Justice. L’impossible réforme ?

Par

Les recommandations ont été publiées il y a six mois, mais leur mise en application traîne encore.

Téméraire, Mustafa Ramid a annoncé vouloir réformer le système judiciaire « quel qu’en soit le prix ». S’étant mis à dos avocats et magistrats, associations et syndicats, le ministre de la Justice et des Libertés paie, pour le moment, le prix de la colère de ses pairs. Depuis plusieurs mois, la grogne des professionnels supplante la charte de la réforme proposée par Ramid, accusée de ne pas tenir compte de leurs doléances et de menacer leur indépendance. Le ministre de tutelle avance donc lentement, face au vent de la colère, ne jurant que par l’ouverture du dialogue et le bien-fondé des 200 objectifs sectoriels soumis en juillet 2013, allant de l’indépendance du pouvoir judiciaire à la formation des compétences, en passant par la moralisation du système dans son ensemble.

Ça tourne au ralenti

Début janvier, Ramid a néanmoins réussi à présenter son projet devant 180 associations nationales à Rabat. Décidé à les convaincre, le ministre PJD a défendu un texte basé, selon lui, sur la neutralité, l’honnêteté et l’indépendance, marquant un « tournant historique ». Mais la partie n’est pas gagnée et la réforme avance au ralenti. Preuve de cette lenteur, le retard pris dans la réforme de la grâce royale. Après le scandale du Danielgate, Mohammed VI a appelé à une refonte de ce système. A l’aube de la nouvelle année, la traduction concrète de ce vœu pieux se fait encore attendre. Ramid s’est contenté récemment de déclarer « qu’un nouveau texte verrait le jour dans les prochains mois, qu’il devrait répondre aux ambitions de tous et accompagner les mutations que connaît le Maroc ». Une information étayée par plusieurs avocats, notamment Maître Abderrahim Jamaï, qui confirme qu’une cellule dédiée à la réforme du système de grâce a vu le jour au ministère. D’autres se montrent plus circonspects et estiment que Ramid craint de toucher aux prérogatives du souverain.

Un autre écueil sur lequel se heurte la réforme de la justice est la difficulté à trouver un consensus au sujet de la refonte du Code pénal. Pour l’heure, seules quelques grandes modifications filtrent : la mise en place de peines alternatives à l’emprisonnement, les travaux d’intérêt général, la mise à l’épreuve, l’amende journalière ainsi que l’introduction de sanctions administratives en lieu et place de condamnations pénales sont des principes admis. Mais plusieurs points restent encore flous, comme la garde à vue, la liberté de culte, la dépénalisation des relations sexuelles, la peine de mort ou encore le viol. Jusqu’où Ramid osera-t-il aller ?

Rejoignez la communauté TelQuel
Vous devez être enregistré pour commenter. Si vous avez un compte, identifiez-vous

Si vous n'avez pas de compte, cliquez ici pour le créer