Du 17 au 20 février s’est tenue à Bamako la première Commission militaire mixte entre le Maroc et le Mali. Dans ce cadre, le général de Brigade Mahamadou Massaoulé Samaké a accueilli son homologue marocain Abdelghani Mouhib pour co-présider l’événement. “L’objectif est de renforcer les capacités opérationnelles des forces maliennes à travers un partage de savoir-faire technique et stratégique”, explique à TelQuel Mamadou Nientao, enseignant-chercheur à l’Université des sciences juridiques et politiques de Bamako et professeur à l’École de Guerre du Mali.
Si le contenu des échanges n’a pas été rendu public, Nizar Derdabi, expert en défense et sécurité, nous apprend qu’une commission mixte dans ce genre, quand elle est présidée par deux généraux, “a pour but de renforcer la coopération militaire dans un domaine bien précis”. Ce peut être le renseignement, l’échange de savoir-faire, la programmation de sessions de formation selon les besoins exprimés par un des partenaires, ou le soutien technique et technologique en faveur d’un partenaire, liste-t-il. “Quand la commission est présidée par l’Inspecteur général des FAR en personne (Abdelghani Mouhib, ndlr), il s’agit de coopération militaire au niveau stratégique”, développe-t-il.
L’impact pour les relations Maroc-Mali
Prenant la parole à Bamako, le Général de Brigade Abdelghani Mouhib “a témoigné de la volonté du Maroc à soutenir le Mali dans la lutte contre le terrorisme”, rapporte le professeur Mamadou Nientao, soulignant les rapports anciens qu’entretiennent les deux pays. Par ailleurs, le général aurait “réitéré l’engagement du royaume à soutenir le Sahel dans la gestion des défis sécuritaires actuels”, poursuit-il.
Dans le rapprochement militaire qui se profile entre les deux pays, le contexte joue pour beaucoup. Depuis quelques mois déjà, l’alliance historique entre le Mali et l’Algérie, force tutélaire historique de la région, décline. Sur le terrain, Bamako reproche à son voisin au nord d’offrir “le gîte et le couvert” aux rebelles du Mouvement national de libération de l’Azawad. Et par communiqués interposés, une guerre des mots s’est engagée.
Le 1er janvier dernier, le ministère des Affaires étrangères malien a lancé à son voisin qu’il “ne permettra à aucun acteur extérieur de mener une stratégie éculée de pompier pyromane”. Par ailleurs, l’Alliance des États du Sahel, formée il y a plus d’un an entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso, peine à contenir la menace jihadiste du JNIM (Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans), de Boko Haram et de l’État islamique.
Communiqué du Ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale de la République du Mali dénonçant la persistance de certaines Autorités algériennes à poursuivre des actes d’ingérence dans les affaires intérieures du Mali.
Bureau de l’Information et de la… pic.twitter.com/J7jkJ4xrmb
— Ministère des Affaires étrangères du Mali (@MaliMaeci) January 1, 2025
Pour autant, Mamadou Nientao estime que le rapprochement avec le Maroc n’est pas porteur d’un message envers Alger, quand bien même elle pourrait être perçue par le gouvernement d’Abdelmadjid Tebboune comme “une réponse et une menace à la fois”, imagine-t-il. Au contraire, selon le professeur, il s’agit davantage pour Bamako de “diversifier ses partenariats stratégiques, dans un contexte où le Mali est confronté à des défis sécuritaires persistants”.
Dans ce contexte, “l’implication du Maroc dans la formation militaire et l’équipement des troupes maliennes reflète une volonté de bâtir un partenariat durable, fondé sur des échanges concrets et une assistance adaptée aux réalités du terrain”, détaille-t-il.
Outre la doctrine marocaine de non interférence dans les affaires internes qui plaît à Bamako, dans ce contexte de diversification des partenaires, “l’appui du royaume, reconnu pour son expertise militaire et sa politique de coopération africaine, constitue un levier important pour les forces armées maliennes”, se réjouit-il.