Tout ce que reprochent les futurs médecins à El Ouardi

Pour les étudiants en médecine, l’instauration du service obligatoire en zone rurale est la goutte de trop.

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Depuis que le ministre de la Santé a présenté son projet d’instauration d’un service sanitaire obligatoire contraignant les jeunes médecins à exercer en zones rurales, les étudiants en médecine crient leur désaccord. Cette réforme est présentée comme « la goutte de trop », ils reprochent beaucoup d’autres choses à Houcine El Ouardi. Détails.

Le labyrinthe des études de médecine

Entre les informations émanant du ministère distillées au compte goutte et le plaidoyer des étudiants en médecine qui présentent des arguments parfois contradictoires et ont du mal à proposer des alternatives, difficile de se faire une idée. Pour comprendre l’enjeu, il faut déjà connaître le cursus des études de médecine.

Les étudiants suivent des cours pendant les six premières années. Ils travaillent dans un hôpital périphérique durant toute leur septième année, à l’issue de laquelle ils passent leur thèse. Là, trois « choix » s’offrent à eux : devenir médecin généraliste dans le privé, à l’hôpital, ou se spécialiser. Aucune difficulté apparente pour la première option. Pour la deuxième, le jeune médecin doit passer un concours appelé « concours d’intégration à la fonction publique ». S’il est reçu, le médecin est affecté en zone rurale deux ou trois ans.

Le service sanitaire obligatoire

La situation. Le pays manque cruellement de médecins exerçant en zone rurale. 53 % des médecins sont concentrés dans trois régions. Pour le moment, presque seuls les étudiants reçus au concours d’intégration exercent à la campagne.

Ce que le ministre propose. Le ministre de la Santé souhaite imposer à tous les jeunes médecins (y compris ceux qui s’apprêtent à exercer dans le privé et ceux qui souhaitent ensuite se spécialiser) de travailler deux ans en zones rurales. Derrière ce projet réside l’idée que ces étudiants ont suivi des études financées par l’Etat et donc, qu’ils peuvent « rendre » ce service à la société.

Ce que les étudiants reprochent au ministre. Hormis le manque de consultation lors de l’élaboration de cette réforme, les étudiants regrettent le caractère obligatoire de ce service. Aussi, ils critiquent le fait de ne pas être fonctionnaires lors de ces deux ans (salaire et avantages s’y afférant). Les spécialistes ont 31 ans à la fin de leurs études : « J’aimerais fonder une famille et avoir le droit de pouvoir vivre avec où je veux », nous explique par exemple Ali. Certains assurent bien vouloir exercer à la campagne, mais à condition de travailler dans des conditions adéquates, avec le matériel médical nécessaire.

Ce qu’ils proposent. Pour eux, a priori, la solution la plus adéquate pour résoudre le problème des déserts médicaux sans réaliser de grande reforme serait d’augmenter le nombre de places au concours d’intégration de la fonction publique (mais cela suppose un budget plus important). Et si le service sanitaire est finalement instauré, ils aimeraient au moins être rémunérés comme des fonctionnaires.

Lire aussi : Service médical obligatoire: El Ouardi répond aux attaques

Le départ des professeurs dans les cliniques

Houcine El Ouardi a instauré le Temps plein aménagé (TPA). Cette mesure est censée récompenser les professeurs qui ont dédié leur vie à l’enseignement et à l’hôpital public en les autorisant à exercer en même temps en clinique. Selon le dahir, cet aménagement ne concerne que deux demies journées par semaine. Mais d’après Othmane El Harmouchi, doyen des internes du centre hospitalier Moulay Abdellah de Salé, il y a trop peu d’inspection et les professeurs autorisés désertent l’hôpital public. « Ils laissent les spécialistes en formation seuls », nous explique-t-il.

Le concours de spécialité aléatoire

Le concours de spécialité n’est pas organisé chaque année. Depuis quelques temps, il a lieu tous les deux ans. Mais les dates ne sont pas connues d’avance, et le numerus clausus non plus. A l’issue du concours de spécialité, les étudiants sont contractuels ou bénévoles. Dans le premier cas, ils sont rémunérés convenablement (environ 10 000 dirhams) mais dans le second, ils ne touchent que 3 000 dirhams par mois (mais reçoivent des avantages ensuite).

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