Zakaria Boualem et la guerre de Gaza

Par Réda Allali

Il y a des semaines où il ne se passe rien, où Zakaria Boualem souffre pour remplir cette page, il faut alors chercher un sujet, trouver quelque chose à raconter. Et puis il y a des périodes comme celle que nous vivons, où une actualité monstrueuse s’impose avec force. Quelque chose qui envahit les têtes, qui empêche de dormir. Il est très difficile d’en parler avec pertinence, puisque tout le monde en parle, mais il est impossible de ne pas en parler. Israël a attaqué Gaza, c’est un carnage insupportable. Zakaria Boualem, comme vous, a vu les images, il en est malade. Ce n’est pas une indignation automatique de citoyen musulman d’un pays arabe, on a tellement tiré sur cette corde qu’elle est devenue louche. Non, c’est juste humain : cette colonisation est une honte. Oui, Zakaria Boualem est malade, mais il n’a rien à apporter au débat. Il est censé, dans cette page, vous divertir, vous proposer une façon originale de considérer la réalité. Les deux objectifs sont irréalistes. Tout a été dit sur cette horrible attaque, tout a été filmé, documenté, commenté. La guerre, suivie par la guerre des images, et la guerre des mots, fascinante celle-là. L’art de choisir les termes, c’est très pointu : les soldats « enlevés » – comme s’ils étaient dans leur salon – et non « capturés », par exemple. Mais tout cela a été minutieusement décrit par des gens bien plus brillants que notre héros, tout est disponible sur la Toile. Zakaria Boualem passe des heures à lire les commentaires sur les réseaux sociaux, c’est une grande nouveauté. Nous avons des gens qui s’expriment abondamment, entre deux séries de bombardements. Des institutions israéliennes qui tentent de nous faire passer les victimes pour des coupables, des soldats qui instagramment un gamin dans leur ligne de mire, des supporters enthousiastes qui expriment leur ferveur devant ce spectacle. Des commentaires infinis sur l’étrange couverture médiatique du conflit. Oui, c’est une sorte de guerre mondiale. Il faudrait imaginer ce que ça aurait donné un peu plus tôt dans l’histoire, une guerre avec Twitter, Facebook, YouTube et compagnie… Qu’aurait pu nous raconter le compte officiel du Troisième Reich au matin de l’attaque de la Pologne, par exemple, ou celui de l’Armée Rouge interpellée sur les massacres de Katyn ? Imaginez ce qu’aurait pu donner un livetweet de la bataille de Stalingrad ou de Monte Cassino. Où des concours de « likes » entre les vidéos de Churchill et de Mussolini ? On peut imaginer même des guerres antérieures, les premières vidéos téléchargées par Vasco de Gama ou Christophe Colomb à leurs arrivées… Mais il faut arrêter, cette page est en train de mal tourner. Mais ça aurait peut-être tout changé, allah aâlam… Il est là, le véritable espoir de ce monde moderne. Dans ces nouvelles technologies qui, en rapprochant les gens, dopent un peu l’empathie mondiale. Dans le constat qu’il devient de plus en plus compliqué de raconter n’importe quoi. Parce que les images circulent, les commentaires s’entassent, les vidéos se multiplient. La technologie, le truc qui fait que Zakaria Boualem croit un peu en l’humain. Oui, notre héros est un peu rêveur aujourd’hui, et s’il ne se retenait pas il vous parlerait presque de paix dans le monde. Il a cet espoir, que ce qui a été possible hier ne le sera plus demain, que les technologies servent à élever la conscience mondiale, voilà.