Immigration : Quand Ottawa change de ton

Le gouvernement canadien a récemment mis en place plusieurs mesures pour freiner le flux migratoire, au moment où cette question suscite de vifs débats à près d'un an des élections fédérales prévues en octobre 2025.

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Plusieurs rapports indiquent que le nombre des demandes de visa visiteur refusées par le pays nord-américain était plus élevé ces derniers mois qu’à tout autre moment depuis le pic de la pandémie du Covid.

Les agents de l’immigration ont rejeté plus de demandes qu’ils n’en ont approuvées en janvier, février, mai et juin 2024. Même constat au niveau des permis d’études et de travail approuvés, dont le nombre a enregistré une nette baisse.

L’immigration au cœur des débats politiques Dans ce contexte, les partis de l’opposition estiment que les politiques migratoires mises en place par le gouvernement Trudeau sont responsables d’une hausse incontrôlée du nombre de migrants, de la hausse du taux de chômage et de l’augmentation des prix de l’immobilier.

Au parlement, une motion a été adoptée à la majorité en février écoulé pour réclamer une révision des cibles fédérales d’immigration dès cette année. La motion demande aussi au gouvernement fédéral de consulter les provinces avant de fixer ses objectifs en la matière.

Les députés canadiens affirment que le maintien de la cible de 485.000 nouveaux résidents permanents en 2024 n’est pas raisonnable et plaident pour un rééquilibrage entre le nombre d’immigrés admis et les ressources disponibles au niveau des provinces.

De récents sondages ont montré un changement radical dans la perception de l’immigration par les Canadiens, dans un contexte de crise économique croissante. Une enquête publiée en juin dernier par Research Co révèle que 44% des Canadiens estiment que l’immigration a un effet essentiellement négatif sur le Canada, soit une augmentation de 6% par rapport à l’année dernière.

« Ce n’est pas quelque chose que nous avons constaté il y a un an ou deux », a commenté Mario Canseco, président de Research Co.

Selon ce sondage, seulement 42% des personnes interrogées ont déclaré avoir une vision positive de l’immigration. Du côté du gouvernement, le ministre de l’Immigration, Marc Miller, a affirmé que son département va réévaluer le nombre de personnes demandant la résidence permanente.

« Il est maintenant temps de les examiner et de proposer de véritables options et non des changements simplement pour faire face à l’opinion publique », a-t-il souligné.

Pour sa part, le Premier ministre Justin Trudeau a souligné que son gouvernement réduirait le nombre de travailleurs étrangers temporaires à la suite d’une augmentation des demandes.

Trudeau a également évoqué la possibilité de réduire le nombre de résidents permanents que le Canada accepte chaque année, ce qui mettrait un terme à des années d’augmentation des niveaux d’immigration sous son mandat.

L’année dernière, les employeurs ont été autorisés à embaucher 239.646 travailleurs étrangers temporaires, soit plus du double par rapport à 2018, selon Emploi et Développement social Canada. Une décision fortement critiquée

La décision d’Ottawa de réduire le nombre de travailleurs étrangers temporaires n’a pas été accueillie positivement par certains milieux professionnels. Le Conseil du patronat du Québec a fustigé cette décision, notant que les travailleurs étrangers temporaires répondent aux besoins du marché du travail et apportent une contribution essentielle à la prospérité du Québec.

« Des mesures supplémentaires devraient être prises pour les demandeurs d’asile. Ceux-ci, proportionnellement plus élevés ici que dans le reste du Canada, ont un potentiel de contribuer à l’économie à travers le pays, mais à condition qu’on leur fournisse des outils d’intégration », a souligné le conseil dans un communiqué.

De son côté, un rapport d’un conglomérat financier souligne que le Canada devrait accueillir beaucoup plus d’immigrés afin de compenser sa démographie vieillissante. Les auteurs du rapport ont constaté que la population âgée de 15 à 64 ans devrait augmenter de 2,2% par an jusqu’en 2040 pour maintenir le ratio qui existait en 2022.

Et si le Canada souhaite revenir au ratio moyen des personnes âgées de 65 ans et plus qu’il avait entre 1990 et 2015, ce groupe de Canadiens devrait croître de 4,5% par année.

Les partisans d’une immigration plus élevée soutiennent que le marché du travail est en mesure d’absorber plus de travailleurs et que le Canada a besoin de plus de populations en âge de travailler pour soutenir et renflouer ses caisses et compenser les départs à la retraite.

(Avec MAP)