Dossier publié dans l’édition 323 de TelQuel (mai 2008).
Il est devenu le premier intime de Mohammed VI, juste après Lalla Salma et les enfants royaux. Secrétaire particulier du souverain, en liaison directe et permanente avec lui, au courant de ses dépenses les plus personnelles… Même quand il se repose en famille le samedi, dans sa résidence adjacente à la route des Zaërs à Rabat (pelouse tondue au cordeau, piscine aux dimensions imposantes, fontaine déco et petit parc de jeux aménagé pour ses deux filles…), la sonnerie de son téléphone portable bordeaux peut retentir à tout instant. Une sorte de téléphone rouge avec le patron ? En tout cas, quand on a le numéro privé du roi (surtout s’il vous appelle souvent), c’est qu’on a réussi dans la vie. C’est qu’on a une villa cossue, de lourdes tentures aux fenêtres, une cheminée en marbre et des toiles de maître couvrant les murs.
Sur son standard de vie, Mounir Majidi ne s’embarrasse pas de fausse pudeur : “Je ne cache pas ma réussite, contrairement à beaucoup d’autres”, répond-il à ceux qui lui en font (poliment) le reproche. Dans son salon, trône une photo de lui avec Mohammed VI, deux amis souriant à pleines dents, comme pour souligner à quel point la vie est belle… L’image, quasi familiale, est loin des clichés officiels du baisemain royal, qu’on trouve habituellement dans les intérieurs des grands commis de l’Etat. Notons que Mounir Majidi est aussi proche de Mohammed VI qu’il est loin de son milieu d’origine, celui d’un fils de fonctionnaire au ministère de la Justice et d’une mère fassia dont il a hérité l’accent. Tout le prédestinait à finir cadre supérieur dans une banque ou dans “la com”. Mais une rencontre, faite à l’âge de 8 ans, allait bouleverser sa vie.
A l’ombre du fils Osman
Mounir Majidi est alors en CM1 dans une modeste école publique, quand son destin bascule. Grâce à ses bonnes notes à l’école, il est sélectionné pour partager sa scolarité avec le fils d’Ahmed Osman et de Lalla Nezha, la sœur de Hassan II. Le beau-frère du roi, futur Premier ministre (en 1975) et patron du RNI, avait décidé de créer une école à domicile pour son fils Naoufel. Une sorte de réplique du Collège royal, construite autour de son rejeton au sang princier, et réservée aux grosses têtes de l’enseignement primaire. “Mounir Majidi avait été choisi avec deux autres élèves aux excellents résultats scolaires”, raconte un proche de Naoufel Osman.
Le jeune Mounir quitte donc le domicile familial, ses deux frères et ses quatre sœurs, pour emménager dans la villa Osman, au contact quotidien de Naoufel, neveu de Hassan II et cousin du prince héritier. Rapidement, Mounir et Naoufel deviennent inséparables et bâtissent les souvenirs qui font les futurs amis d’enfance. “Majidi restait chez les Osman même le week-end”, raconte un témoin de cette époque bénie. Naoufel invite souvent son cousin, le prince héritier Sidi Mohammed, à venir tuer le temps chez lui : “Ils étaient très proches et partageaient la même passion pour les sports de glisse. Durant leur adolescence, ils se retrouvaient le week-end dans la villa des Osman à Témara pour surfer”, raconte un proche de Naoufel. Mounir Majidi était toujours de la partie, côtoyant aussi bien le prince héritier que ses camarades du Collège royal, venus en renfort : Fouad Ali El Himma, Rochdi Chraïbi, Yassine Mansouri… Bref, toutes les futures têtes pensantes du royaume.
Majidi étudie alors au collège public de Dar Essalam à Rabat, en compagnie de Naoufel, son copain du primaire. Il se tient à sa place, ne fait pas trop de bruit en présence du prince héritier et de ses camarades d’école. “Il était très effacé, on ne le remarquait pas”, raconte un ancien du sérail. Comme beaucoup d’invités “lambda” des soirées et après-midi du futur Mohammed VI, relégués en fond de scène. “Le prince héritier aimait être entouré, mais on ne savait pas toujours qui était qui. Ces invités inconnus étaient comme une virgule dans une phrase. Ils n’étaient pas forcément nécessaires à la ponctuation”, contextualise un ancien de la bande.
En 1983, Majidi, qui a passé l’épreuve du bac sans encombre, décide de rester au Maroc pour ne pas s’éloigner de Naoufel Osman (recalé, lui). Il passe deux ans à la fac de sciences de Rabat, puis part étudier l’informatique à Strasbourg. Quelques années plus tard, diplôme en poche, Majidi décroche même un job chez Sagem, le célèbre équipementier télécoms, et envisage sérieusement de s’installer en France et de laisser derrière lui les années dorées de l’entourage royal. Mais ce dernier le rattrape quand Naoufel, émergeant de la dolce vita rbatie, décide de partir pour New York, où il s’inscrit à l’université (pas si cotée) de Pace. Il rappelle alors son ami d’enfance qui, grâce à une bourse royale, s’inscrit en Master à la (nettement plus cotée) New York University. Installé dans la villa de Naoufel, sise dans la banlieue chic de New York, Majidi doit traverser la mégapole de bout en bout pour se rendre en cours à NYU. “Il sortait à 5 heures du matin pour ne plus revenir qu’à 21 heures”, nous a-t-on confié. Deux taxis, deux trains et quatre métros quotidiens, c’était le prix à payer pour étudier dans une université prestigieuse, sans perdre le “home sweet home” de la villa de son ami d’enfance. Mais vite lassé de cette éprouvante discipline, Majidi finit par demander un transfert à Pace, qui n’est qu’à un jet de pierres de la villa (surtout que Naoufel y va en voiture avec chauffeur…).
Une fois son MBA (Masters of Business Administration) en poche, Majidi rentre au bercail. C’est le retour au landerneau rbati et aux multiples soirées du prince hériter. Jeune cadre dynamique à l’ONA, puis à la CDG, Mounir Majidi fréquente désormais le futur roi sans avoir à passer par son cousin. Il n’est plus une pièce rapportée, mais un membre de plein droit du cercle des intimes du prince héritier. “Naoufel a mal pris ce rapprochement. Il a eu le sentiment d’avoir été le cheval gagnant sur lequel Majidi avait misé pour se rapprocher du sérail”, confie un ancien des soirées princières. Le fils Osman n’aurait jamais confié ses griefs à son ami d’enfance. “Dans ce milieu, on ne se parle pas aussi franchement qu’on pourrait le penser. On garde ses rancoeurs pour soi, en s’efforçant de faire bonne figure devant tout le monde”, ajoute notre source. Cette crispation avait-elle été dépassée quand survient le décès de Naoufel, en avril 1992, des suites d’une foudroyante maladie ? L’histoire ne le dit pas…
Même après la mort de son ami d’enfance, Mounir Majidi, tout “intégré” qu’il soit dans le cercle du futur roi, reste plutôt en retrait. Quand, des années plus tard, il deviendra secrétaire particulier du roi, on dira qu’il avait “le profil type pour le job” : discret, limite effacé, mais toujours présent si on le sollicite.
Premières affaires, premières casseroles
Mais nous n’en sommes pas encore là. En 1992, son retour de New York marque un tournant. C’est l’époque dramatique de la mort de Naoufel, mais aussi la grande époque de la Bourse machine à sous et des coups fumants qu’on se raconte entre initiés de la finance. Majidi entame sa carrière à la BCM, avant de faire un bref passage à l’ONA (dans le département “systèmes d’information”, qui accueillera des années plus tard une jeune stagiaire du nom de Salma Bennani), puis un crochet par la banque d’affaires de la CDG (devenue aujourd’hui CDG Capital). D’après ses amis de l’époque, “il lisait assidûment la presse spécialisée, dévorait The Economist de la première à la dernière page, mais aussi Les Echos, La Tribune et le Financial Times”… Des lectures studieuses, mais qui ne le font pas briller pour autant quand, en 1998, il finit par se lancer à son compte. Après avoir bourlingué entre l’ONA et la CDG, il crée sa première société, First Contact Communication, société d’affichage urbain plus connue sous le nom de FC Com. Celui dont on sait qu’il fait partie de l’entourage du prince héritier (mais sans plus) commence à faire parler de lui et des relations plutôt incestueuses entre le business et le Pouvoir, qu’il personnifie à merveille aux yeux de la presse indépendante, en pleine “montée d’audace” à l’époque. Bénie des dieux, FC Com pond très vite des œufs d’or, avec le soutien bienveillant du ministre Driss Basri, alors au faîte de sa puissance. Si Driss a la mainmise sur les collectivités locales et Majidi, de par ses connexions, a bien entendu ses entrées dans son bureau. Assez vite, il obtient une concession de 30 ans pour implanter des panneaux d’affichage à Casablanca, avec une exclusivité sur les aéroports et les gares du royaume. En contrepartie de son quasi-monopole sur l’affichage urbain (encore balbutiant, à l’époque), FC Com verse des redevances plutôt modiques à la collectivité. “L’affichage urbain était un nouveau marché, et Majidi a su le défricher. Personne n’y connaissant rien, il a juste bien négocié son contrat”, argumente un de ses proches. Rien à y redire, sauf que, quelques années plus tard, quand le barème des redevances publiques est actualisé, Majidi passe au travers et conserve ses anciens tarifs. Du coup, les rumeurs bourgeonnent sur “l’actionnariat véritable” de FC Com. Dans les salons, on se grise de l’idée que le jeune prodige de l’affichage ne fait que gérer l’argent de Sidi Mohammed. Mais Majidi a sa ligne de défense, de laquelle il n’a jamais dévié, à aujourd’hui : il a créé FC Com grâce à l’argent qu’il a gagné en Bourse pendant les années 90. Soit. Mais tout de même… Dans les salons casablancais et rbatis, on glose beaucoup sur le “flair” de Majidi, qui lui fait renifler les secteurs porteurs avec, toujours, une longueur d’avance sur les opérateurs économiques “normaux”… C’est ainsi qu’en 1999, l’ami du nouveau roi se voit proposer une affaire juteuse : prendre des parts dans GSM Al Maghrib, un distributeur de produits télécoms. La seconde licence de mobile vient d’être attribuée à Méditel et le slogan “un Marocain, un portable” fait tourner toutes les têtes. Comme par miracle, Maroc Telecom arrive à la rescousse et entre dans le tour de table de GSM Al Maghrib. Mieux : la toute nouvelle entreprise est adoubée fer de lance de la politique commerciale de l’opérateur historique. Mais Majidi se retrouvera sur la sellette 5 ans plus tard, en 2004, quand Maroc Telecom publiera ses comptes, à la veille de son introduction à la Bourse de Paris : GSM Al-Maghrib traîne plus de 300 millions de dirhams de créances irrécouvrables ! “En fait, Majidi ne s’occupait pas de cette entreprise, dont le gérant était un personnage douteux”, martèle aujourd’hui un proche du secrétaire particulier du roi, comme pour le dédouaner.
Le deus ex machina de l’ONA
C’est en 2000 que naît véritablement le Mounir Majidi que nous connaissons aujourd’hui, quand Mohammed VI le bombarde secrétaire particulier. “Le roi lui a annoncé ça sur un coin de table, comme s’il s’agissait d’un poste anodin”, précise un proche. Le nouveau bureau de Mounir Majidi est à quelques pas de celui du nouveau roi, au palais du Mechouar, à Rabat. On le croise aussi, parfois, dans une villa adjacente à la résidence royale de Dar Essalam, située au bout d’une voie en sens interdit. C’est là que se trouve le siège de Siger, le holding royal qu’il lui revient de “rationaliser et fructifier” – ce qui fait apparemment partie intégrante de ses nouvelles fonctions. Quand on pense à Siger, vu l’énormité des méga-entreprises sous sa coupe, on imagine une ruche de quadras cravatés, surdiplômés et hyper-actifs. Il n’en est rien. La gestion, la vraie, a lieu dans les filiales de l’ONA et de la SNI. A Siger, on ne fait que gérer des actifs… et prendre des décisions stratégiques qui bouleversent régulièrement l’économie marocaine. C’est que le secrétaire particulier de Mohammed VI gère l’ONA avec une poigne de fer, et sans gant de velours. Aussi discret qu’il soit dans sa vie privée, Majidi fait valser les présidents du holding, défrayant souvent la chronique économique du royaume. Trop souvent, même, pour certains observateurs avisés des affaires royales. Quand on fait le bilan aujourd’hui, on s’aperçoit qu’en 7 ans, il a “consommé” trois présidents de l’ONA, deux présidents de sa banque (Attijariwafa), sans compter les présidents des filiales. La dernière tête coupée en date est celle de Saâd Bendidi, qui s’est vu débarquer lors du dernier conseil d’administration de l’ONA, comme un élève qu’on vire de classe. “Quand il a découvert la gabegie Wana (ndlr, 7 milliards d’investissement pour un business plan hasardeux), Majidi était hors de lui. En privé, il n’hésitait pas à qualifier le président de l’ONA d’imbécile”, confie un témoin.
C’est que Majidi n’a de comptes à rendre à personne. Sauf au roi, bien entendu, qui l’a chargé de faire fructifier ses avoirs. C’est pourquoi, quand il reprend Siger en 2000, il commence par constituer une équipe de choc rodée aux montages financiers. Des recrues croisées depuis le temps où il travaillait comme cadre dans les grands groupes du royaume. “C’est Hicham Chbihi, un intime de Majidi connu à la CDG, qui lui a présenté Hassan Bouhemou. Tout est parti de là, raconte un proche. Il lui a suffi d’un déjeuner en tête à tête pour recruter ce dernier au poste de DG de Siger”. Puis c’est l’effet boule de neige. Majidi coopte Bassim Jaï Hokimi à la tête de l’ONA, qui recrute à son tour Khalid Oudghiri pour prendre la tête de la BCM. Hassan Mansouri se retrouve, de son côté, à la tête de Primarios, filiale de Siger qui, en plus de faire dans l’ameublement, gère l’intendance des palais royaux.
Son équipe d’ingénieurs financiers sous le coude, Majidi fouette la gestion de l’ONA comme jamais auparavant. Objectif déclaré : drainer plus de cash et distribuer un maximum de dividendes à son “actionnaire de référence”. Et de fait, deux ans seulement après la prise de fonction de Majidi, les intérêts royaux sur le marché financier changent radicalement de visage : par un mémorable tour de passe-passe financier (dont on attribue l’idée à Jaï Hokimi), le secrétaire particulier de Mohammed VI verrouille le contrôle de Siger sur la SNI, l’ONA et la galaxie de filiales du holding. La BCM, banque de l’ONA, ne tarde pas à racheter Wafabank à la famille Kettani, pour donner naissance à Attijariwafa, première banque privée du royaume (et du Maghreb). Résultat : fin 2003, 3 ans après l’arrivée de Majidi, la capitalisation du groupe royal représente… les deux tiers de la Bourse !! La presse indépendante a beau dénoncer la fâcheuse imbrication entre Pouvoir et affaires, Majidi n’en a cure. Il avait une mission, il l’a remplie avec brio ! Et puis, le “boss” semble satisfait, n’est ce pas la seule chose qui compte ?
Impitoyable sérail
Et qu’a donc pensé le boss, quand “l’affaire du terrain de Taroudant” a éclaté ? Nous sommes alors en 2005, et les prix de l’immobilier sont en pleine flambée, quand Mounir Majidi achète un terrain de 4,5 hectares à Taroudant, à un prix défiant toute concurrence : 50 DH le mètre carré – soit 9 fois moins que la valeur du marché local, selon les estimations d’experts locaux. Encore une opportunité qu’“on” aurait offerte à Majidi sur un plateau d’argent. Lui s’en défend, et assure à qui veut l’entendre qu’il avait saisi cette opportunité “par hasard, après avoir discuté avec un haut responsable du ministère des Habous”. Et le prix, indécemment bas ? L’entourage de Majidi n’en démord pas : “c’était le prix du marché, à l’époque”. Mouais…
La transaction de Taroudant serait restée secrète sans une “gorge profonde” qui aurait laissé filtrer les détails à la presse. Depuis, ça jase ouvertement, dans les salons, les milieux d’affaires, comme dans les cercles très sélects de la nomenklatura royale. Au cœur des confidences et des perfidies, l’animosité entre Majidi et les anciens du Collège royal, le cercle d’amis où il n’a jamais véritablement été admis. Un sujet qui fâche, et qui remonte régulièrement à la surface. Majidi jouerait un bras de fer avec Fouad Ali El Himma et, forcément, les anciens de “la clique du Collège royal” se positionnent. “Yassine Mansouri (patron de la DGED, renseignement Extérieurs) n’adresse plus la parole à Majidi, et Noureddine Bensouda (directeur des impôts) prend mal ses demandes incessantes de dérogations fiscales”, croit savoir un habitué de ces cercles très fermés. Mais allez savoir qui taille des costards à qui… Ce qui est sûr, c’est que ces incessantes cabales et contre-cabales ne nuisent pas à la proximité de Majidi avec “le boss”. Au fur et à mesure que les “affaires” éclatent et que le soutien de Mohammed VI se confirme (au prix de quelques mémorables “colères royales”, tout de même), Majidi prend de l’assurance. “Aujourd’hui, il lui arrive même de marcher sur les plates-bandes de Rochdi Chraïbi (directeur du cabinet royal)”, avance hardiment un proche des deux hommes. Bienvenue au royaume des intrigues…
Mounir Majidi pouvait-il, au fond, y échapper ? Oui, il avait été désigné secrétaire particulier de Sa Majesté pour sa propension à la discrétion. Mais il avait aussi été chargé de la rationalisation des palais royaux, ce qui, vu la gabegie qu’il y a découverte, l’a forcément propulsé dans la lumière. Durant le très médiatique procès du colonel Hilali, ancien intendant du palais d’Agadir accusé de multiples indélicatesses, Majidi avait même été convoqué à la barre pour témoigner. “Shocking”, vu l’impératif royal de discrétion… Il n’y a pas été, évidemment, mais la presse en a tout de même fait des gorges chaudes. Et il s’en est fallu de peu que l’histoire se répète dans l’affaire du vol de vaisselle royale de la résidence de Dar Essalam. De vulgaires histoires de cuisine interne qui, dans la logique prônée par Mohammed VI, n’auraient jamais dû franchir les hautes murailles des palais royaux. Las ! Durant l’été 2007, la coupe semblait pleine. Le limogeage spectaculaire (et inexpliqué à ce jour, du moins officiellement) de Khalid Oudghiri, l’affaire du terrain des Habous de Taroudant, des Unes à charge répétées dans la presse (dont TelQuel)… Cet été-là, toute la bonne société était persuadée que la chute du “favori économique” de Sa Majesté était imminente – d’autant qu’il avait “quitté les radars” pour un long séjour à l’étranger. Mais non. On le croyait à terre, il était… en Amérique, en congé avec sa petite famille. S’est-il expliqué “entre quatre yeux” avec le souverain ? A part eux deux, nul ne peut le confirmer. Toujours est-il que quand il est rentré, il affichait, et avec éclat, la confiance renouvelée du “boss”. Majidi le phénix…
Foot et chansons
En 2008, ça repart de plus belle. Mi-février, on apprend avec stupeur que Mounir Majidi a été nommé président du FUS, le club de football de la capitale. Créé par le prince Moulay Abdellah, oncle de Mohammed VI, longtemps dirigé par Abdelfettah Frej, ancien secrétaire particulier de Hassan II, le Fath Union Sport a toujours été un club “à part”. Dès qu’il le récupère, Majidi affiche ses ambitions : il entend donner au club des allures de Milan AC, en faire un champion (pour l’instant, le FUS est bon dernier du championnat !) et une PME rentable, centre d’affaires dédié à la clé… Le secrétaire particulier du roi, qu’on surnomme illico “Il Cavaliere”, s’entoure à nouveau d’une poignée de figures connues du monde des affaires. Des “galactiques” invités à mouiller le maillot pour justifier une transaction atypique : le FUS veut racheter à la ville de Rabat le terrain où il évolue pour un dirham symbolique, contre la promesse de construire un complexe sportif flambant neuf, avant de l’offrir à la capitale. L’idée est de réaliser un projet immobilier et commercial s’étalant sur 2,5 hectares, superficie du terrain convoité, situé en plein centre de Rabat. Prix du mètre carré dans les environs : 30 000 dirhams. “La manne financière dégagée doit assurer au FUS des revenus pérennes”, explique doctement le team Majidi lors de la conférence de presse organisée le 9 mars dernier. Hum… En attendant, un terrain à la valeur inestimable aura été cédé au secrétaire particulier du roi au dirham symbolique. Sa réputation d’entrepreneur vorace aidant, des élus de la capitale voient dans la proposition de Majidi une simple (et incroyablement profitable) transaction immobilière, sous couvert de redressement d’un club de foot. Surtout que le dossier est loin d’être ficelé. “Il nous faut le terrain avant de lancer les études”, répètent en chœur les promoteurs du projet, lors de la conférence de presse qu’ils donnent le 9 mars, dans les locaux du club. Curieuse approche, tout de même… N’aurait-il pas été plus indiqué de finaliser ces études (notamment en détaillant avec précision toutes les contreparties au fameux dirham symbolique) avant de prétendre faire main basse sur un terrain qui vaut de l’or ? La presse, en tout cas, se déchaîne comme jamais contre Majidi. A tel point que, pour la première fois, il sort de son silence légendaire et menace de traduire en justice tous les journaux qui ont fait planer des doutes sur sa “bonne foi”. Invité de Radio Atlantic pour donner sa version des faits, il pousse de hauts cris contre la perpétuelle “diffamation” dont il se dit l’objet et, pour résumer les soupçons à son encontre, ponctue ses phrases d’un récurrent “et patati, et patata”… Marque de dédain pour ses détracteurs ? Plutôt un tic sémantique de longue date, que lui reconnaissent ses proches. Le Matin du Sahara (dont le directeur, Mohamed Jouahri, est l’un de ses “poulains”) vole à son secours et publie, en Une, un article larmoyant sur l’état de vétusté (réel) des infrastructures du FUS. Pour une fois, Majidi a dû s’intéresser à autre chose que les pages sport du quotidien du Palais, dont il dit être un fidèle lecteur… En tout cas, l’affaire du FUS a changé la donne. Majidi, explique un de ses lieutenants, “en a marre que la presse lui mette tout sur le dos. Que chacun assume ses responsabilités, désormais”. En clair : que chacun le sache, Majidi “balance”. C’est ainsi que s’explique le communiqué, étonnamment virulent, qui a suivi l’éviction de Bendidi de la tête de l’ONA. “Il ne voulait pas que l’histoire de Oudghiri se répète, et que le départ de Bendidi soit interprété comme une affaire personnelle entre eux”, complète notre source.
Désormais personnage public, Majidi se mêle aussi de culture, notamment depuis qu’il a pris la tête du festival Mawazine de Rabat. “Essaouira a Azoulay, Fès a Kabbaj, il fallait aussi un homme fort derrière Mawazine”, justifie un membre du staff de la manifestation rbatie. Du coup, miracle : les sponsors sont beaucoup plus généreux cette année que les précédentes, quand le festival était sous la férule de Abdeljalil Lahjomri, le très “passe-muraille” directeur du Collège royal. Le budget de cette année est tellement large qu’il permet de se payer des stars du calibre de Whitney Houston ! Mounir Majidi serait-il fan de la diva américaine ? Du tout, nous assure-t-on. Son kiff, ce serait plutôt George Benson et le fameux guitariste jazz Al Di Meola – qui seront présents, eux aussi, à Mawazine. Pour le secrétaire particulier du roi, ça n’a pas fini de swinguer…
Majidi – El Himma. “Nous ne vieillirons pas ensemble” “Je vois Fouad plus que je ne vois ma propre femme”. Cette formule, Majidi la sert aux plus audacieux de ses intimes, ceux qui osent l’interroger au sujet de ses relations tumultueuses avec Fouad Ali El Himma, ex-ministre délégué à l’Intérieur et depuis peu, cheval de troie de la “démocratie mohammedienne” dans le monde politique. Une manière de dire que, comme c’est le cas de tous les collègues en contact permanent, la relation des deux hommes connaît des hauts et des bas. En fait, la rivalité El Himma-Majidi est un secret de polichinelle. L’épisode le plus marquant de cette lutte d’influence s’est déroulé en 2004.
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