchant chaque année. Le ministère ne communique pas sur le sujet mais d’après un rapport onusien, en 2015, ce ratio était encore de 121, soit deux fois plus élevé que prévu.
Urgences : Les urgences constituaient le premier combat du ministre, lui-même urgentiste de formation. En cinq ans, des avancées ont été enregistrées. Comme annoncé, quatre hélicoptères ont été mis à disposition du SMUR.
En revanche, la première action prévoyait de créer 80 unités d’urgence médicale de proximité en cinq ans. Seules 59 sont sorties de terre, d’après la communication du ministère. Aussi, la feuille de route prévoyait la mise en place de 11 SAMU régionaux. La brochure du ministère ne fait pas état du nombre de SAMU régionaux, et contacté par Telquel.ma, il n’a pas souhaité préciser cette information. Mais nous n’avons pas réussi à comptabiliser 11 SAMU régionaux. Casablanca n’en est toujours pas doté.
Santé mentale : La santé mentale était l’objectif numéro 2 du ministère. Dans sa brochure, le ministère énumère ses réalisations en la matière : construction de trois hôpitaux régionaux spécialisés en psychiatrie, de 13 centres d’addictologie, d’un observatoire des drogues et addiction, la révision de la loi 1959 relatives aux maladies mentales ou encore la fermeture de Bouya Omar. En revanche, l’action 86 de la stratégie prévoyait la mise en place d’un programme pour lutter contre le stress au travail, à l’origine de beaucoup de cas de dépression. Or, la brochure n’en fait pas état. Même interrogation quant à la formation de nouveaux psychiatres.
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Planning familial : La stratégie sectorielle comptait intégrer les prestations de la planification familiale dans le panier de soins remboursables par l’AMO. Cette mesure n’a visiblement pas été prise : elle n’apparaît toujours pas sur le site officiel de la CNSS, détaillant les prestations dénombrées. Interrogé à ce sujet, le ministère n’a pas souhaité l’évoquer.
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