Com' digitale - Comment s'en sortent nos politiques?

Twitter, Facebook, YouTube... Quels sont les politiques qui maîtrisent le mieux ces outils? Quels sont ceux qui sont complètement dépassés? Tour d'horizon.

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Crédit : Yassine Toumi

Depuis l’avènement des réseaux sociaux, la communication politique s’est retrouvée confrontée à de nouveaux codes, avec comme mission d’investir ce nouveau champ qu’est le web. Si les institutions politiques se sont adaptées au nouveaux standards de la com’ politique avec plus ou moins de succès, mettant en place sites web et présence sur les réseaux sociaux, du côté des hommes politiques, le web ne semble pas être une priorité.  « Si on compte la totalité des politiques sur Twitter, ils sont au maximum une vingtaine », explique Marouane Harmach, spécialiste dans la communication digitale.

Mais tout n’est pas noir, puisque quelques uns se démarquent nettement du lot. « Moncef Belkhayat a par exemple une présence affirmée sur Twitter », commente Marouane Harmach, qui estime que  « Twitter sert à jauger l’actualité et à être à l’avant-garde sur les sujets qui seront débattus le lendemain dans les médias ». Pour lui, l’ex ministre de la Jeunesse et des sports « joue la carte de la sympathie et tient une posture d’échange plutôt que de propagande ».

Être proche des citoyens n’est pas le seul moyen de réussir sa communication sur le web, puisque d’autres, à l’image de Saâdeddine El Othmani, suivent une démarche institutionnelle mais réussissent pourtant à susciter l’intérêt des internautes. Ainsi, selon Marouane Harmach, « L’ex ministre des Affaires étrangères, malgré des comptes co-gérés avec son équipe, arrive à rentrer dans des débats intéressants et parvient à échanger régulièrement avec les personnes qui le suivent ».

Pour se faire une idée de l’appréhension des politiques marocains des réseaux sociaux, Telquel.ma a trié sur le volet 15 personnalités politiques issues de partis différents et a analysé leur présence virtuelle et leur maîtrise des règles du jeu de la com’ numérique.

Ils jouent le jeu

Moulay Hafid ALAMI © Yassine ToumiMoulay Hafid Elalamy

♦ Parti : RNI
♦ Facebook :
 15 615 fans
♦ Twitter : 65 700 followers
♦ Youtube : Non

Le Ministre de l’Industrie semble prendre à cœur le jeu de la communication digitale. Moulay Hafid Elalamy n’hésite pas à utiliser le « je » et prend position avec subtilité. En décembre 2014, il a ainsi exprimé son soutien à la campagne de collecte de fonds #100dhpouraider qui venait en aide aux sinistrés des inondations du sud du pays. Une communication qui paie puisque le fondateur du groupe Saham est l’un des rares politiques marocains à posséder un compte vérifié sur Twitter. D’un réseau social à l’autre, Moulay Hafid Elalamy adapte son contenu en jonglant entre commentaires et annonces officielles. Cela dit, ses comptes Facebook et Twitter ne sont pas alimentés très souvent. Le dernier tweet du 38e homme le plus riche d’Afrique date du 4 décembre 2014. Depuis son inscription sur Twitter, seuls 414 tweets ont été publiés. Autre bémol : Moulay Hafid Elalamy ne s’exprime qu’en français, ce qui restreint la portée de ses publications.

Chabat © Yassine Toumi .Hamid Chabat

♦ Parti : Istiqlal
♦ Facebook :
 227 041 fans
♦ Twitter : 1 734 followers
♦ Youtube : 133 902 vues

Hamid Chabat a vite compris l’enjeu de la com’ digitale. Le secrétaire général du Parti de l’Istiqlal a été l’un des premiers à avoir un site officiel, agrémenté d’une web-tv. « C’était un grand outil de promotion pendant les élections communales de 2009, mais tous les partis politiques se sont plaints du fait qu’on a mis en place une chaîne de télévision non autorisée, ce qui nous a contraint à abandonner le projet », se remémore le maire de Fès. Si aujourd’hui le site officiel de Chabat s’est éclipsé au profit de celui du parti, il tente de rattraper le coup sur les réseaux sociaux. Hamid Chabat emploie une personne pour gérer sa présence sur le web et met fréquemment  à jour ses pages. Hamid Chabat a même créé une chaîne YouTube qui enregistre plus de 133 000 vues. L’ennemi juré de Benkirane fait, cela dit, des faux pas. La communication sur sa personne prend largement le dessus sur celle de son parti et beaucoup de faux comptes s’accaparent son nom: il est donc difficile de démêler les faux comptes des officiels. En outre, sur YouTube, on note une majorité de pouces rouges et des commentaires désactivés systématiquement bloquent la possibilité de tout dialogue.

El othmani © Yassine TOUMI (1 sur 1)Saâdeddine El Otmani

♦ Parti : PJD
♦ Facebook :
 20 257 followers
♦ Twitter : 12 700 followers
♦ Youtube : Non

Saâdeddine El Otmani est très actif sur Twitter. Mais ce n’est pas toujours positif. L’ancien ministre des Affaires étrangères fait de son fil Twitter une longue revue de presse. Des centaines de retweets noient l’apport personnel de sa présence sur le réseau social. Surtout qu’en plus Saâdeddine El Otmani a un goût prononcé pour les montages kitsch et les photos de paysage qu’il poste pour souhaiter bonjour et bonsoir à ses followers. Cependant, si son compte est géré conjointement avec son parti, il s’exprime quand même sur des sujets épineux. Il a d’ailleurs été le premier à évoquer la nécessité d’une réforme de la loi sur l’avortement. Enfin, comme les autres membres du PJD, le psychiatre ne dispose d’aucune présence sur Facebook ni YouTube.

Reda Chami © Yassine ToumiAhmed Reda Chami

♦ Parti : USFP
♦ Facebook :
 19 518 fans
♦ Twitter : 18 000 followers
♦ Youtube : Non

Malgré son inactivité sur Facebook et Twitter depuis 2013, Ahmed Reda Chami reste un bel exemple de la communication numérique maîtrisée. L’ancien ministre des Nouvelles technologies avait réussi, avec brio, à séduire la planète web en faisant preuve d’une grande proximité. Ahmed Reda Chami publiait régulièrement des tribunes d’opinion, qui étaient largement commentées, sur sa page Facebook et n’hésitait pas à livetweeter les séances au parlement. Et sa proximité des utilisateurs de Twitter n’était pas purement virtuelle. En 2011, il a invité quelques dizaines d’utilisateurs dits « influenceurs » à débattre du projet Maroc Numeric 2013. Ce qui a contribué à créer une véritable communauté virtuelle autour de sa personne.

Moncef Belkhayat © Yassine ToumiMoncef Belkhayat

♦ Parti : RNI
♦ Facebook :
 156 434 fans
♦ Twitter : 54 800 followers
♦ Youtube : 14 402 vues

Moncef Belkhayat fait partie des politiques qui investissent le plus le web. Avec 156 356 fans et 54 800 followers sur Facebook et Twitter respectivement, il n’a pas à rougir de la concurrence. Sur les deux plateformes, Moncef Belkhayat tente de diversifier le contenu publié, se montre réactif et s’aventure même dans l’humour. L’ancien ministre de la Jeunesse et des sports fait part de ses impressions sur les sujets d’actualité et répond systématiquement aux twittos qui le sollicitent. Mais la vie virtuelle de Moncef Belkhayat n’a pas toujours été un long fleuve tranquille. En 2011, le ministre est accusé de louer une voiture de luxe aux frais du contribuable à 90 000 dirhams par mois. Il fait alors l’objet d’un véritable bad buzz à travers le hashtag #A8Gate qui compile les réactions indignées des twittos. A l’époque, Moncef Belkhayat a tenté de se défendre sans pour autant convaincre ses followers. Depuis, l’incident oublié, il essaie de redorer son blason auprès de la communauté en s’intéressant aux événements web les plus marquants du royaume.

Ils participent mais…

Lahcen Haddad © Yassine ToumiLahcen Haddad

♦ Parti : MP
♦ Facebook :
 9203 fans
♦ Twitter : 13 200 followers
♦ Youtube : 28 768 vues

Sur Twitter, où il est suivi par plus de 13 000 followers, le ministre du Tourisme communique en quatre langues (arabe, français, anglais et espagnol). Il dispose aussi d’un compte Instagram qui relate tous ses déplacements et il n’hésite pas à partager de nombreux articles de presse. Cela dit, ses profils sont gérés à la manière d’un compte personnel et laissent peu de place au commentaire où à la prise d’opinion. Lahcen Haddad n’arrive pas non plus à séduire la communauté Twitter, et est réputé pour bloquer systématiquement les personnes qui expriment des critiques à son égard.

mustapha el khalfi © yassine toumi (1 sur 1) (1)Mustapha El Khalfi

♦ Parti : PJD
♦ Facebook :
 27 119 fans
♦ Twitter : 6 933 followers
♦ Youtube : 34 671 vues

Si Mustapha El Khalfi peut être maladroit à la radio au point de devenir la risée du web, il est clair qu’il rattrape le coup sur les réseaux sociaux. Le ministre de la Communication s’exprime personnellement et n’hésite pas à mettre les points sur les « i ». Khalfi rebondit systématiquement sur l’actualité touchant à son ministère. Lors de la censure d’Exodus, le ministre est revenu à plusieurs reprises sur le sujet afin d’éclaircir la position de son département sur l’affaire. Idem pour la médiatisation des menaces terroristes envers des personnalités marocaines, qu’il a dénoncées. Le ministre de la Communication reste, cela dit, peu réactif avec ses fans et bénéficie d’une popularité très limitée comparée aux autres politiques. Sur Facebook, même son de cloche, on tombe vite dans la revue de presse. Mustapha El Khalfi postant en particulier les articles qui parlent.. de lui. Ces derniers permettent moins de visibilité à son contenu propre.

mehdi_bensaid_aicpress_

Mehdi Bensaïd

♦ Parti : PAM
♦ Facebook :
Compte personnel
♦ Twitter : 2391 followers
♦ Youtube : Non

Mehdi Bensaïd incarne la nouvelle génération des politiques. Malgré la portée moyenne de ses tweets et posts Facebook, le député n’hésite pas à exprimer le fond de sa pensée et poste un contenu diversifié avec une fréquence de publication équilibrée. Le président de la Commission des Affaires étrangères à la Chambre des représentants mise sur la proximité des utilisateurs de Twitter et assure une grande réactivité. Boudant la page Facebook officielle, Mehdi Bensaïd lui préfère un compte personnel ouvert à tout le monde.

Abdelilah Benkirane © Yassine Toumi

Abdelilah Benkirane

♦ Parti : PJD
♦ Facebook :
 Non
♦ Twitter : 12 700 followers
♦ Youtube : Non

Si la communication du PJD est parmi les plus abouties sur les réseaux sociaux, comparée à celle des autres partis, la donne est différente en ce qui concerne le chef de gouvernement. Sur Twitter et Facebook, une dizaine de faux comptes se prennent pour Benkirane, profitant de sa présence effacée sur ces plateformes. Et malgré son statut, Abdelilah Benkirane ne dispose pas d’un compte vérifié. Sur Twitter, sont uniquement relayées ses apparitions médiatiques et autres activités, sur un ton impersonnel. Si Benkirane peut compter sur le compte YouTube de son parti, régulièrement alimenté en vidéos qui deviennent vite virales (bon choix de titres, un sens du buzz dans le traitement de l’information), il boude quasi-systématiquement les réseaux sociaux en évitant de s’exprimer à titre personnel et restreint sa communication à l’arabe.

Charafat Afilal © Yassine Toumi .Charafat Afilal

♦ Parti : PPS
♦ Facebook :
 10 549 followers
♦ Twitter : Non
♦ Youtube : Non

Charafat Afilal est présente sur Facebook, mais l’efficacité de sa communication reste à prouver. La ministre déléguée chargée de l’eau préfère son compte personnel sur Facebook au lieu de la page officielle. Un point positif qui donne une plus grande portée à ses posts. Elle boude cependant Twitter, laissant le champ libre aux faux profils. La plupart de ses publications sont des photos de déplacements peu ou pas légendées.

Les posts de Charafat Afilal ne relatent que rarement les détails de ses activités.
Les posts de Charafat Afilal ne relatent que rarement les détails de ses activités.

Hakim Benchemass © Yassine ToumiHakim Benchamach

♦ Parti : PAM
♦ Facebook :
 5481 fans
♦ Twitter : 845 followers
♦ Youtube : Non

Pour Hakim Benchamach, les réseaux sociaux sont une opportunité de séduire de jeunes sympathisants. Le conseiller PAM tient une communication très directe en s’exprimant personnellement sur ses profils. Il met en avant les jeunes, notamment en postant des photos de ses déplacements en compagnie de membres de la jeunesse du PAM. Aussi, il fait part des chantiers sur lesquels il s’engage et ponctue même sa présence de tribunes d’opinion sur sa page Facebook. Malgré tout, son nombre limité de fans fait que sa présence est peu optimisée. En outre, il lie son compte Twitter à son profil Facebook, ce qui crée une répétitivité du contenu mais aussi des posts inadaptés à Twitter et vice versa (phrases non terminées vu le nombre de caractères limité sur Twitter). Sa communication se fait uniquement en arabe.

Hakim Benchamach met en avant les jeunes sympathisants sur sa page Facebook.

Ils sont hors-jeu

Driss Lachgar © Yassine ToumiDriss Lachgar

♦ Parti : USFP
♦ Facebook :
 6262 fans
♦ Twitter : Non
♦ Youtube : Non

Le chef de l’USFP figure parmi les politiciens qui n’ont pas encore saisi l’enjeu de la communication digitale. Peut-être occupé par les divisions internes qui minent son parti, il est absent sur Twitter et YouTube. Par contre, Lachgar tient un blog qui relate l’ensemble de ses activités de manière exhaustive. Grande erreur : son absence sur Twitter laisse le terrain libre aux faux profils et son site web, hébergé sur la plateforme Overblog, reste peu attractif. Driss Lachguar s’est même aventuré à sponsoriser sa page Facebook à la manière d’un produit, un faux pas largement commenté sur les réseaux sociaux.

Bouaida © Yassine TOUMI (1 sur 1)-34

M’Barka Bouaida

♦ Parti : RNI
♦ Facebook :
 8148 fans
♦ Twitter : Non
♦ Youtube : Non

M’barka Bouaida figure parmi les grandes absentes des réseaux sociaux. La Ministre déléguée auprès du ministre des Affaires étrangères ne semble pas saisir l’intérêt de cet outil de communication. Pas de compte Twitter, encore moins de chaîne YouTube, son audience se résume à 8148 fans sur Facebook. Sur son profil, sa communication reste très sommaire et cède facilement à l’aléatoire. Encore plus grave, elle n’a rien posté depuis mai 2014.

bassima hakkaoui © yassine toumi 1Bassima Hakkaoui

♦ Parti : PJD
♦ Facebook :
 6 184 fans
♦ Twitter : Non
♦ Youtube : Non

Bassima Hakkaoui fait bon usage de son faible nombre de fans sur Facebook. Elle tient un rythme de publication régulier et suscite la sympathie des fans qui manifestent leur soutien dans de nombreux commentaires. Sur Twitter, elle est simplement absente. En 2012, un compte parodique jouant sur un lapsus (Bahima Hakkaoui, supprimé depuis) avait usurpé son identité pour publier de faux commentaires sur l’affaire Amina Filali. Des propos qui ont été, par manque d’attention, repris par plusieurs médias qui lui ont attribué des prises de position polémiques sur l’affaire.

Les commentaires publiés sur la page Facebook de Bassima Hakkaoui sont en majorité positifs.
Les commentaires publiés sur la page Facebook de Bassima Hakkaoui sont en majorité positifs.

nabila mounib © yassine toumiNabila Mounib

♦ Parti : PSU
♦ Facebook :
 1935 fans
♦ Twitter : 78 followers
♦ Youtube : Non

La secrétaire générale du PSU utilise les réseaux sociaux à la manière d’un agenda. Sur sa page Facebook, elle informe ses 1 930 fans de l’ensemble des événements auxquels elle prend part. Mais cela ne suffit pas à souder une communauté autour d’elle. Nabila Mounib a verrouillé son profil Twitter, l’utilisant certainement à des fins personnelles. Un faux pas qui ne lui permet pas d’interagir publiquement avec la sphère Twitter. Aussi, la femme politique n’interagit pas avec ses fans sur Facebook, pourtant peu nombreux et les liens qu’elle poste ne sont pas accompagnés de légendes, ce qui accentue le côté impersonnel de sa présence sur le web.

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