Zakaria Boualem tombe régulièrement sur un classement mondial quelconque qui place toujours le Maroc dans les tréfonds du concert des nations. ça n’aura pas échappé aux plus patriotes de nos lecteurs, nous sommes mal classés en termes d’éducation, de santé, de développement humain, d’accès à la culture, etc. En prime, il paraît que nous maltraitons nos immigrés, que nous ne respectons pas la liberté d’expression, ni la liberté de conscience, que nous opprimons les minorités… Il faut arrêter cette liste sinon on risque de perdre des lecteurs, il ne faut pas oublier que nous sommes là pour vous distraire. Ce tableau désastreux, bien entendu, est largement noirci par la main malveillante des ennemis de la nation. Preuve en est que, s’il était vrai, si la situation était aussi catastrophique, les Marocains seraient tout entiers absorbés à la tâche de déguerpir ventre à terre.
On verrait par exemple des cadres envoyer leur femme accoucher à l’étranger, d’autres acquérir des biens en Espagne. On verrait de braves Marocains se presser aux portes des consulats pour dégoter un visa de touriste, ou un contrat de travail. On en verrait d’autres passer des nuits blanches sur Internet à la recherche de la meilleure façon de devenir canadien. Ceci n’existe pas, al hamdoulillah, donc la situation n’est pas aussi désastreuse que nos ennemis aiment à la décrire. Il n’en demeure pas moins que ces classements abominables nuisent à notre image. Il faut donc contre-attaquer et proposer une série de critères qui redresseront les torts causés par ces évaluations biaisées. Voici donc une nouvelle façon d’évaluer les performances des pays. C’est la contribution de Zakaria Boualem à la cause nationale, ne le remerciez pas.
1. Education : Le niveau d’instruction d’un pays sera évalué par le nombre moyen de langues parlées dans les bazars de ce pays. En France, chez Carrefour, on ne parle que français, même chose chez l’Américain Walmart : une seule langue ou deux au maximum si on tombe sur des Latinos ou des Chinois. Le Maroc est classé dans les dix premiers mondiaux. Bien joué. Ce classement sera également pondéré par la capacité des habitants du pays à effectuer des calculs mentaux. On se basera pour cela sur le nombre de devises manipulées quotidiennement. Au Maroc, on parle tous les jours en rial, en centime, en douro, en franc, en millioun et en mlyare, en miat’mia (oui ça existe) et parfois même en dirham. L’Europe, dans sa totalité, se contente de l’euro, c’est ridicule. En combinant les deux critères, nous sommes le pays le mieux classé au monde en termes d’éducation. C’est beau, même si mon correcteur d’orthographe s’indigne.
2. Sport. Le niveau d’un pays sera déterminé par sa position lors de la Coupe du monde des clubs. Le Maroc est second. Voilà.
3. Patriotisme et sens civique. Aimer son pays, servir sa patrie, c’est éviter de le harceler pour lui demander de l’argent, des soins ou de l’instruction. Au moment où les Français grognent sur leurs allocations chômage, ou les Suédois se plaignent de n’avoir que 99% de protection santé, les Marocains n’ont rien et ne demandent rien. Les plus patriotes d’entre nous s’acquittent même de l’impôt pour la simple occupation du sol, oui c’est un loyer. Un tel esprit de sacrifice ne mérite pas moins que la première place mondiale. Yes !
4. Politique. Le seul critère sera la stabilité. Tout est dit. Champions du monde. Applaudissements.
Zakaria Boualem pourrait continuer ainsi à énumérer les critères qui nous propulseraient au sommet des classements mondiaux, mais il préfère vous laisser continuer l’exercice tout seul, parce qu’il est un peu fatigué, ces dix dernières années, et ensuite parce que cette tâche ne saurait se réaliser sans un véritable effort collectif national. A vous de jouer donc, et merci.