Mondial 2018 : Le Maroc est-il un tirage "facile" ?

Cinq journalistes sportifs nous livrent leur avis sur les chances du Maroc à la Coupe du monde et le statut de l'équipe nationale avant le tirage au sort du Mondial 2018, le 1er décembre prochain.

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Tout porte à le croire. Figurant dans le chapeau 4 pour le tirage du 1er tour du Mondial 2018 en raison de sa 44e position au classement FIFA, le Maroc fait visiblement partie des « petits poucets » de la compétition. Un statut que les Lions de l’Atlas doivent également à leur 20 années d’absence de la compétition. Mais qu’en pensent ceux qui suivent le sport ainsi que le parcours des Lions de l’Atlas ? Telquel.ma a sondé cinq d’entre eux, voici leur avis.

Ali Farhat- So Foot/ 11 Freunde/ DW: « Le danger peut venir de partout »

On pourrait croire que le Maroc est un tirage facile, parce qu’il n’a pas participé à la Coupe du monde depuis 20 ans. Par ailleurs, les joueurs phares de l’équipe sont très bons, mais peu d’entre eux jouent dans les très grandes équipes européennes.

On pourrait penser que le manque d’expérience du Maroc est une faiblesse, mais cette équipe est coachée par un homme (Hervé Renard, NDLR) qui a l’habitude de relever les défis et a dû parfois composer avec des paramètres beaucoup plus compliqués. Il est tout à fait possible que cette équipe perde trois fois et reparte avec zéro point, mais je pense qu’elle fera preuve d’un minimum de discipline donc je ne pense pas que c’est un tirage facile.

La première qualité que je trouve à cette équipe c’est sa solidarité défensive dans les matchs qui comptent. Le Maroc a fini premier dans son groupe de qualifications sans encaisser de but. Dans une poule qui comptait la Côte d’Ivoire, le Mali et le Gabon (même si Aubameyang n’a pas participé à toutes les rencontres, et même si la Côte d’Ivoire et le Mali ne sont pas au mieux en ce moment), c’est une performance qui force le respect.

Si la base défensive du Maroc est aussi solide, c’est aussi parce qu’elle compte un joueur comme Mehdi Benatia. Un joueur qui n’a pas beaucoup joué cette saison avec la Juve, mais qui est quand même un élément d’expérience, et qui peut apporter beaucoup à ses coéquipiers, en leur parlant, en les conseillant, en les plaçant sur le terrain. Sur le plan offensif, le danger peut venir de partout. Neuf joueurs différents ont marqué lors des éliminatoires. La meilleure illustration est probablement le 6-0 face au Mali, avec cinq buteurs différents.

Concernant les « faiblesses » de cette équipe, je pense qu’il y a peu de joueurs qui aient l’impact d’un Benatia. Ziyech et Harit ont beau être des joueurs en vogue sur le front offensif, mais ils sont encore trop jeunes pour endosser des costumes de leaders. Ce n’est pas tant une faiblesse qu’un manque d’expérience. Ils sont jeunes, ils ont du talent, et maintenant, ils ont la possibilité de grandir, et c’est tant mieux.

Ce serait moche s’ils venaient à se brûler les ailes trop vite, alors qu’ils pourraient tellement apporter à l’avenir. Mais je pense une fois de plus qu’Hervé Renard sait ce qu’il fait, et qu’il saura gérer son équipe au mieux pour qu’elle donne le meilleur d’elle-même et fasse bonne figure au Mondial.

Reda Allali- Medi 1 TV/ Radio Mars : « C’est une équipe qui ne produit pas de jeu, mais a une marge de progression »

En 2017, aucun tirage n’est facile. Ce n’est pas comme durant les années 1970 ou 1980. Les équipes africaines ont fait leurs preuves et même si elles ne font pas d’exploit, elles ne sont pas grotesques.

Il n’y a aucune certitude sur le jeu. Je pense à la Suisse qui est une équipe solide, mais pas brillante. Certaines équipes peuvent avoir des génies individuels, mais il n’y a pas de génie collectif.

Qui plus est, vu le temps que les joueurs passent en rassemblement, il est difficile de constituer un véritable collectif. Dans ce contexte, et vu la progression de l’équipe nationale sous Renard, on ne peut pas dire que le Maroc soit un tirage facile.

Au rang des forces du Maroc, on mentionne souvent le bloc défensif. C’est à ça que l’on mesure l’investissement individuel de chacun des joueurs. La raison pour laquelle on insiste dessus, c’est que ce bloc n’existait pas avant. On a parfois reproché à certains des joueurs de ne pas assez s’investir pour avoir un bloc défensif correct en sélection.

Mais je pense qu’Hervé Renard va changer de fusil d’épaule d’ici la Coupe du monde afin de faire jouer ensemble les Ziyech, Harit et Boufal dont le jeu n’est pas particulièrement adapté aux pelouses africaines, mais aux « billards » européens. Ce potentiel offensif est un point fort, tout comme le fait qu’Hervé Renard a une maitrise totale d’un groupe. Il n’y a plus d’égos ni de starlettes.

La faiblesse de cette équipe se situe au poste d’attaquant. L’équipe est meilleure que durant la CAN, où l’équipe évoluait en un seul bloc défensif et posait ses tripes sur le terrain. Offensivement, il y a plus de combattants que de joueurs techniques.

Même si Boutayeb a mis un triplé ce n’est pas un poste où on est confiant à 100%. Il existe un problème d’efficacité comme en témoigne le match face au Mali à Bamako. Mais ce problème, on peut y remédier en reconvertissant certains joueurs offensifs en « faux neuf ».

Najib Salmi : « Il faut que cette équipe aille en Coupe du monde, pas en Russie »

Si l’on se fie aux critères de la FIFA, le Maroc est un tirage facile. Mais c’est là l’une des beautés du football, car l’équipe n’aura rien à perdre, et tout à gagner. Cela me rappelle la Coupe du monde 1970 où le Maroc était considéré comme un petit poucet dans un groupe composé de l’Allemagne, du Pérou et de la Bulgarie.

En fin de compte, l’Allemagne qui était vice-champion du monde a peiné face au Maroc qui est parvenu à décrocher le nul face à la Bulgarie. La seule surprise était la défaite face au Pérou qu’on a sous-estimé et qui nous a battus 3-0.

La force de cette équipe est la cohésion que lui a donnée Hervé Renard dans le jeu. Il a privilégié l’équipe par rapport aux individualités et a créé un groupe solide qui n’a pas encaissé de but lors des éliminatoires. Ma crainte pour cette équipe est qu’elle aille en Russie et non pas en Coupe du monde et je pense que c’est le principal souci du staff technique.

 Jalal Bouzrara- Medi 1 TV : « En Coupe du monde, il faut savoir défendre »

Une équipe qui n’a pas pris de but pendant la phase de qualification n’est pas une équipe facile. C’est un groupe où il existe un savant mélange entre solidité défensive et expérience, et qui a une âme avec un entraineur qui a su fédérer autour de lui.

À mon sens, le Maroc est l’une des équipes les plus compliquées du chapeau 4. On peut également compter sur le talent naturel de joueurs comme Ziyech ou Amrabat. Ce qui est à craindre, c’est un mauvais tirage où l’équipe nationale pourrait tomber sur une grosse équipe.

Concernant le secteur offensif, il n’y a pas vraiment de crainte à avoir, car pour aller loin dans une Coupe du monde, il faut savoir défendre. Il ne faut pas oublier que le Maroc ira d’abord en Coupe du monde pour subir et devra saisir son occasion lors de ces rencontres, notamment en contre-attaque.

Antoine Donnarieix- So Foot : « Je les vois bien aller en quart de finale »

Le Maroc n’est certainement pas un tirage facile pour le Mondial. L’équipe a fait preuve d’une solidité défensive durant la phase des qualifications pour la Coupe du monde où elle n’a encaissé aucun but.

Qui plus est, elle dispose d’un vrai atout en la personne d’Hervé Renard qui est un très bon coach même s’il ne l’a pas montré en France. Il n’y a qu’à voir ce qu’il a réalisé avec la Zambie et la Côte d’Ivoire.

Le seul risque pour cette équipe est d’être emportée par l’euphorie, car cela fait 20 ans qu’elle ne s’est pas qualifiée pour la Coupe du monde. Je les vois bien aller – pourquoi pas – jusqu’en quart de finale.

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