Le temps d’un week-end, François Hollande et Mohammed VI se sont employés à démontrer l’amitié retrouvée entre la France et le Maroc. Après un an de brouille diplomatique que le président français qualifie de « période difficile », les deux chefs d’État ont multiplié les signes de réconciliation. Cette démonstration culmine au terme d’une réception de 200 invités au palais royal de Tanger, lorsque Mohammed VI propose à François Hollande une virée en voiture. L’anecdote est savoureuse. Au volant d’un rutilant cabriolet Mercedes, le roi emmène son hôte, sur le siège passager, pour une petite balade « by night » sur la corniche de Tanger. Pendant une demi-heure, la sécurité des deux hommes aurait été réduite au minimum, avec une simple voiture pour les suivre.
François Hollande, cité par plusieurs médias français, explique que le roi lui » a proposé d’aller faire un tour en ville. « J’ai trouvé que c’était délicat comme proposition (…) Il voulait me montrer qu’il circule parmi son peuple très librement, qu’il reçoit un accueil très chaleureux, et qu’il aime cette ville, qui était celle de sa grand-mère ».
Former les imams français au Maroc
Au-delà des symboles, cette visite officielle a permis la signature d’un accord actant la formation d’une cinquantaine d’imams français à l’Institut Mohammed VI de Rabat. Une déclaration conjointe a été signée samedi 19 septembre pour stipuler que cette formation devra promouvoir « un islam du juste milieu » conforme aux « valeurs d’ouverture et de tolérance », mais aussi « pleinement ancré dans les valeurs de la république et de la laïcité ». Selon l’entourage du président français, « une cinquantaine d’imams français » pourraient suivre chaque année une formation religieuse à Rabat, complétée par un enseignement civique assuré par la France. Ils « pourront ensuite faire la démonstration en France que l’islam est une religion de paix », selon François Hollande.
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Réchauffement climatique
Dimanche, les deux chefs d’État ont signé un « Appel de Tanger » en vue de la prochaine conférence sur le climat (COP21) à Paris (30 novembre-11 décembre) et de la suivante à l’automne 2016 à Marrakech. Les deux dirigeants ont promis de travailler « main dans la main pour la réussite de ces deux rendez-vous ». Le Maroc fait figure de bon élève dans les promesses de lutte contre le réchauffement climatique. Il est le deuxième pays africain à avoir remis sa contribution pour la conférence de Paris, avec le projet de passer à 42 % d’énergies renouvelables d’ici à 2020 et un objectif ambitieux de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030.
Rare apparition d’Abderrahmane Youssoufi
L’ancien premier secrétaire de l’Union socialiste des forces populaires (USFP), Abderrahmane Youssoufi était présent auprès de Mohammed VI et François Hollande lors de leurs rencontres. Il s’agit de la première apparition dans un événement aussi officiel de celui qui a dirigé le gouvernement d’alternance. Selon des sources concordantes de Telquel.ma, une « amitié » lie Abderrahmane Youssoufi et François Hollande. Ce dernier n’a pas caché « son admiration et sa considération » pour le geste royal d’associer Youssoufi aux rencontres. Le Tangérois de naissance entretient de forts liens d’amitié avec la classe politique française et notamment avec les socialistes.
Cocorico couacs
Malgré tous les efforts déployés par les deux chefs d’État pour démontrer l’amitié qui unit leurs deux pays, quelques couacs protocolaires sont survenus. Dès l’atterrissage de l’avion présidentiel, François Hollande a fait attendre le roi deux longues minutes avant de descendre sur le tarmac. Sur ces images, on sent l’impatience et l’incompréhension de l’ensemble de la délégation marocaine, les yeux rivés sur la porte de l’appareil aux couleurs de la République française. Par la suite, on sent un François Hollande un peu gauche avec les formalités protocolaires.
Lors d’une réception au palais royal de Tanger, François Hollande tend son verre vers Mohammed VI, pour lui proposer un toast. Sauf que pour le commandeur des croyants, pas question de trinquer ! Moment de gêne qui rappelle celui dont François Hollande avait été à l’origine, dans les mêmes circonstances, lors de sa dernière visite en 2013…
Le Maroc est une «maîtresse avec laquelle on dort toutes les nuits, dont on n’est pas particulièrement amoureux mais qu’on doit défendre», aurait en effet affirmé en 2011 l’ambassadeur de France pour les Nations Unies, Gérard Araud. C’est en tout cas ce qu’avance l’acteurespagnol Javier Bardem, cité par Le Monde à l’occasion de la sortie de son documentaire sur le Sahara occidental.