Bon, elle est là, la bonne nouvelle, celle que Zakaria Boualem cherchait pour boucler sa page la semaine dernière : Silvio Berlusconi est de retour. On ne sait par quel miracle il a pu garder un semblant de crédibilité politique chez lui, contentons-nous de saluer la performance de l’artiste. La politique italienne, ou le calcio d’ailleurs, c’est donc une sorte de botolitique avec des joueurs plus beaux. Le cavalier aux affaires, c’est formidable pour ceux qui, comme Zakaria Boualem, se bornent à observer le monde comme un spectacle. Nous parlons d’un homme, un vrai, capable de courser les nubiles à plus de 73 ans avec vigueur, remis de la perte de son compagnon de jeu Kadhafi, c’est magnifique. Chez nous, lorsque le haj est frappé du démon de minuit et épouse une jeune fille de 50 ans sa cadette, on le cache ou on le réexpédie au haj justement, mais en Italie, on vote pour lui. Rappelons qu’à ceux qui lui reprochaient d’être intervenu auprès de la police pour faire libérer une prostituée mineure et sans papier, il avait répondu avec grandeur un truc du genre : “Je suis chrétien, j’aime venir en aide à mon prochain, je ne pouvais pas la laisser en prison, et comme je travaille beaucoup, j’aime me détendre le soir avec elle, c’est mieux que d’être gay, non ?” En une seule phrase, il avait alors réussi à agresser les chrétiens, les femmes, les gays et tous les gens qui veulent se détendre. Essayez de faire mieux en aussi peu de mots, vous allez vous rendre compte que c’est très compliqué. Respect, l’artiste…
Sans la moindre transition, sujet suivant, et merci : un internaute averti a signalé à Zakaria Boualem que la vidéo de Gangnam style avait dépassé les neuf cent millions de vues. Ce chiffre prodigieux est bien la preuve que la véritable valeur universelle, ce ne sont pas les droits de l’homme mais le Gangnam style. Si vous ne connaissez pas ce truc, vous êtes sans doute terré dans une mine de charbon depuis 2011, ou alors salafiste, je ne sais pas… Mais bon, les autres ont compris de quoi il s’agit. Un Coréen sautillant nous a donc pondu un sympathique tube dance très 90’s, où il déclare notamment : “Je suis le genre de mec qui boit son café d’un trait, avant qu’il ne refroidisse”. Mais tout le monde s’en fout, parce que c’est en coréen, et surtout parce que le truc, c’est la vidéo, où on le voit dans un sauna, dans une écurie, dans un métro, dans un parking, dans un bateau, dans un bus, dans un ascenseur, et il faut s’arrêter là parce que sinon on va y consacrer un numéro spécial (imaginez la scène avec son réalisateur : “Je veux être filmé dans un sauna, dans une écurie, dans un métro… ok, c’est tout ?”). Dans ces différents décors, il nous interprète, la mine impassible, une chorégraphie burlesque, dont la meilleure partie consiste à chevaucher avec entousiasme un cheval au galop. Le décalage entre la face et le reste du corps est le moteur du truc. Zakaria Boualem a trouvé ça très amusant. Mais maintenant qu’ils sont 900 millions à aimer ça, il faut réfléchir ensemble à ce phénomène. Voici les conclusions du Guercifi :
1. La planète entière a besoin de se détendre (il faudrait penser à prévenir les salafistes).
2. Les voies du succès sont impénétrables.
3. Ce succès nous tend les bras.
Ce troisième point est évidemment le plus important. Nous disposons nous aussi d’un nombre important de danses burlesques qui, interprétées avec une mine sérieuse, sont irrésistibles. Citons la danse du dindon, celle du nageur de brasse coulée, celle du laveur de sa propre veste ou celle du tireur de corde. Il est grand temps de passer à l’action, et de proposer au reste du monde ces chorégraphies qui sont pour l’instant limitées à une poignée d’initiés. Mettons de côté nos complexes, et attaquons enfin le monde la tête haute, l’3aloua sera notre fer de lance et le dindon notre danse, bismillah !
C’est tout pour cette semaine, et merci.
PS : Pour notre Gangnam style à nous, cette chanson que vous connaissez sans doute en VO ferait l’affaire : “Toi qui va à la colline, viens que je te conseille d’abord/si tu arrives, fais salut/la colline ne parle pas…” (trad Mohamed Bennis).
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