CAN 2023 : et si cette fois-ci était la bonne ?

L’équipe nationale entame, le 17 janvier, son parcours en Coupe d’Afrique des Nations 2023, disputée en Côte d’Ivoire. Avec un statut de favoris, les Lions de l’Atlas débuteront l’aventure face à la Tanzanie, avec l’espoir d’aller au bout de la compétition et en voir le dernier carré, pour la première fois depuis 2004. Et si cette fois-ci était la bonne ?

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Mondial-2022 : le Maroc en quart de finale après sa victoire face à l'Espagne aux tirs au but (3-0 t.a.b. 0-0 a.p.) Crédit: MAP

Demi-finalistes (heureux) de la dernière Coupe du Monde au Qatar, les Lions de l’Atlas de Walid Regragui s’apprêtent à vivre une tout autre aventure dans une compétition qui ne réussit plus au Maroc depuis 2004, et une finale perdue face à la Tunisie (2-1).

La Coupe d’Afrique des Nations, cette montagne que les Lions peinent à gravir depuis 20 ans, mais tant convoitée par cette génération de joueurs qui a fait rêver les Marocains au Qatar.

Nous sommes conscients de la responsabilité. Nous irons en Côte d’Ivoire avec un seul objectif, celui de remporter le trophée”, déclarait Mohamed Chibi au micro de la chaîne de la Fédération royale marocaine de football (FRMF), en marge de la première séance d’entraînement des Lions de l’Atlas au Complexe Mohammed VI de Maâmora, avant de s’envoler vers San-Pédro.

Appelé en renfort pour pallier l’absence d’Ayoub El Amloud, le remplaçant habituel de Hakimi dans les plans de Regragui, le joueur de Pyramids (Egypte), révèle les ambitions du groupe. Un groupe de 27 joueurs, sélectionnés sur la base de deux critères : la confiance et la compétitivité.

Des hommes de confiance

Pour aller chercher la coupe qui manque aux Lions depuis 1976 et le sacre à Addis-Abeba, Regragui a choisi 27 hommes de confiance. Des joueurs qu’il connaît bien footballistiquement certes, mais aussi humainement pour vivre une aventure qui peut s’étaler sur un mois, si jamais tout se passe pour le mieux pour l’Mountkhab en Côte d’Ivoire.

Il y a certes des joueurs qui pouvaient y être (dans la liste des 27, ndlr), mais ce sont des détails qui m’ont poussé à choisir. Des états de forme, la confiance du groupe, ma confiance aussi, et après ce sont les résultats qui me donneront raison ou pas”, expliquait Regragui lors de la conférence de presse du 28 décembre dernier. Face à la presse, le sélectionneur national justifiera ses choix en assumant déjà l’entière responsabilité de ce qui se passera en Côte d’Ivoire.

“Il faudra y aller avec de l’humilité, si on est au niveau, aucune équipe ne sera en mesure de nous faire peur, mais (…) on a vu ce qui se passe lorsqu’on manquait d’humilité”

Walid Regragui

Pour lui, il ne suffit pas seulement de ramener les joueurs compétitifs, mais aussi des hommes capables de vivre ensemble, une aventure qui sera des plus exténuantes physiquement, mais aussi et, surtout, mentalement.

“Il faudra y aller avec de l’humilité, si on est au niveau, aucune équipe ne sera en mesure de nous faire peur, mais il faut travailler ensemble, avec le même état d’esprit qu’on avait lors de la Coupe du Monde et dans quelques matchs après le Mondial, et on a vu ce qui se passe lorsqu’on manquait d’humilité”, poursuivait le sélectionneur, qui insiste sur l’esprit d’équipe et le vivre ensemble pour espérer aller au bout de l’aventure.

Favori non assumé

Sur le papier, le Maroc a les armes pour faire face aux meilleures équipes du continent. Après le parcours au dernier Mondial qui a vu l’équipe nationale éliminer trois des favoris de la compétition (Belgique, Espagne et Portugal), “on ne pourra plus se cacher”, comme l’expliquait si bien Regragui au lendemain du retour triomphant de ses Lions à Rabat.

“Je pense qu’il y a de meilleures équipes que le Maroc sur le continent. Un an après la Coupe du Monde, beaucoup d’équipes ont progressé dont la Côte d’Ivoire, l’Égypte, le Nigeria et l’Algérie”

Walid Regragui

Au Qatar, pris par l’émotion, il expliquera que le premier objectif avant d’être roi du monde, est d’être roi de son continent en remportant le trophée qui nous fuit depuis 1976. Il tentera de faire marche arrière, en octobre dernier, en marge d’un nouveau rassemblement des Lions. “(…) Aujourd’hui, on n’est pas favoris. Je pense qu’il y a de meilleures équipes que le Maroc sur le continent. Un an après la Coupe du Monde, beaucoup d’équipes ont progressé dont la Côte d’Ivoire, l’Égypte, le Nigeria et l’Algérie. Des équipes qui n’ont pas été à la Coupe du Monde sont favorites. Nous, on va essayer de se battre et de passer le premier tour”, relativisait Regragui face aux médias.

Dans cette tentative d’atténuation de pression sur ses troupes, Rass l’Avocat n’a, pour une fois, pas pu convaincre les observateurs et les spécialistes internationaux, qui ne voient en aucun cas le Maroc jouer les seconds rôles d’une compétition qui le fuit depuis des années.

“Depuis 1976, le Maroc n’a jamais véritablement réussi de CAN, à l’exception de l’édition 1980 et la 3e place obtenue au Nigéria”, rappelle Amine Birouk, rédacteur en chef de Radio Mars

Au niveau national, la presse comprend la position du sélectionneur qui, dans son discours, reconnaît un état de fait. “Depuis 1976, en Afrique subsaharienne, le Maroc n’a jamais véritablement réussi de CAN, à l’exception de l’édition 1980 et la 3e place obtenue au Nigéria”, rappelle Amine Birouk, rédacteur en chef de Radio Mars.

Le journaliste, qui a sillonné le continent aux côtés des différentes générations de Lions en quête de l’or africain, soupçonne néanmoins un “petit coup de bluff” du sélectionneur, qui chercherait à détourner les regards de son équipe. Pour Hamza Hachlaf, déjà à Abidjan pour entamer sa couverture de la CAN pour le compte du site Internet de la seconde chaîne nationale 2M, la position du sélectionneur est des plus compréhensibles.

“Cette déclaration reflète un bon état d’esprit. On ne s’enflamme pas après le Qatar, on garde les pieds sur terre car la réalité est tout autre. L’Afrique, c’est un continent qu’on a bien du mal à dominer, il suffit de voir le nombre de sorties du premier tour qu’on a vécues depuis 1998”, explique notre confrère.

Au niveau international, le discours est différent. Des sites spécialisés comme Score90.com placent le Maroc de Hakimi au sommet de leurs listes de favoris avec 15% de chances de remporter la CAN, devant le Sénégal tenant du titre et ses 12%.

Pour l’histoire

Si les spécialistes et les bookmakers placent le Maroc en tête de leurs listes de favoris pour le plus prestigieux des titres continentaux, c’est parce que tout amoureux du football a encore en tête l’épopée des Lions de l’Atlas au Qatar. Les joueurs, quant à eux, assurent avoir tourné la page avec désormais la CAN en ligne de mire.

“Tout le monde sait que la CAN n’est jamais facile. Nous sommes ici pour rendre le peuple marocain fier et donner notre maximum. Nous sommes là pour notre pays. On promet de tout faire pour que ce soit encore plus beau que le Qatar… et vous savez ce que ça veut dire”, affirme avec beaucoup d’assurance Sofyan Amrabat, le pilier du milieu de terrain des Lions lors du dernier Mondial, en marge d’un entraînement de l’équipe nationale à San-Pédro.

Dans cette ville de moins de 500.000 habitants, quatre nations se disputent la tête du groupe F. Le Maroc et ses grandes ambitions à peine cachées, la surprenante Tanzanie, la République Démocratique du Congo, habituée aux coups de théâtre, et la Zambie, championne d’Afrique en 2012, qui voit naître une nouvelle génération de joueurs, qui espère marcher dans les pas des Chipolopolos d’un certain Hervé Renard.

Sur le papier, il est logique de penser que le Maroc, 13e nation au classement FIFA, termine en tête de sa poule avant de commencer à entrevoir la voie de la finale. Mais pour marquer l’histoire, il faut “garder la tête froide”.

“La clé de notre réussite est le volet psychologique de cette aventure, et ça tombe bien, parce que je pense sincèrement que c’est le point fort de Regragui et de son groupe. Et ça devrait le faire, si on arrive à capitaliser sur tout ce qu’on a construit depuis la Coupe du Monde”, réaffirme Hamza Hachlaf, qui se dit “optimiste mais pas trop”, à l’approche du coup d’envoi de la compétition.

Pour Amine Birouk, l’idéal serait de “négocier match par match” tout en ménageant les efforts, dans une des compétitions les plus exigeantes physiquement et mentalement, en gardant à l’esprit ce qui nous a déjà fait défaut, dès qu’il s’agit de la CAN, de son football parfois particulier, de son climat et toutes ces particularités qui rendent cette compétition si spéciale aux yeux de tous les Africains.

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