L’esthétisme néo-orientaliste exacerbé de cette artiste cotée n’occulte pas la complexité du sujet traité.
En revisitant ce poncif de l’orientalisme qu’est l’odalisque, Lalla Essaydi fait se superposer trois regards sur le sujet : celui de l’Occidental fantasmant sur ces créatures de harem qu’il n’a, historiquement, pas vues ; celui que porte l’artiste contemporaine marocaine sur cette représentation qui a marqué l’histoire de l’art du XIXe siècle ; celui, enfin, que projette sur l’œuvre d’Essaydi l’amateur d’aujourd’hui. Ce dernier saisit-il réellement le deuxième degré du propos ou se contente-t-il de se délecter de la beauté théâtrale de ces images, à la charge érotique évidente ? On sait qu’une grande partie de la production de cette artiste mondialement cotée est acquise par de riches Emiratis.
Intitulée « Bullets & Harem, Revisited », l’exposition qu’abrite actuellement la Galerie Tindouf à Marrakech comprend deux thèmes. Le premier nous donne à voir des vestales orientales new-age aux voiles perlés d’or sur fond de décor clouté tout aussi rutilant. A y regarder de près, il s’agit d’une savante accumulation de cartouches de balles. L’effet est saisissant. Le second, moins dérangeant, revisite avec finesse les harems de Delacroix, façon Femmes d’Alger, à grand renfort de caftans, broderies fassies et autres haïtis des plus authentiques, puisés dans une collection privée. Les femmes ont toutes le corps calligraphié au henné. Les scènes sophistiquées sont rendues sur des tirages argentiques en grand format.
Née en 1959 à Tamsloht, Lalla Essaydi a fait ses études d’art à Paris puis à Boston, où elle est installée. Habituée à exposer à New York, Hong Kong ou à Doha, elle a renoué depuis peu avec sa patrie d’origine, tout étonnée d’y découvrir « une scène artistique active et réceptive ».
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