Salam alikoum. Zakaria Boualem, évidemment, ne va pas vous parler de football cette semaine. Il attend un peu, histoire de voir comment cette affaire va tourner, mais sachez que ça lui coute beaucoup de se retenir de la sorte. Bon, l’affaire de la semaine nous vient de Somalie, il est important de changer un peu d’air. Plusieurs femmes, paraît-il, y ont été fouettées pour avoir osé porter un soutien-gorge, banni par une certaine Chabiba Islamique. Pour commencer, Zakaria Boualem souhaite féliciter ce groupe de jeunes gens pour leur sens des priorités. Au moment où la Somalie connaît un envol économique remarquable, qui rejaillit sans conteste sur toutes les couches de la population, il était important de s’attaquer au soutien-gorge pour prouver que le véritable salut de l’âme n’a rien à voir avec le développement social. On signale à Zakaria Boualem qu’il raconte des âneries et que l’état général de la Somalie s’enfonce au contraire dans une sorte d’état dramatique qu’on n’appellera même pas crise parce que cette dernière est par essence exceptionnelle. Bon, c’est pas grave, cette Chabiba a tout de même du mérite, il fallait réussir à mobiliser son énergie autour d’une cause comme le bannissement du soutien gorge, bravo les gars. Notez au passage que la question du contrôle soulève quelques interrogations. Comment donc ces hommes ont-ils pu déceler chez la diabolique femelle la présence prohibée du fameux soutien-gorge ? Par quelle scrutation méthodique obsessionnelle ont-ils pu repérer la contrevenante et décider aussitôt de la châtier avec enthousiasme ? Aurait-on affaire à de gros voyeurs qui ont trouvé un alibi ? Et ce fouet, vous trouvez ca normal, vous, ce fouet ? Encore une fois, un collègue de Zakaria Boualem l’interrompt dans ses réflexions pour lui signaler qu’il n’a rien vu du tout, et qu’en Egypte, tenez-vous bien allah y khellikom, il s’est trouvé un brave mufti appelant au port du niqab pour les hommes beaux. Le Guercifi ne doute pas un instant de la capacité de nos penseurs salafistes à produire du délire, à repousser les limites du ridicule chaque fois qu’ils ouvrent la bouche, mais il refuse de croire son voisin de bureau. Imaginez un instant la lajna qui devra déterminer les hommes beaux. Elle ne saurait être constituée de femmes, bien sûr, puisqu’elles ne peuvent pas regarder les hommes. Une lajna masculine, alors, bien sûr. Constituée d’homosexuels, bien sûr, ceux dont le goût en matière de beauté masculine est le plus légitime. On voit bien qu’on aboutit encore une fois à un truc bizarre, le collègue a dû délirer.
Revenons à la poitrine des Somaliennes, que Dieu leur vienne en aide dans leur traversée des ténèbres… Interdire le soutien-gorge, donc, et fouetter les contrevenantes. Le site marocain Hespress a rapporté la nouvelle et s’est aussitôt retrouvé submergé de commentaires pleins d’exaltation pour cette initiative. Précisons à l’attention des personnes qui ne fréquentent pas ce site qu’il a la particularité de soulever des commentaires assez puissants. Il faut imaginer le commentateur hespressien devant son écran, avec trois fenêtres érotiques ouvertes en même temps et une quatrième, celle de Hespress, où il commence une phrase par “notre religion est formelle sur ce point, il faut interdire le…”. C’est ainsi qu’un certain Khalid a proposé d’appliquer cette remarquable loi sur le soutif au Maroc, et dans la foulée de couper les mains et les pieds des voleurs, d’interdire le football, la musique, les sonneries de portables, les films et la danse pendant les mariages. Il a dû se retenir d’interdire la vie, mais on y a échappé de justesse. Allez vérifier vous même, ce commentaire existe. Il se termine par ces mots remarquables : “Je ne suis pas extrémiste, ce n’est que mon opinion”. Il est fort possible qu’il s’agisse d’un plaisantin curieux de voir jusqu’où on peut aller dans le délire. Zakaria Boualem, soucieux de sa santé mentale, va retenir cette hypothèse. Tout le monde fait dans le second degré, les Somaliens fétichistes et les combattants de la beauté masculine aussi, allez… Du coup il se sent mieux, et merci.