Isaaf Assistance a lancé, il y a quatre mois, un service de SAMU gratuit couvrant la province d’El Jadida. Fruit d’un partenariat public-privé, cette initiative a déjà permis plus de 1200 interventions.
C’est un bourdonnement sourd qui nous accueille au centre d’appels d’Isaaf Assistance, localisé à Sidi Maârouf, à Casablanca. Le flux d’appels reçus ne laisse aucun répit aux téléconseillers. A l’extrémité de la plateforme, une rangée de postes de travail semble moins surchargée que les autres. Elle est occupée par des infirmières et un médecin régulateur, qui ont pour tâche de traiter les appels relatifs au SAMU d’El Jadida. Dès qu’un citoyen de la province d’El Jadida appelle le 22 22, son appel est géolocalisé, puis pris en charge par un assistant de régulation médicale qui le transfère au médecin régulateur si besoin est. C’est d’ailleurs ce dernier qui assure la coordination avec les cinq bases situées dans la province (Oulad Frej, Sidi Smaïl, Oulad Ghanem, Bir Jdid et El Jadida) et détermine s’il est nécessaire, ou non, de dépêcher une ambulance sur place. Depuis le lancement du SAMU El Jadida, le 1er novembre 2013, les 20 médecins, 28 infirmiers et 21 ambulanciers répartis sur les cinq bases ont mené plus de 1200 interventions. « Mais à ses débuts, le SAMU était peu connu des habitants de la province », commente Khalid Drissi, directeur chargé de mission auprès du directeur général d’Isaaf Assistance. Pour y pallier, une vaste campagne d’information a été mise en place, via des panneaux publicitaires et affiches installés à l’entrée des villes et des communes desservies par le SAMU. Aujourd’hui, le 22 22 est presque connu de tous, et « il ressort de nos bilans mensuels que l’activité augmente considérablement de mois en mois », se réjouit Mahmoud Oudrhiri, directeur général d’Isaaf Assistance. « Pour l’anecdote, j’avais un jour demandé à une policière de Bir Jdid si elle pouvait m’indiquer où se situe la base du SAMU. Elle m’a répondu n’en n’avoir jamais entendu parler. Dès que j’ai précisé qu’il s’agissait du 22 22, elle m’a tout de suite indiqué le chemin », nous raconte Khalid Drissi.
22 22 à la rescousse
« Le SAMU d’El Jadida est le fruit d’un consortium public-privé », précise Mahmoud Oudrhiri. Une fierté pour Isaaf Assistance, puisqu’il s’agit du premier partenariat public-privé du genre au Maroc. Financé en grande partie par le ministère de la Santé, la province d’El Jadida, l’OCP et JLEC, ce projet a nécessité un investissement de 66 millions de dirhams, étalé sur trois ans. « Nous avons mis en place ce service car il y avait un besoin exprimé, mais aussi des prérequis, telles que des structures hospitalières », poursuit Mahmoud Oudrhiri. En effet, on imagine mal un SAMU s’implanter dans un village dépourvu de dispensaire ou d’hôpital. « Mais puisque nous couvrons toute la province d’El Jadida, il nous arrive fréquemment de transporter des patients se trouvant dans des douars isolés », précise Seloua Bouhlal, directeur médical d’Isaaf Assistance. « Pour cela, nous avons défini quelque 2400 points d’intérêt dans la province », ajoute-t-elle. Les points d’intérêt (mosquées, épiceries, écoles, etc.) servent de repères aux équipes du SAMU lorsqu’elles se trouvent dans des endroits où il est difficile d’identifier l’adresse du patient.
« Dans un SAMU, rien ne doit être laissé au hasard », souligne Seloua Bouhlal. Les trois membres de chaque équipe SAMU – un médecin, un technicien ambulancier et un infirmier – possèdent chacun un abonnement téléphonique auprès d’un opérateur différent de celui des autres, « pour rester toujours joignable, même quand l’un des opérateurs ne couvre pas une région donnée», ajoute-t-elle. Le temps de préparation des missions a été calculé et optimisé, pour être réduit à une moyenne de deux à trois minutes. Et le temps nécessaire pour arriver chez le patient est de trente minutes maximum. En termes d’équipements, chaque base du SAMU est dotée d’une infirmerie pourvue de médicaments, et les ambulances sont équipées selon les standards internationaux : électrocardiographe, sac d’examen, sac d’urgence, bouteilles d’oxygène, etc. « Les équipes doivent être préparées à faire face à n’importe quel type de cas, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 », résume Seloua Bouhlal. Des grossesses aux blessures par couteau, en passant par les accidents de la route, les équipes sont formées et les ambulances suffisamment équipées pour mener à bien toute intervention nécessitant des soins intensifs durant le transport. Et afin d’éviter un rythme de travail contraignant, synonyme de manque de vigilance, les équipes qui travaillent 24 heures consécutives ont droit à 72 heures de repos, et celles qui travaillent 12 heures, à 36 heures de repos. Le suivi des patients fait également partie des exigences d’Isaaf : le lendemain de l’intervention, l’équipe appelle le patient pour s’enquérir de son état.
Bientôt d’autres villes
Que gagne Isaaf à travers son SAMU ? « On gagne à mettre en place un service dédié au citoyen, dont on espère qu’il sera précurseur d’autres expériences », répond Mahmoud Oudrhiri. Les gains financiers, eux, ne sont pas conséquents, assure-t-on chez Isaaf, où l’on se dit quand même « prêt à inaugurer d’autres SAMU gratuits dans d’autres villes ». « Ce que nous souhaitons, c’est que le 22 22 devienne le numéro d’urgence de plusieurs villes », soutient le directeur général d’Isaaf Assistance. Les conditions pour y parvenir ? « Qu’il y ait un besoin exprimé, des structures d’accueil et une volonté des pouvoirs publics ». Convaincre ces derniers sera difficile, vu qu’ils « se sont d’abord montrés réticents à l’idée de permettre l’implantation d’un SAMU géré par le privé à El Jadida, de peur qu’il n’empiète sur les prérogatives de la Protection civile. Mais, finalement, au vu des résultats et de la coopération entre Isaaf et la Protection civile, ils ont changé d’avis », nous confie-t-on du côté de la province d’El Jadida.
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