Zakaria Boualem frise la crise cardiaque, la faute au grand Maradona !

Par Réda Allali

Zakaria Boualem n’aurait jamais pensé écrire une telle phrase un jour, c’est tout simplement historique : “Diego Maradona serait en contact avec le Raja pour un poste de conseiller technique”. Retour à la ligne, s’il vous plaît. C’est incontestablement la plus belle information jamais imprimée sur cette page, et sans doute dans l’ensemble de la presse marocaine, que Dieu lui vienne en aide. Un esprit lucide ferait sans doute remarquer à notre Guercifi que l’emploi du conditionnel, associé à l’imprécision de la notion de “contact”, dégrade cette information au simple rang de rumeur, mais il ne traîne plus aucun esprit lucide par ici depuis bien longtemps. Ce type d’individu réclamerait sans doute une enquête sérieuse sur la nature de ses contacts, il réclamerait des détails, des montants, il tenterait de cerner ses responsabilités, et finirait par établir des probabilités de succès pour cette venue. Zakaria Boualem n’a pas besoin de tout cela. Il ne réclame plus rien, juste du rêve. Ajoutons qu’au moment où tout le monde raconte à peu près tout ce qui lui passe par la tête tous les jours sans crainte d’être contredit, on ne voit pas au nom de quoi notre héros devrait se retenir, et merci. Il va donc l’écrire : Maradona va venir au Raja. Retour à la ligne, s’il vous plaît.

Zakaria Boualem risque l’explosion, c’est trop pour lui. Accueillir son joueur préféré dans son club préféré, le voir porter ses couleurs, parader au Stade d’honneur, oui, il y a un véritable risque d’explosion. Expliquons à nos plus jeunes lecteurs de qui il est question ici. On parle d’un type qui, le 22 juin 1986, a exhibé à la face du monde la dualité de l’homme. Un but de filou, suivi par un second, pur moment de grâce chorégraphié par des forces célestes, et enfin une déclaration historique où il évoque la main de Dieu. L’Angleterre terrassée, il enchaîne en gagnant la Coupe du Monde à lui tout seul. On parle d’un type qui prend rendez-vous avec le pape pour lui demander d’où vient l’or amassé au Vatican. Une question judicieuse qu’a moyennement appréciée le souverain pontife paraît-il. Un type qui a traîné avec la mafia à Naples, qui a énervé le roi d’Espagne, qui s’est extirpé d’un ghetto obscur pour défier avec courage les deux hommes les plus puissants du monde, le président des Etats-Unis et celui de la FIFA. Un type dont les deux fils s’appellent Diego Maradona. Ce n’est pas le plus grand signe d’humilité qu’on puisse envoyer au monde, mais quand on a pour nom de famille Maradona, reconnaissez qu’il est difficile d’envisager un autre prénom que Diego. Evidemment, tout cela n’a rien à voir avec le sport, c’est de culture populaire mondiale dont il s’agit, à une époque où ce mot voulait dire quelque chose. Car il fut un temps où les footballeurs étaient autre chose que des surfaces lisses à louer pour les sponsors, où le Gangnam style n’était pas la référence musicale mondiale, où il y avait un peu d’imprévu et de folie dans le spectacle rodé du divertissement planétaire. La machine capitaliste n’avait pas encore perfectionné sa capacité à transformer toute rébellion en produit marketing, il y avait encore des ouvertures dans le système. Ne me demandez pas pourquoi mais des gens comme Bob Marley, Bruce Lee ou Maradona dégageaient à l’époque une sorte de charisme tiers-mondiste frondeur et jouissif. Personne ne leur arrive à la cheville aujourd’hui, c’est une opinion de vieux con assumé. Je vous entends parler de Messi, excusez-moi mais vous êtes un peu à côté de la plaque. Il est bien possible que sa plus grande transgression ait été de commander une double frite pour son menu McNuggets. Entre nous, même si on parle d’un footballeur phénoménal, vous auriez envie, vous, de regarder un film sur la vie de Lionel Messi ? Le truc serait produit par Walt Disney, sans doute. Maradona, ça serait plus Scarface. Ben voilà, tout est dit. Bon, Zakaria Boualem vous aurait bien parlé encore de Maradona trois ou quatre pages mais il doit vous quitter. Il doit apprendre l’espagnol, car il a un héros à accueillir dans son club. Y gracias !