Des profs se mobilisent pour plus de mixité à l’université

Soutenu par l’Union européenne, le projet Rumi cherche à inclure davantage l’enseignement supérieur à ceux qui en sont souvent exclus : Subsahariens, handicapés, jeunes des campagnes, d'origine modeste...

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Cité universitaire à Rabat. Crédit: Yassine Toumi/TelQuel

Personnes en situation de handicap, jeunes filles, étrangers, étudiants provenant du monde rural et ceux victimes de précarité économique… ces groupes, une fois inscrits à l’université, se retrouvent parfois exclus de la vie étudiante et voire même de certains enseignements. Ces personnes ont aussi plus de difficultés à terminer leur cursus. Par exemple, un étudiant mal voyant devra redoubler d’efforts et un jeune en situation de précarité sera contraint de travailler à côté de ses études.

C’est pour éviter le décrochage et, à terme, rendre l’université plus accessible à ces populations que des professeurs se mobilisent. Ils ont monté le projet Rumi (Réseau des universités marocaines pour l’enseignement inclusif), regroupant neuf universités du royaume. Il a reçu une aide de 800 000 euros de la Commission européenne, et bénéficie du soutien de deux ministères (ceux de l’Enseignement supérieur et de la Solidarité) et de celui de l’Observatoire national du développement humain et est mené en coopération avec des universités européennes.

Un questionnaire pour les étudiants concernés

Concrètement, le but est avant tout de dresser un bilan de la situation, pour ensuite faire des propositions aux pouvoirs publics, à la fois ministères et directions des universités. L’ambition : institutionnaliser une approche inclusive des universités. Les étudiants sont donc invités à répondre à un questionnaire en ligne, pour que les porteurs du projet perçoivent encore plus précisément les problèmes qu’ils rencontrent.

Les propositions se feront aussi à partir d’un échange de bonnes pratiques avec des universités européennes partenaires, en fonction des moyens et du contexte marocain. Mohamed Youbi Idrissi, professeur en géographie à l’Université de Tétouan, est l’un des initiateurs de Rumi. Il espère que les premières mesures pourront être prises dès la rentrée 2016.

Très peu d’initiatives pour le moment

Mais le professeur sait qu’il y a énormément de travail à faire : « Ce n’est pas pour rien que nous sommes épinglés par nos partenaires européens », constate-t-il. Pour le moment, il n’y a aucune politique nationale en la matière et même au niveau des universités, pas de programme d’égalité des chances institutionnalisé : « Il y a des très peu d’exemples, et ils relèvent de la volonté d’une ou de personnes attentives mais d’une stratégie. Il s’agit juste d’un bricolage à petite échelle. Nous, nous voulons discuter de la question et s’introduire dans les conseils des universités pour les accompagner ».

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D’après lui, il n’y a pas même une prise de conscience du problème de l’exclusion :

Les dirigeants d’université doivent faire face à d’autres problèmes comme le sureffectif ou la non-adéquation entre la formation et le marché de l’emploi, qui occultent ces problèmes d’exclusion.

Pourtant, selon lui, ce n’est pas qu’une question d’argent. Il s’étonne que les universités ne soient pas toutes équipées d’ascenseurs et regrettent que les bus ne soient pas adaptés pour permettre aux étudiants en situation de handicap de venir en cours. D’après Mohamed Youbi Idrissi, les fonds ne sont pas si difficiles à trouver : « Il existe un programme bénéficiant d’un fonds européen qui permet d’équiper les classes de moyens technologiques nécessaires aux mal voyants ».

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Mieux accueillir les étudiants subsahariens

Le professeur donne également l’exemple de son université, qui a instauré des bourses sociales rien qu’en faisant appel à des bailleurs sociaux et au conseil de la région. Ainsi, 700 bourses sont distribuées chaque année.

D’après Mohamed Youbi Idrissi, cette inclusion serait aussi un bon moyen de valoriser l’enseignement supérieur marocain à l’étranger. Un bon accueil des Subsahariens irait par exemple dans ce sens. Et de faire remarquer que dans les classements internationaux des universités, l’approche genre est prise en compte.

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Liste des universités parties prenantes du projet Rumi :
  • Université Abdelmalek Essaâdi de Tétouan ;
  • Université Mohammed Ier d’Oujda ;
  • Université Moulay Ismaïl de Meknès ;
  • Université Ibn Tofail de Kénitra ;
  • Université internationale de Rabat ;
  • Université Mohammed V de Rabat ;
  • Université Cadi Ayyad de Marrakech ;
  • Université Sultan Moulay Slimane de Béni Mellal ;
  • Université Ibn Zohr d’Agadir.

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