Objet mythique des années 60-70, la boîte à musique refait surface dans les lieux de divertissement. De quoi réconcilier les nostalgiques du vinyle et la nouvelle génération du tout numérique.
Posez la question à n’importe quel gérant de bar, il vous dira que le choix de la musique d’ambiance est un véritable casse-tête. “Avant d’installer Lmakina, les clients me rendaient fous, entre ceux qui souhaitent écouter Stati et ceux qui préfèrent les Pink Floyd. Maintenant chacun choisit ce qui lui plaît”, souligne Lhoucine, gérant d’un café-bar du centre-ville. Par Lmakina, comprenez une boîte à musique, plus connue sous le nom de juke-box, cette machine légendaire qui a connu son époque de gloire pendant les années 60 et 70, avant que le vinyle ne cède sa place au CD. Comme on n’arrête pas le progrès, le CD sera balayé par les formats numériques. Ce qui va inspirer quelques fabricants à réinventer le juke-box. Le succès est tel que nombre de lieux de divertissement vont se procurer cette boïte magique qui met de l’ambiance et rapporte de l’argent en prime.
La machine à danser
Lancés sur le marché depuis 2010, ces boîtes à musique made in Morocco sont la version numérique du juke-box. Au grand dam des puristes, révolu le temps des vieilles Wurlitzer ou Seeborg, où il faut glisser une pièce, taper fort et attendre que le 45 tours se calle sous l’aiguille de lecture. Pour fabriquer une de ces machines modernes, il suffit d’un disque dur, d’un amplificateur pour le son, d’un écran LCD, d’un monnayeur à pièces et le tour est joué. Avec l’explosion de l’offre en matériel informatique bon marché, autant dire que les coûts de revient peuvent être compressés à souhait. “Le prix d’un juke-box varie en fonction de la puissance du matériel investi dans la machine et de son boîtier, ça peut aller de 6000 à 12 000 DH”, précise Salvatore Mara, un des fabricants de juke-box.
Equipé d’un disque dur de 80 G de mémoire, un juke-box peut contenir jusqu’à 20 000 chansons. En guise de service-après-vente, certains fournisseurs proposent même de recharger la base de données des disques et des pochettes des artistes. Cerise sur le gâteau : à un dirham le morceau, l’affaire est juteuse puisque ce genre de machine est amorti au bout de trois mois. “L’informatique combinée à Internet nous ouvre des possibilités infinies de développement. La prochaine génération de juke-box sera connectée aux sites de musique et l’offre sera multipliée à l’infini”, souligne notre fabricant.
Music non-stop
Le succès de ces boîtes à musique est tel que cinq ateliers en produisent à Casablanca. “Nous en fabriquons une quinzaine par mois”, confie Salvatore Mara. Certaines de ces sociétés ont recours à la sous-traitance pour honorer leurs carnets de commande. C’est le cas d’un atelier situé dans l’Ancienne médina de Casablanca, qui fabrique un des modèles les plus luxueux, avec de puissants hauts-parleurs, un boîtier en métal et équipé d’une télécommande infrarouge. Ces sociétés peuvent dès lors équiper les cafés, les bars et les salles de jeux de toutes les villes du royaume. Certaines se sont même lancées dans l’export vers les pays africains comme le Gabon, la Côte d’Ivoire ou encore la Guinée-Bissau où le juke-box fait un tabac.
Pour varier la gamme du produit, les fabricants rivalisent sur le design des machines qu’ils proposent, qui vont des plus sobres aux plus kitchs. Certains proposent aussi des modèles équipés de sorties micro et d’écran digital pour afficher les Lyrics des chansons. Mais où sont alors passés les bons vieux juke-box ? Pour les retrouver, il faut aller sur les portails de vente d’objets de collection. Une clientèle très friande de ces articles mythiques se les paie pour décorer un salon cosy ou un coin bar. “C’est une clientèle exigeante. Les juke-box les plus recherchés datent des années 50 à 65. Ce n’est pas toujours facile à trouver”, souligne Salvatore Mara. Certains de ces modèles coûtent jusqu’à 150 000 DH. Mais quand on aime, on ne compte pas !