Afro Food Fest : “On a des plats italiens ou français au menu des restaurants, pourquoi pas aussi des spécialités du continent ?”

Samedi 20 mai, l’American Arts Center de Casablanca a été le théâtre de la première édition de l’Afro Food Fest, un événement dédié à la gastronomie africaine au Maroc. TelQuel y était.

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Lindsey Kamara, co-organisatrice de l'Afro Food Fest, l'ambassadeur du Gabon, Sylver Aboubakar Minko Mi-Nseme, et le président de l’Union Marocaine des Arts, Mohamed Berryane El Ouazzani. Crédit: DR

L’Afro Food Fest-Casablanca est l’occasion unique pour découvrir les traditions culinaires africaines et rencontrer les acteurs majeurs de l’afro food business à Casablanca”, affirmaient les organisateurs dans un communiqué.

Défi largement relevé par le président de l’Union Marocaine des Arts, Mohamed Berryane El Ouazzani, et l’entrepreneure en communication digitale Lindsey Kamara, organisateurs de cet événement qui a réuni nombre de Marocains, Subsahariens, Européens et Américains autour de la culture africaine. L’ambassadeur du Gabon Sylver Aboubacar Minko Mi Nseme et le président de l’Association des Subsahariens au Maroc (ASAM) Abdoulaye Diop ont également répondu présents.

Au programme de cette journée, une immersion dans un épisode de la série documentaire High on the Hog (La part du lion) qui suit le journaliste culinaire afro-américain Stephen Satterfield au Bénin pour remonter aux sources de la cuisine afro-américaine, suivie d’une conférence sur les enjeux de la gastronomie africaine au Maroc, de l’import des denrées à la restauration, en passant par la promotion.

Un buffet offert par la société de livraison de cuisine africaine Whabo Food était également au menu, une manière conviviale de faire la promotion de la culture africaine autour d’un bissap et de spécialités de différents pays du continent.

Dans l’après-midi, les entrepreneurs en herbe étaient conviés à des workshops de formation à l’entrepreneuriat digital, en partenariat avec l’ESMC Business School, autant de clés pour lancer leur propre entreprise dans l’industrie culinaire africaine. La journée s’est clôturée par un concert du groupe Kalimba Project.

L’afro food business, une mine d’opportunités

La conférence “Afro food business, enjeux et opportunités au Maroc”animée par le journaliste Teddy Patou de Radio 2M, a réuni plusieurs acteurs de l’industrie alimentaire africaine à Casablanca. Jawad Bennani, propriétaire du restaurant Bambou d’Afrique, Sandia Nassila, Food, Beverage, Entertainment & Lifestyle Manager au sein du groupe hôtelier ONOMO Hotels, Daril Oye Mba, co-fondateur de Whabo Food, une application de livraison de spécialités africaines à Casablanca, et Abdellah Sajid, importateur de produis subsahariens au Maroc, ont pu y soulever plusieurs problématiques.

La première est de répondre à une demande croissante de produits du continent, qui s’explique par une communauté subsaharienne de plus en plus présente au Maroc. “Il y a une forte croissance de la diaspora subsaharienne au Maroc, ce qui fait augmenter la demande des produits alimentaires subsahariens”, déclare Daril Oye Mba.

Un des stands de l’Afro Food Market.

Si de nombreux produits sont disponibles dans des marchés traditionnels au Maroc, leur importation reste pour le moins artisanale. Pour répondre à cette problématique, Abdellah Sajid s’est lancé dans l’import. Sa société est la première à passer par le circuit réglementaire d’importation, avec toutes les difficultés que cela comporte. “Le processus pour importer des produits alimentaires est un processus assez complexe, parce qu’il y a beaucoup d’exigences au niveau de la douane et de l’ONSSA, surtout pour les sociétés nouvellement créées”, explique-t-il.

L’entrepreneur espère pouvoir fournir un panel encore plus varié de produits aux restaurateurs : “Notre objectif est clair, on veut vous ramener des produits de meilleure qualité au meilleur prix, de façon légale et structurée.” À plus long terme, l’idée est de “faire en sorte que ces produits soient disponibles dans les supermarchés au Maroc tels que BIM, Marjane ou Carrefour, car il n’y a aucune raison que la communauté subsaharienne, qui est assez importante, ne puisse pas trouver ses produits dans les supermarchés”.

Décoloniser par le menu ?

Jawad Bennani est d’ailleurs l’un de ses fidèles clients. Après 34 ans en Côte d’Ivoire, il a ouvert le restaurant Bambou d’Afrique à Casablanca en 2008, pour répondre à la demande de la communauté subsaharienne au Maroc, mais aussi à une envie profonde de faire découvrir cette gastronomie dont il raffole aux Marocains. “On a été comme des ambassadeurs de ces pays subsahariens pour représenter cette gastronomie au Maroc, la faire goûter et valoriser. Les gens sont réticents au début, mais dès qu’ils la goûtent, ils ne peuvent plus s’en passer”, sourit-il.

Le restaurant Bambou d’Afrique, ouvert en 2008 par Jawad Bennani (2e à droite) à Casablanca, est vite devenu une institution.Crédit: Bambou d'Afrique / Facebook

De son côté, Sandia Nassila donne en exemple la chaîne hôtelière ONOMO qui a à cœur de mettre au menu de ses restaurants des spécialités de différents pays africains. Une manière de promouvoir cette gastronomie auprès des touristes, mais aussi des Marocains qui profitent du volet restauration de l’enseigne présente à Rabat et Casablanca.

Au-delà de ces problématiques soulevées pendant la conférence, la co-organisatrice de l’événement Lindsey Kamara invite les professionnels de l’hôtellerie et de la restauration à intégrer une spécialité africaine à leur carte pour promouvoir les cuisines du continent. “On a bien des plats italiens ou français au menu des restaurants, pourquoi pas aussi des spécialités du continent ?” L’appel est lancé.

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