Les Ultras du Wydad et du Raja expliquent pourquoi ils ont boycotté le derby

Les groupes de supporters du Wydad et du Raja ont dévoilé les raisons du boycott du derby qui a eu lieu le 12 avril et comptait pour la 26e journée du championnat national. Il s’agissait de la première rencontre entre les deux équipes rivales organisée au stade Mohammed-V de Casablanca depuis la fin des travaux.

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Thembinkosi Lorch (WAC) et Abdellah Khalifi (RCA). En arrière-plan, les tifos et autres fumigènes qui font l'ambiance de ces matchs ont laissé place aux gradins dépeuplés. Crédit: Yassine Toumi/TelQuel

Les Ultras ont qualifié leur décision de “pause pour réveiller les consciences”, dénonçant la banalisation de la corruption dans la gestion des affaires de la ville et du sport en général.

Dans leur communiqué, ils expliquent qu’“avant le derby, plusieurs réunions ont eu lieu entre les trois groupes, au terme desquelles (ils ont) convenu de boycotter le match”. Une rencontre a ensuite été tenue avec les autorités concernées “pour clarifier notre position, adoptée volontairement”, ajoute le communiqué. “Nous avons choisi de garder le silence, sans incitation au boycott, conscients de la tension actuelle dans la ville. L’intérêt du pays prime pour nous sur toute autre considération”, précise la même source.

Les Ultras ajoutent que les raisons de ce boycott sont claires et tiennent notamment à “une gestion chaotique des travaux de rénovation du complexe Mohammed-V, emblème du sport national, sans réelle reddition des comptes, des milliards dépensés sans amélioration visible, les mêmes rustines avec des budgets toujours plus élevés, des retards énormes dans les travaux, alors que la majorité des titres de la saison sont déjà joués et que d’autres stades ont été construits en un temps record”. Ils rappellent qu’en huit ans, le stade a été fermé trois fois pour rénovation.

Les groupes dénoncent également les restrictions subies par le mouvement Ultra depuis le début de la saison, notamment “les limitations de déplacement injustifiées, les décisions de huis clos incohérentes, et l’iniquité flagrante entre villes”. Casablanca, ajoutent-ils, continue de souffrir d’un abandon flagrant en matière d’infrastructures, alors que de petits clubs ont obtenu des stades neufs aux normes internationales.

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Ils pointent aussi l’éloignement du seul stade en construction, situé à plus de 50 km de la ville, à Benslimane. Certaines salles refusent même d’accueillir les matchs du Wydad et du Raja, préférant des concerts. Casablanca, capitale économique, a été écartée de la Coupe du monde 2030, ne recevant que des matchs secondaires lors de la CAN 2025, rappellent-ils.

“On parle d’un monument national sans aucun match de la sélection nationale pendant la CAN… Où sont ceux censés défendre Casablanca ? Où sont les élus qui ne se montrent qu’à l’approche des élections ? Les habitants ont le sentiment d’un profond mépris, malgré tout ce que la ville a apporté au sport national”, poursuit le communiqué.

Les Ultras dénoncent aussi les lourdes peines infligées à de jeunes membres, dans le cadre de l’article 507, qu’ils jugent injustes. Certains ont écopé de 10 à 15 ans de prison sans qu’il y ait eu de victimes. Ils assurent que le travail d’assainissement au sein du mouvement a commencé depuis longtemps, à travers des campagnes contre les débordements violents, et appellent les autorités à engager des réformes structurelles plutôt que de recourir systématiquement à la répression.

Ils estiment que les comportements déviants résultent du manque d’espaces culturels et récréatifs : “Le jeune, livré à la rue, n’a comme exutoire que les Ultras.”